Deux ans avant la naissance officielle de la CGT-FO, des camarades, déjà réunis au sein du journal Résistance Ouvrière, posaient les jalons de notre Sécurité sociale, une sécu désormais attaquée de toutes parts, comme elle le fut aussi à sa création.
Dès le 26 juillet 1945, Résistance Ouvrière, l’ancêtre de notre journal, annonçait le rapport sur la Sécurité sociale dont était chargé Georges Buisson (1878-1946), précisant que les ambitions du syndicaliste étaient déjà attaquées par l’Assemblée consultative : […] Le gouvernement, cédant à la pression conjuguée des caisses patronales de compensation et des associations familiales, a accepté de différer l’intégration des allocations familiales dans l’ensemble de la Sécurité sociale.
Ceux qui allaient fonder quelques mois plus tard la CGT-FO se battaient déjà pour le principe de la caisse unique.
Derrière Buisson, ils veulent une caisse unique de sécurité sociale, regroupant l’Assurance maladie, l’Assurance vieillesse et les allocations familiales, c’est-à-dire une solidarité par construction
entre les générations.
L’alliance des contraires
Le PCF et le MRP (démocrate-chrétien), membres du gouvernement de Gaulle, vont essayer de vider de leur contenu les ordonnances du 4 octobre 1945. Les « cathos » veulent des caisses d’allocations familiales autonomes par rapport à la « Sécu ». Le PCF leur emboîte le pas. Ambroise Croizat, ministre communiste du Travail, fait passer des deux tiers à la moitié la proportion des représentants salariés dans les conseils d’administration des caisses d’allocations familiales. Il s’agit alors pour le PCF de prendre systématiquement le contre-pied des mesures défendues par les amis de Georges Buisson. Henri Raynaud, autre cadre communiste important dans la direction de la CGT d’après-guerre, va réussir à obtenir l’autonomie administrative et financière des « allocs » vis-à-vis de la « Sécu ».
Il faudra attendre les ordonnances de 1967 pour que cela soit réduit à néant. Quoi qu’il en soit, ce sont bien les futurs militants de la CGT-FO qui vont asseoir les bases d’une sécurité sociale telle que nous la connaissons aujourd’hui. Une « sécu » que les derniers gouvernements voudraient bien tronçonner pour l’affaiblir au profit d’un système privatisé, loin du pacte social français né du programme du Conseil national de la Résistance.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly