Le géant pharmaceutique Sanofi a confirmé le 21 octobre avoir lancé des négociations exclusives avec le fonds d’investissement américain CD&R pour lui céder le contrôle de sa filiale Opella, qui fabrique entre autres le Doliprane. FO s’alarme des conséquences de cette décision, notamment en matière d’emploi et de maintien des acquis sociaux et se battra pour limiter la casse sociale.
Le dossier est explosif. La fabrication du Doliprane, le médicament le plus vendu de France, va passer sous le contrôle du fonds d’investissement CD&R. Le géant pharmaceutique Sanofi a annoncé le 21 octobre avoir engagé des négociations exclusives avec ce fonds américain pour lui céder 50 % d’Opella, son pôle de santé grand public spécialisé dans les médicaments délivrés sans ordonnance. Cette filiale, qui emploie 11 000 personnes dans le monde dont 1 800 en France, possède deux usines dans l’Hexagone, à Lisieux et Compiègne.
Sur le site de Lisieux, d’où sortent chaque année quelque 400 millions de petites boîtes jaunes, les salariés se sont mis en grève du 17 au 25 octobre, à l’appel d’une intersyndicale qui compte FO, pour dénoncer cette cession. La mobilisation se poursuit désormais sous forme de débrayages.
C’est une catastrophe et une erreur stratégique, Doliprane est l’étendard de Sanofi en France, alerte Adel Qalai, coordinateur FO-Sanofi, qui est intervenu à la tribune du meeting FO le 26 octobre. Il rappelle que le groupe a reçu entre 1,5 et 2 milliards d’euros de crédit impôt recherche (CIR) ces dix dernières années.
La fédération FO-Pharmacie voit dans cette transaction une double menace, à la fois en matière d’emploi et de souveraineté sanitaire. Elle déplore également la stratégie de Sanofi qui consiste à se séparer d’un outil industriel fiable et éprouvé.
Un accord passé entre l’État, Sanofi et CD&R prévoit des garanties en matière d’emploi, de production et d’investissement pour une durée de cinq ans. Des pénalités sont prévues en cas de non-respect de ces engagements : jusqu’à 40 millions d’euros en cas d’arrêt de la production sur les sites français et 100 000 euros pour chaque licenciement économique dans le cadre d’un PSE. La banque publique d’investissement Bpifrance va également entrer au capital de la filiale, à hauteur de 2 %, officiellement pour veiller au respect des engagements pris.
Stratégie financière
Les montants des pénalités sont dérisoires au regard des milliards d’euros déboursés pour cette cession et ils n’offrent aucune garantie, ils n’empêcheront pas CD&R de partir, réagit Franck Bouvais, délégué central adjoint dans la branche industrielle d’Opella et délégué FO sur le site de Compiègne. Il rappelle que chaque année, Opella génère 1,4 milliard de bénéfices nets.
À la suite de cette cession, tous les acquis sociaux liés au groupe Sanofi vont tomber pour les salariés d’Opella. Les accords collectifs devront être renégociés. Notre combat aujourd’hui, c’est de préserver les acquis sociaux, notamment en matière de salaire, de conserver tous les emplois et de négocier une prime de transfert pour les salariés, poursuit le militant. Les négociations d’un accord de méthode démarreront le 7 novembre, au lendemain d’une réunion d’information-consultation.
Cette cession, qui ne devrait pas être effective avant le deuxième trimestre 2025, rapportera 8 milliards d’euros à Sanofi. Elle illustre la stratégie financière du géant pharmaceutique. Le discours initial de la direction pour justifier la vente était de financer la recherche ou l’achat de molécules, poursuit Franck Bouvais. Mais depuis, le P-DG Paul Hudson a annoncé qu’une partie sera reversée aux actionnaires. Sanofi, qui est le plus gros donneur de dividendes du CAC 40, ne veut plus se soucier de la santé au quotidien, sa préoccupation est de gaver les actionnaires, dénonce le délégué FO. Le 25 octobre, le géant pharmaceutique a annoncé une hausse de 12 % de sa rentabilité au troisième trimestre, avec un bénéfice net de 2,844 milliards d’euros.