Dès le début du XXe siècle des syndicats se sont formés aux quatre coins du monde. Rapidement l’idée de se fédérer à l’échelle internationale se fait sentir, entraînant l’apparition de différentes internationales : libre, chrétienne, communiste.
L’idée d’un syndicalisme international vient de la jeune CGT française dès 1901 qui fonde alors le Secrétariat syndical international avec des syndicalistes d’Allemagne, d’Angleterre, de Belgique et de Suède. Le SSI se transforme en 1913 en Fédération syndicale internationale présente dans une quinzaine de pays. Mais la FSI ne survit pas aux « unions sacrées » de la Première Guerre mondiale. Elle va se reconstituer en juillet 1919 sous le nom « d’Internationale d’Amsterdam » avec Léon Jouhaux comme vice-président. Au même moment les syndicalistes chrétiens fondent à La Haye la Confédération internationale des syndicats chrétiens (CISC). Il s’agit à l’époque de contrer l’offensive des bolcheviks russes qui commencent à mettre en place le Profintern, officialisé en 1921 sous le nom d’Internationale syndicale rouge (ISR). Il s’agit alors pour les communistes de mettre la main sur le monde syndical pour en faire sa « courroie de transmission » dans le monde ouvrier. C’est l’opposé de l’esprit de la Charte d’Amiens de la CGT français et de la toute nouvelle CNT espagnole.
Dans l’euphorie de la victoire contre les nazis, le mouvement syndical mondial ressent le besoin de fonder une vaste organisation internationale. Le 24 octobre 1945, à Paris, la Fédération syndicale mondiale (FSM) voit le jour sous l’impulsion des Trade unions britanniques, du Congress of industrial organisations (CIO) américain et des syndicats soviétiques. Son premier président est l’ancien confédéré de la CGT, Louis Saillant, qui va animer une tendance « centriste » entre Jouhaux et Frachon entre 1945 et 1947. Avec les débuts de la guerre froide, trois tendances apparaissent dans la FSM : d’un côté les communistes (URSS et Europe de l’Est soviétisée), de l’autre les travaillistes (Anglais, Suisses, Scandinaves, Belges, Hollandais) et au milieu le CIO américain, la minorité de la CGT française (la future FO), la CGT italienne et les Chinois du CHU.
D’une internationale à l’autre
Dès le 1er février 1947, Matthew Woll, le secrétaire général de l’American federation of labour (AFL) déclare que la FSM est devenue la nouvelle forme du Komintern. En mars 1948, à la naissance de la CGT-FO, les antisoviétiques de la FSM constituent le Comité consultatif syndical international (CCSI) qui prépare la construction d’une nouvelle internationale indépendante des communistes et de Moscou. Le 19 janvier 1949, Anglais, Américains et Hollandais quittent la FSM. En juin, le CCSI décide de créer une nouvelle internationale. Les Américains de l’AFL et du CIO acceptent d’en faire partie. Le congrès constitutif de la Confédération internationale des syndicats libres a lieu à Londres du 28 novembre au 9 décembre 1949. Bien sûr, la toute jeune CGT-FO est de la partie, d’autant que Léon Jouhaux en est le vice-président. À sa fondation, elle compte 46 millions de membres avec comme slogan « Ni Staline, ni Standard Oil ». La FSM comptera presque dix fois plus d’adhérents puisqu’il s’agit de syndicats officiels obligatoires, de l’URSS à la RDA, de la Chine à Cuba… Mais ces effectifs vont fondre avec la chute du mur de Berlin, la fin des démocraties populaires puis de l’URSS. En 1995, les autorités démocratiques tchèques vont la prier de quitter Prague. Après un cours passage à Damas, elle finit par s’installer à Athènes où elle est accueillie par la tendance communiste de la CGT de Grèce. En effet, les tendances politiques au sein de cette centrale sont officialisées dans ses statuts.
Quant à l’internationale chrétienne (CISC), en 1968 elle prend le nom de Confédération mondiale du Travail (CMT), se rapprochant de la CISL. Cette dernière, prenant acte des changements géopolitiques mondiaux, lors de son congrès du 31 octobre 2006, change de nom pour devenir la CSI (Confédération syndicale internationale) pour s’ouvrir aux transfuges de la FSM et aux chrétiens qui prononcent leur autodissolution pour la rejoindre. La CSI partage désormais son siège avec la CES (Confédération européenne des syndicats) au sein de la Maison syndicale internationale à Bruxelles.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly