Les grandes surfaces, dont les ventes sont restreintes aux seuls produits « de première nécessité » depuis le 4 novembre, ont été contraintes de fermer des rayons entiers. L’une après l’autre, les enseignes ont annoncé ces derniers jours devoir recourir à l’activité partielle. FO se bat notamment pour le maintien à 100% de la rémunération pour les salariés concernés.
Jouets, guirlandes, livres, jeux vidéo, électroménager, vêtements… Autant de produits désormais interdits à la vente en magasins en raison du confinement mis en place le 30 octobre pour freiner l’épidémie de Covid-19. Les seuls articles autorisés concernent l’alimentation, la presse et papeterie, les matériaux de construction, la quincaillerie, et les produits de toilette, d’hygiène, d’entretien et de puériculture. En conséquence, un certain nombre de rayons ont été fermés dans les hypers et supermarchés depuis le 4 novembre. Quand elles ne sont pas vidées, les étagères sont recouvertes de bâches en plastique ou entourées de rubalise blanc et rouge.
Sur les 700 000 salariés de la grande distribution, environ 160 000 travaillent dans des rayons « non essentiels », selon le site internet jebossenegrandedistribution.fr. La fédération FGTA-FO s’inquiète dans un communiqué de décisions prises à l’emporte-pièce qui mettent en péril des centaines de milliers d’emplois dans la grande distribution (magasins, entrepôts, achats, transports…)
, ainsi que dans l’artisanat, l’alimentation, le commerce, des activités qui comptent beaucoup de TPE…
La situation est d’autant plus critique qu’à l’approche des fêtes de Noël, une grosse part du chiffre d’affaires est constituée de produits non alimentaires. Plus un magasin est grand, plus ces rayons sont étoffés et plus l’impact est fort. Les hypermarchés sont donc les formats plus touchés.
Conséquence sur les primes
Pour y faire face, les enseignes ont annoncé ces derniers jours leur volonté de recourir à l’activité partielle. Chez Casino, sa mise en place a été évoquée avec les représentants du personnel dès le 5 novembre. Tous les salariés des rayons non alimentaires des Géant –- soit environ 800 personnes — pourraient passer à 100 % de leur temps de travail en chômage partiel. Le syndicat SNTA-FO, majoritaire, a obtenu le maintien d’une rémunération à 100%, la prise en charge par l’État à hauteur de 84% du salaire net étant complétée par l’employeur. En fonction de l’activité des magasins, la direction aura la possibilité de rappeler sur site certains salariés.
Chez Auchan, le dialogue social est plus tendu. La direction a affirmé dans un premier temps qu’il n’était pas question de recourir à l’activité partielle avant de faire volte-face deux jours plus tard
, dénonce Laurette Chambas, déléguée centrale FO à l’UES exploitation d’Auchan. Les discussions sont engagées magasin par magasin. Les représentants du personnel étaient conviés à des CSE extraordinaires d’information-consultation le 10 novembre. La direction a prévenu qu’elle refusait de compenser à 100% la rémunération des salariés en activité partielle.
Pour le syndicat FO, l’activité partielle doit être l’ultime recours
. Elle aura des conséquences sur les primes, le 13e mois, l’intéressement, la retraite
, rappelle Laurette Chambas. Le syndicat revendique la prise en charge par l’employeur de la perte de salaire subie par les salariés, le respect du volontariat et de la non-discrimination dans la mise en place du chômage partiel.
L’impact de la baisse d’activité sur l’emploi varie selon les magasins, poursuit la déléguée centrale FO. A un endroit, seuls les salariés des rayons fermés sont concernés, ailleurs cela touche aussi les caisses. Sur quels critères seront désignés les salariés placés en activité partielle ? Et pour quelle proportion du temps de travail ?
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Des employés passés de héros de la Nation à inutiles
A Auchan Aubière, dans le Puy-de-Dôme, 113 salariés seraient concernés par le chômage partiel. La seule solution proposée par la direction pour y échapper est d’accepter la poly-activité en allant travailler en rayons, en caisses et en drive. Les employés de la grande distribution passent de héros de la Nation à inutiles
, ont dénoncé les élus FO de la zone de vie Auchan de Clermont-Aubière dans leur déclaration en CSE. Ils estiment que l’initiative de poly-activité est « précipitée » et ont rappelé que les salariés ne restaient pas inactifs, entre la manutention accrue par les modifications des rayons, la mise en place du click & collect qui nécessite une présence supplémentaire sur le terrain et le comptage de réserves en vue de l’inventaire
. Les salariés vivent d’autant plus mal la situation qu’un PSE supprimant près de 1 500 postes au sein d’Auchan Retail a été présenté début septembre.
Carrefour, de son côté, a annoncé son recours à l’activité partielle le 10 novembre, pour une mise en place dès le 16 novembre. Les CSE seront informés avant la fin de la semaine. Tous les salariés de toutes les structures de l’enseigne sont concernés, avec un taux d’activité variable, explique le syndicat FO. Ainsi, pour les salariés dont les rayons sont fermés, l’activité partielle représentera 50% du temps de travail. Pour l’ensemble des autres salariés des hypers, Market et entrepôts, le temps de travail sera réduit de 10%, soit une journée tous les 15 jours. La baisse sera de 2 jours par semaine pour les salariés du siège. Le pouvoir d’achat des salariés sera maintenu à 100%. Il reste beaucoup de points à éclaircir, comme l’impact de l’activité partielle sur les primes
, réagit Cyril Boulay, délégué de groupe FO chez Carrefour.
Entreprises en danger
Le gouvernement a été très content de trouver les salariés dits de deuxième ligne lors du premier confinement, rappelle Carole Desiano, chargée du secteur de la grande distribution à la FGTA-FO. C’est peu de remerciements que de les reléguer chez eux en raison de décisions prises sur le commerce sont incohérentes.
Pour l’instant, l’impact en matière d’emploi est circonscrit aux rayons non alimentaires fermés. Mais la crainte est que ça aille au-delà et que les magasins mettent du temps à s’en remettre
, s’inquiète-t-elle.
En attendant, avec ces restrictions de vente en magasins, les militants FO dénoncent un véritable cadeau de Noël fait aux groupes de commerce à distance, à commencer par Amazon. On sanctionne le commerce physique au profit du commerce numérique et ce sont les GAFA, déjà hyper puissants avec des entreprises qui ne payent pas forcément d’impôts en France qui vont se gaver, nos entreprises sont en danger
, alerte Cyril Boulay.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly