Yves Veyrier : « Retraites : attention à la surenchère électoraliste »

Nous aurons finalement eu raison du projet de réforme des retraites : la mère des réformes, telle que la qualifiait le président de la République, ne verra pas le jour sous ce quinquennat. Le président lui-même, la ministre du Travail à son tour, ont finalement dû reconnaître que tous les éléments de communication qui avaient été mis en avant pour la justifier (plus simple, plus équitable, plus juste…) n’ont jamais convaincu. Et pour cause ! Ne nous privons pas de rappeler combien nous avons dû expliquer, réagir, contrer ces affirmations, démontrer en quoi elles n’étaient pas fondées. Face aux ministres, Haut-commissaire, députés dits  ambassadeurs de la réforme, économistes à l’origine du projet… allant jusqu’à démontrer que bien des intervenants sur le sujet non seulement ne maîtrisaient pas les conséquences de ce projet, mais bien souvent ne connaissaient pas même le système actuel.

Si le président comme la ministre ont aussi reconnu que le projet de réforme avait été porteur d’inquiétudes, l’inquiétude venait de ce qu’il devenait de plus en plus clair que l’objectif était bien – contrairement à ce qui avait été affiché à l’origine – d’aboutir à retarder l’âge effectif de la retraite.

La retraite, l’Assurance chômage ont été mises sur pied pour assurer la solidarité entre les salariés

Il faut bien comprendre qu’outre contraindre à devoir travailler plus longtemps ceux qui sont encore en emploi – quand dans le même temps trop de jeunes et moins jeunes, voire des seniors, ne demandent qu’à trouver un emploi –, reculer l’âge de départ conduira à pénaliser d’une décote supplémentaire tous ceux, et plus souvent celles, qui ne sont déjà plus en emploi au moment de faire valoir leur droit à la retraite – en moyenne déjà à 63,5 ans du fait de l’allongement de la durée de cotisation.

Affirmer aujourd’hui qu’il faudra « travailler plus longtemps en repoussant l’âge légal » a certes le mérite de la clarté mais n’affaiblira pas notre opposition.

Renvoyer ce débat dans le cadre de l’élection présidentielle est aussi contestable. Attention à ne pas faire du droit à la retraite des salariés l’objet de surenchères électoralistes. Il n’a pas fallu longtemps pour que nos craintes se vérifient. Le Sénat vient ainsi de s’empresser de faire montre de zèle en votant un report à 64 ans et l’accélération de l’allongement de la durée de cotisation à quarante-trois ans. La leçon devrait pourtant être tirée avec l’échec de la « mère des réformes » portée lors de la campagne de 2017.

Attention à cette fâcheuse tendance à opposer les uns aux autres : ici les retraités aux actifs, ceux qui ont pu accomplir une carrière complète à ceux – celles encore le plus souvent – qui subissent les emplois à bas salaires, à temps partiel, les contrats précaires et qui atteindront plus difficilement encore les conditions d’une retraite à taux plein, ceux qui bénéficient d’autres revenus que ceux du travail aux salariés… Là, avec la réforme de l’Assurance chômage, en stigmatisant les salariés qui subissent les emplois précaires, les demandeurs d’emploi qualifiés d’inactifs et sanctionnés à ce titre !

La retraite, l’Assurance chômage ont été mises sur pied par l’action syndicale pour assurer la solidarité entre les salariés et entre actifs et retraités. Nous devons en être fiers et faire savoir qu’il faut et faudra compter sur nous pour les défendre : hier, comme aujourd’hui et demain !

Quitter la version mobile