L a loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte
vise à lutter contre l’obsolescence programmée des produits manufacturés. L’article 70 de cette loi prévoit la mise en place d’expérimentations afin d’encourager des pratiques commerciales et industrielles plus vertueuses grâce à l’information des consommateurs sur la durée de vie des produits. En étant mieux informés, les acheteurs pourraient ainsi faire des choix de consommation raisonnés en privilégiant les produits dont le temps de vie est le plus élevé. Les acteurs économiques des filières concernées seraient amenés à revoir leur copie et à mettre en place des normes partagées sur la notion de durée de vie. Le dispositif prévu à l’article 70 permettrait donc de lutter efficacement contre l’obsolescence programmée, véritable fléau pour les consommateurs et la planète.
À la suite de l’adoption de la loi précitée, des expérimentations ont été testées par le Commissariat général au développement durable (CGDD) au sein du ministère de la Transition écologique et solidaire, en collaboration avec le Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE) en 2016. Elles se sont toutefois rapidement heurtées à des difficultés techniques pour évaluer objectivement la durée de vie d’un produit, ainsi, et surtout, qu’à un manque d’entreprises volontaires. La raison en est très prosaïque, malheureusement : l’allongement de la durée de vie des produits n’est pas compatible avec le modèle économique dominant, de nature libérale, et les gouvernements successifs, tout acquis à la politique de l’offre et au marché, ne veulent pas le changer.
L’AFOC déplore une politique du pis-aller
Plusieurs acteurs privés préfèrent donc s’orienter vers le concept de réparabilité et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) a travaillé sur un indice simple de réparabilité
(de 0 à 10), fondé sur un questionnaire d’une dizaine de questions objectives : le produit est-il démontable, les pièces détachées sont-elles disponibles, etc. La création d’un indice simple de durée de vie/réparabilité
a ainsi émergé dans le cadre de la concertation sur la feuille de route pour l’économie circulaire (FREC).
Ainsi, le parti a été pris de retenir le concept de réparabilité plutôt que celui de durée de vie (feuille de route de l’économie circulaire rendue publique le 23 avril 2018). La mesure 10 de cette feuille de route prévoit ainsi le déploiement d’un affichage obligatoire, relatif à la réparabilité des produits, à compter de janvier 2020 pour les équipements électriques, électroniques et électroménagers.
Pour l’AFOC, cette politique constitue un pis-aller, notamment car ce dispositif n’apporte de valeur ajoutée au consommateur qu’au-delà de la durée légale de garantie. Pas sûr que le consommateur y trouve son compte, notamment lorsque l’on voit que le prix de la réparation est supérieur au prix de vente du produit.
Une autre approche était possible – et elle le reste –, consistant à mettre sur le marché des produits robustes et fiables. Consommateurs et environnement y auraient trouvé leur compte, mais pas les milieux d’affaires. Encore une fois, l’écologie est le cheval de Troie du libéralisme, qui n’entend pas changer son modèle d’affaires et qui ne s’accommode de la transition écologique qu’à partir du moment où les entreprises y trouvent leur intérêt.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly