Claudia Goldin a reçu le prix de la Banque de Suède, présenté comme l’équivalent du prix Nobel en sciences économiques, pour ses travaux sur l’évolution de la place des femmes sur le marché du travail américain.
S i l’on reconnaît aujourd’hui la maternité comme un frein majeur dans l’évolution de carrière, c’est parce que les travaux de Claudia Goldin l’ont prouvé de manière scientifique. Tout au long de sa vie, cette chercheuse, aujourd’hui âgée de 77 ans, a en effet réuni et compulsé plus de deux cents ans de données sur la formation, les diplômes, les salaires, les emplois et les carrières féminines aux États-Unis.
Ses analyses ont fait d’elle une pionnière des « gender studies », telles qu’il n’en existe pas en Europe. Difficile de sélectionner au sein de son apport les études les plus marquantes. Elle a montré que l’emploi des femmes avait diminué à partir du XIXe siècle et de la révolution industrielle, avant de croître à nouveau depuis la diffusion de la contraception. Ce sont également ses recherches qui ont mis en évidence l’impact des auditions à l’aveugle sur le recrutement des musiciennes au sein des orchestres philharmoniques.
À potentiel comparable, les femmes plus souvent en retrait
Enfin, son dernier ouvrage s’intéresse aux « greedy jobs », ces postes avides du temps de ceux qui les occupent, métiers du haut management, du conseil, de la gestion, dans lesquels, pour gravir les échelons, il faut se rendre disponible à toute heure, week-ends compris. Depuis vingt ans, les salariés qui acceptent ces conditions gagnent vraiment plus au taux horaire que ceux qui travaillent selon un schéma hebdomadaire classique, observe-t-elle. Or ce sont souvent des hommes dont les femmes ont accepté de ne plus travailler ou de travailler moins pour s’occuper des enfants, alors qu’elles avaient le même potentiel professionnel que leurs époux. Les femmes ne quittent pas leur poste parce que leurs maris sont riches. Mais leurs époux sont riches parce qu’elles se sont mises en retrait.
La chercheuse est aujourd’hui la première femme à recevoir ce « Nobel » seule (les précédentes lauréates, Esther Duflo en 2019 et Elinor Ostrom en 2009, étaient en fait co-lauréates, partageant leur prix avec des hommes). Claudia Goldin, faisant exception au vu des résultats de ses travaux scientifiques, a également été la première femme nommée à la tête du département économique de l’université d’Harvard et n’hésite pas à rappeler que, dans son foyer, c’est elle qui gagne plus que son mari. Mais devinez quoi ? Claudia Goldin n’a pas eu d’enfants…