Monsieur le Premier ministre,
Nos organisations syndicales ont décidé de s’adresser conjointement au gouvernement du fait du contexte particulier dans lequel se trouve le pays dans son ensemble, la population salariée en particulier.
La crise sanitaire, due à la pandémie de Covid-19, en est à son dixième mois sans que l’on puisse en prédire l’issue. Ses conséquences pour la santé, notamment des personnes les plus exposées, sont d’ores et déjà dramatiques. Ses conséquences sociales et économiques sont désormais violentes pour l’emploi, les perspectives d’emplois, les salaires et les conditions de vie d’une partie importante de la population, la moins favorisée, les jeunes en particulier.
Dans une telle période d’incertitude et d’inquiétude tant pour la santé que pour l’emploi, il nous paraît essentiel que le dialogue social se traduise par une écoute et une réponse effective de la part des pouvoirs publics et le respect de l’autonomie de la négociation collective.
Dans un contexte très évolutif, incertain et d’urgence, nos syndicats, délégués et représentants du personnel ont été fortement sollicités par les salariés.
Malgré des conditions d’exercice dégradées de leur rôle, tant du fait des contraintes sanitaires que de l’affaiblissement des moyens de représentation collective des salariés dus aux effets des ordonnances 2017 réformant le code du travail, ils ont joué un rôle important pour que soient assurées au mieux la protection de la santé au travail et la continuité des activités essentielles.
Ils doivent faire face aujourd’hui à la dégradation majeure de la situation économique et son cortège de restructurations, de suppressions d’emplois, d’augmentation du chômage et de la précarité.
Or, les dispositions sanitaires accrues, destinées à limiter la propagation du virus, se traduisent par des restrictions importantes, notamment en matière syndicale, en ce qu’elles limitent de fait l’exercice régulier du droit de réunion et de manifestation.
Nous demandons ainsi une réunion rapide sur l’évaluation des conséquences des ordonnances travail afin de rétablir les droits de représentation collective des salariés à la hauteur des enjeux actuels.
Alors que des dispositifs d’aides publiques massives sont mis en œuvre pour soutenir l’activité des entreprises, nous en appelons à ce que ces aides conduisent effectivement à préserver les emplois, les salaires et les garanties collectives. C’est pourquoi de véritables engagements doivent être exigés en contreparties et contrôlés quant à leur mise en œuvre effective à court, moyen et long terme, a contrario de ce que nous avons connu et constatons trop souvent. Ce contrôle doit être exercé de l’entreprise, aux territoires jusqu’au niveau national.
Nos confédérations syndicales exigent dans le même temps une réunion d’urgence consacrée à la reconnaissance effective du rôle essentiel des salariés et salariées des emplois dits de la deuxième ligne qui doit se traduire sans délai par une revalorisation des salaires, conditions de travail, d’emploi et de carrières.
Face à la situation de l’emploi et du chômage, nous renouvelons la nécessité que la réforme de l’assurance chômage, décidée en juin 2019, reportée finalement jusqu’à la fin de l’année 2020, soit abandonnée au profit du retour aux dispositions de la convention qui avait été négociée en 2017, qui pourrait ainsi être prorogée d’une année.
Du fait de cette même situation, nous affirmons, quelles que soient nos analyses et positions sur le fond, que le gouvernement devrait annoncer que l’heure n’est pas de remettre à l’ordre du jour le sujet des retraites.
Une copie de ce courrier est adressée à monsieur le président de la République.
Soyez assuré, Monsieur le Premier ministre, de l’expression de notre haute considération.
Laurent Berger
Secrétaire Général CFDT
Philippe Martinez
Secrétaire Général CGT
Yves Veyrier
Secrétaire Général FO
François Hommeril
Président Confédéral CFE CGC
Cyril Chabanier
Président Confédéral CFTC
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly