Vie universitaire : les Crous encore plus à la peine


Chaque semaine, 200 étudiants de la Rochelle ont recours à l’aide alimentaire titrait à la mi-février un journal de Charente Maritime notant que la fréquentation de ce service, financé notamment par le Crous mais aussi, entre autres par la Banque alimentaire, a augmenté de 170% dans la cité. Cette situation n’est pas une exception sur le territoire. Des milliers d’étudiants, y compris non boursiers, ou de jeunes actifs avec ou sans emploi, sont dans ce cas, connaissant des difficultés, notamment pour se loger et se nourrir.

En 2020, les Crous ont versé deux fois plus d’aides d’urgence aux étudiants qu’en 2019 indiquait récemment le Cnous (centre national des œuvres universitaires et scolaires) et depuis la dernière rentrée universitaire, le phénomène de précarité étudiante a été décuplé soulignait mi-février sur franceinfo son directeur de projets analysant qu’il faut améliorer l’accès au droit de santé des étudiants mais aussi lutter contre leur surendettement, contre les impayés de loyers. Par la crise, huit étudiants sur dix déclarent subir des préjudices, notamment au plan de leur pouvoir d’achat.

En décembre, un rapport parlementaire notait qu’un tiers des jeunes, étudiants ou pas, a renoncé au moins une fois à des soins ou examens médicaux depuis la crise. Ils étaient déjà 30% auparavant, et notamment pour des motifs financiers, c’est dire la fragilité de leurs moyens et qui n’est pas récente.

Fin janvier, l’exécutif annonçait le plateau-repas à 1 euro (contre 3,30 euros auparavant) dans les restos Universitaires, pour les étudiants, boursiers ou non. Depuis le 18 février, les jeunes, via Action logement, peuvent percevoir (sous conditions) une aide de 1 000 euros pour un premier logement.

Pour les étudiants, la difficulté à trouver un logement dans les résidences dédiées se comprend à la seule observation de quelques chiffres. Un travail sénatorial dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021 soulignait ainsi un retard toujours considérable dans la mise en œuvre du plan 60 000 logements étudiants, lequel a pris la suite du plan pour la création de 40 000 places. Mais seules 33 496 places devraient finalement être mises en service entre 2018 et 2022 indique le Sénat.

Une « vie étudiante » aux crédits malmenés

Malgré les aides, par exemple celle de 500 euros pour les jeunes diplômés en difficulté ou l’allocation (qui connaît des ratées) de 900 euros maximum pour les travailleurs précaires (70 000 jeunes concernés), la jeunesse jongle pour vivre avec un porte-monnaie quasi-vide.

Par ailleurs, face à la crise, le montant des bourses accordées aux étudiants, paraît dérisoire. Selon les ressources, des parents, le montant va de 1 032 euros à 5 679 euros par an, jusqu’à 6 815 euros en cas de maintien pendant les grandes vacances.

En ce qui concerne les moyens accordés à la « vie étudiante », la loi de finances pour 2021 a prévu une hausse de 133,5 millions, soit 4,8% (contre 2,5% en 2020) consistant pour moitié à des moyens pour les aides directes, pour l’autre en des subventions allant aux Crous, la moitié du montant de ces dernières devant compenser la baisse des recettes des Crous par les repas à 1 euro.

Dans le cadre des débats sur le projet de loi de finances, le Sénat remarquait que pour 2021, concernant les actions, notamment celles des Crous dans le domaine de la santé, mais aussi des pratiques sportives et culturelles, les crédits étaient en baisse de 0,4 million d’euros.

Par ailleurs, en 2019, année où 322 millions d’euros de crédits avaient été supprimés dans l’enseignement supérieur, le gouvernement avait décidé d’annuler 35 millions d’euros de crédits pour le financement de la vie étudiante et des bourses (géré par les Crous). En 2020, il annonçait certes que le budget de la vie étudiante était augmenté de 70 millions d’euros, ce montant incluait toutefois les 35 millions annulés précédemment.

Le manque de moyens, toujours…

En juillet dernier, un rapport de la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation de l’Assemblée nationale alertait, lui, sur la perte budgétaire des Crous (souffrant par la crise de moins de recettes tout en finançant des aides aux étudiants) due à la crise, estimée à 95 millions d’euros depuis mars 2020, et risquant d’atteindre 190 millions en décembre 2020, voire 221 millions d’euros. Le constat était clair : les Crous allaient manquer de moyens.

La 3e loi de finances rectificative avait adopté un versement supplémentaire pour la vie étudiante dont 45 millions, seulement, pour les Crous, 75 millions d’euros pour les aides d’urgence exceptionnelles et 30 millions d’euros pour le maintien des bourses en juillet. Ce n’est pas suffisant martelait le rapport pointant aussi le manque de personnels dans les Crous avec un accompagnant pour 12 000 étudiants. Il faudrait au moins ramener ce ratio à un pour 7 000 étudiants préconisait le rapport chiffrant la mesure à 7,5 millions d’euros. Mais pour cela, il faudrait recruter…

Dans un journal en ligne, une assistance sociale travaillant dans un Crous, soulignait récemment le manque de moyens des services et la gravité de la situation actuelle de beaucoup de jeunes.  Vivre avec une bourse de 560 euros maximum en région parisienne comme ailleurs relève du défi, mais alors en temps de pandémie, cela relève de l’impossible indiquait-elle, s’insurgeant aussi contre les conditions de travail dégradées des assistants des services sociaux lesquels ne sont pas écoutés tandis que leurs missions d’aides aux jeunes sont plus difficiles encore en ce temps de crise.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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