Si par leurs métiers, le rôle qu’ils ont tenu particulièrement depuis le début de la crise, a été essentiel, les salariés des particuliers-employeurs, souvent assistantes maternelles, ne bénéficient pas de la gratitude des pouvoirs publics qui leur appliquent notamment un dispositif d’activité partielle au rabais. FO revendique l’égalité de traitement, légitime.
Lors du premier confinement, la fermeture des commerces non-essentiels avait conduit de nombreux particuliers employeurs à ne plus recourir aux services de leurs salariés à domicile, particulièrement pour les gardes d’enfants. Ce qui avait placé ces salariés dans une situation financière difficile. Le gouvernement avait enclenché un dispositif exceptionnel d’activité partielle, spécial, pour ces salariés. Pour le second confinement, il l’a réactivé le 20 novembre mais seulement pour certains salariés.
Le dispositif d’activité partielle a vu en effet son périmètre diminué par rapport au premier confinement. Il ne concerne plus que trois cas : les salariés à domicile qui effectuent des activités non autorisées pendant le confinement (cours à domicile hors soutien scolaire, cours à domicile hors soutien scolaire, comme par exemple un cours de musique), ceux qui sont « vulnérables » (susceptibles de développer des formes graves de la Covid-19) et ceux exerçant une activité indépendante arrêtée du fait des mesures sanitaires. Ces derniers sont principalement des gérants de commerces ne pouvant plus accueillir de public.
Les graves manquements des pouvoirs publics
Autre mauvaise surprise de taille, le dispositif d’activité partielle n’indemnise toujours les heures travaillées qu’à hauteur de 80% au lieu de 84% comme cela est de mise pour les autres salariés
, comme lors du premier confinement, s’insurge le secrétaire fédéral chargé des emplois de la famille à la FGTA-FO, Richard Roze. Une inégalité manifeste. FO revendique donc, une nouvelle fois, une égalité de traitement mais aussi une « prime Covid » pour la reconnaissance de l’engagement de ces salariés lors du premier confinement.
La raison d’un dispositif spécial et inégalitaire, explique la secrétaire nationale du syndicat FO des assistantes maternelles Véronique Delaitre, se trouve dans le fait que les emplois des particuliers employeurs, relèvent de plusieurs codes. Concernant les assistantes maternelles, c’est principalement du Code de l’action sociale et des familles (CASF), et très peu de celui du Travail
. C’est le cas aussi pour d’autres salariés de particuliers employeurs. FO s’est d’ailleurs mobilisée contre cette situation, mais le gouvernement n’y a toujours pas remédié.
Une grève « passive » lancée le 3 novembre
Indigné par les graves manquements des pouvoirs publics à l’égard des professions d’assistant(e)s maternel(le)s et de gardes d’enfant depuis le début de la crise sanitaire
, le syndicat FO-FGTA des assistantes maternelles (dites assmats) a donc appelé à partir du 3 novembre à une grève passive et illimitée. Avec brassard noir porté au bras et pour les utilisateurs de Facebook affichage d’un visuel en grève
sur la photo du compte. Une grève très bien suivie.
FO exige aussi que soit mis fin aux dysfonctionnements répétés
de Pajemploi, qui gère ce dispositif d’activité partielle. Essentielle à l’exercice du métier, Pajemploi est une plateforme des Urssaf censée permettre de déclarer facilement la rémunération d’un(e) salarié(e) à domicile ou d’une assistante maternelle pour une activité de garde d’enfants de moins de 6 ans
. Or de graves problèmes récurrents (notamment dans les bulletins de salaire, souvent erronés et/ou envoyés au mauvais destinataire) n’ont cessé, depuis des mois, de compromettre son fonctionnement, dénonce Véronique Delaitre. Il est, par exemple, impossible de joindre ce service par téléphone tandis que les mails n’obtiennent des réponses qu’après des semaines, voire des mois. Ces difficultés ont même été évoquées par des élus à l’Assemblée nationale le 14 octobre dernier.
Les Assmat gagnent à peine le Smic
FO demande aussi la revalorisation des « frais d’entretien », lesquels sont liés à la nécessité, particulièrement patente en ce moment, de désinfecter les locaux avec des produits adaptés, ce qui représente une charge de travail supplémentaire.
Les revendications portent aussi, toujours, sur le salaire avec la demande d’une augmentation minimum à 0,300 fois le montant du Smic brut au lieu de 0.281 actuellement pour le minimum et jusqu’à 0,640 fois pour le maximum
. En moyenne, « les assistantes maternelles gagnent à peine le Smic. Et beaucoup d’Assmat ne sont pas à temps complet » déplore Marie-Claire Dufros, assistante fédérale à la FGTA-FO et secrétaire générale adjointe du syndicat FO des assistantes maternelles. Une militante qui possède plus de dix ans d’expérience comme assistante maternelle.
Les oubliées de la crise
Majoritairement des femmes, les salariés des particuliers employeurs, sont assistants maternels, gardes d’enfants, assistants de vie et employés familiaux. Ils constituent la grande part des services à la personne et leur nombre est loin d’être négligeable : 1,10 million de personnes ont été salariées par un particulier employeur, que ce soit directement ou par l’intermédiaire d’un organisme mandataire, au moins une fois au cours de l’année 2018, selon la Dares.
Ce secteur a été encouragé, depuis 2005, par les politiques publiques en raison de la féminisation du travail, du développement des familles monoparentales, du vieillissement de la population et des départs à la retraite plus tardifs qui ont obligé les ménages à déléguer plus qu’auparavant certaines activités domestiques.
Malgré les risques de contamination en raison de la pénurie d’équipements de protection au début de la pandémie de Covid-19, ces salariés, particulièrement les assistantes maternelles (300 000 personnes en France), ont joué un rôle essentiel pendant le confinement puis après, lors des tentatives de relancer l’économie, rappelle Véronique Delaitre. Elle souligne que ces dernières sont les grandes oubliées
de la crise sanitaire.
Nous sommes des salariés à part entière !
En effet, si elles étaient en première ligne dès lors du premier confinement, elles ont été abandonnées
, peu considérées
ou trop oubliées
. Les assistantes maternelles ont le moral en berne. Leur secteur est durement impacté par la crise, ainsi de nombreux particuliers employeurs aux revenus en baisse ont été conduits à rompre leurs contrats.
Quant au manque de reconnaissance de la part des pouvoirs publics… Lors du premier confinement on leur a demandé d’accueillir davantage d’enfants pour pouvoir garder les enfants des personnels soignants. Pour le deuxième, nous sommes toujours en attente du décret pour pouvoir recevoir jusqu’à 6 enfants. Cette fois, les Assmat n’ont pas droit au chômage partiel mais à une indemnisation exceptionnelle par décret, pour les enfants ayant des parents commerçants. Elles ne touchent que 80 % de leur salaire et les employeurs concernés ne seront remboursés que de 65 %
.
Véronique Delaitre avait déjà alerté en juillet dernier : les assistantes maternelles en ont marre, se sont senties bafouées, peu soutenues
. Or, elles ne sont pas des salariés à part, mais des salariés à part entière
. La militante rappelle que la profession est aujourd’hui dans une situation cataclysmique
. Alors que beaucoup d’Assmat vont bientôt prendre leurs retraites, on ne compte plus celle qui abandonnent le métier
.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly