Le constructeur ferroviaire, qui avait annoncé 1 500 suppressions d’emplois dans le monde fin 2023, commence à décliner son plan en France. FO, qui est à la manœuvre pour éviter tout licenciement contraint, en appelle à l’État pour proposer une solution financière garantissant la trésorerie du groupe endetté mais au carnet de commandes ultra-plein.
Inacceptable !. Vincent Jozwiak, délégué syndical central FO d’Alstom France, n’a pas d’autres mots pour qualifier l’annonce, le 14 février, de la suppression de 298 emplois en France, dont 198 dans sa principale filiale Alstom Transport SA. Le carnet de commandes du numéro 2 mondial de la construction ferroviaire et « père » des TGV (74 000 salariés dans le monde, dont 12 500 en France fin 2022) n’a jamais été aussi bien garni, avec un montant de commande de plus de 86 milliards d’euros. Commandes à livrer pour les prochaines années.
Sur le périmètre d’Alstom Transport SA (où deux-tiers des suppressions de postes annoncées devraient être conduites, NDLR), je ne me rappelle pas avoir connu un plan de charge aussi rempli depuis trente ans, appuie le militant, qui dénonce des suppressions d’emplois boursières : du tape-à l’œil, pour plaire aux marchés financiers et aux agences de notation. Début février, le groupe a encore finalisé une commande géante de 103 nouvelles rames de métro auprès de la Région Île-de-France, livrables d’ici trois à cinq ans, pour un montant évalué à près de 1,1 milliard d’euros courants (hors taxes). Fin janvier, il avait rendu public un chiffre d’affaires de 4,3 milliards d’euros au troisième trimestre de son exercice financier décalé 2023-2024 (se clôturant fin mars), en hausse de 2,6% par rapport à l’exercice précédent.
FO en appelle à une solution financière assumée par l’État
Reste que le constructeur ferroviaire, qui a racheté en 2020 son concurrent canadien Bombardier Transport, a subi un effondrement de la valeur de son action en octobre dernier (-37%), après avoir admis un flux négatif de trésorerie (à hauteur de – 1,1 milliard d’euros) sur son premier semestre 2023. Ce qui a laissé augurer, sur l’ensemble de l’année fiscale, une hausse de son endettement, déjà établi à 2,135 milliards à la fin de l’exercice précédent. En réponse à cette chute boursière, il a annoncé mi-novembre un plan d’économies incluant – outre des cessions d’actifs, une possible augmentation de capital, une simplification de l’organisation – quelque 1 500 suppressions d’emplois dans le monde, centrées sur les fonctions administratives.
Dans ce contexte, les suppressions de postes qui viennent d’être annoncées en France ne sont malheureusement pas une surprise. Mais elles ne résoudront pas les difficultés d’Alstom. Pour partie, celles-ci sont conjoncturelles, liées à des retards de paiement de clients anglais qui devraient se régler. Pour une autre partie, elles révèlent des problèmes durables de stratégie financière et d’organisation industrielle, sur lesquels FO alerte depuis 2021. Nous sommes face à une direction qui écoute mais n’entend pas. Il y a beaucoup de colère chez les salariés, surtout les anciens, qui disent qu’il n’est pas normal d’être confrontés à un problème d’endettement si régulièrement, explique le militant FO.
Soutenu par la fédération FO de la Métallurgie, il appelle l’État à proposer une solution financière, via BpiFrance, garantissant la trésorerie du groupe. Cela permettrait de sauver les emplois qui pourraient être supprimés en France, martèle Vincent Jozwiak. Dans un communiqué de presse, FO Métaux rappelle qu’Alstom reste en France l’un des acteurs principaux de la décarbonation des transports pour les années à venir et un atout en matière de transition écologique.
Pour l’instant, les salariés ne savent pas où la foudre va tomber
Annoncé le 27 février, le prochain CSE-C d’Alstom Transport SA devrait apporter des précisions sur les 198 emplois menacés dans cette filiale. Pour l’instant, les salariés ne savent pas où la foudre va tomber, commente le militant FO.
Selon les déclarations de la direction d’Alstom France à l’AFP, les suppressions de postes s’appuieraient dans la mesure du possible sur des départs naturels et de la mobilité interne. Nous ne sommes qu’au tout début de la procédure d’information-consultation, modère Vincent Jozwiak, bien déterminé à éviter tout licenciement contraint.