Inédit, l’ensemble du personnel d’Altuglas international de Saint-Avold est en grève depuis ce 16 mars à l’appel de quatre syndicats dont FO. Les salariés de la seule usine française de cette entreprise du secteur de la chimie, et qui fabrique sur le site mosellan des plaques de verre acrylique, s’inquiètent pour leurs emplois et rémunérations. Le groupe leader français de la chimie Arkema a décidé de céder sa filiale Altuglas le 3 mai à l’américain Tinceo, endetté, et dont les premières déclarations n’ont rien de rassurant. A Saint-Avold, les salariés demandent une prime spécifique de 10 000 euros pour perte de pouvoir d’achat.
La production à l’arrêt et tout le personnel en grève, y compris les administratifs… C’est inédit ici
indiquait le 16 mars le délégué syndical FO Marc Draia du site Altuglas International de Saint-Avold (Moselle) alors que les quatre syndicats de l’usine, dont FO (majoritaire avec 49% des voix aux dernières élections), ont lancé une grève de 48 heures.
Seul site français d’Altuglas, dont le siège est situé à Colombes près de Paris et qui possède des usines au Danemark, Mexique, USA et en Italie, Saint-Avold fabrique pour sa part du verre acrylique (utilisées dans le sanitaire, l’aéronautique…) et compte 120 salariés en CDI et une quinzaine d’intérimaires et de CDD. Si la production a fortement augmenté depuis deux ans, au point qu’une 8e équipe de travail a dû être montée pour faire face aux commandes souligne le militant, le groupe Arkema (présent dans 55 pays, plus de 20 000 salariés), leader français de la chimie (près de 8 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2020), a décidé de vendre Altuglas international dont il est actionnaire à 100%.
Or, Altuglas affiche un Ebitda (bénéfices avant intérêts, impôts…) de 23% et est, par ses résultats, la 3e meilleure business unit (unité commerciale, Ndlr) d’Arkema. Pas suffisant semble-t-il pour le groupe qui argue de l’activité trop cyclique des produits d’Altuglass (le polyméthacrylate de méthyle/PMMA) et compte réorienter son activité vers l’adhésif et la colle. Arkema, dont les finances vont très bien a d’ailleurs acheté le français Bostik en 2015.
Déjà l’annonce d’économies
Pour Arkéma, nous ne sommes pas assez rentables !
s’insurge Marc Draia. Annoncée en avril dernier, la vente d’Altuglas international a été confirmée récemment lors d’un CSE et l’opération a même été avancée au 3 mai prochain, au lieu de juillet. L’acheteur, pour un milliard d’euros, est américain, Trinceo, spécialisé dans le caoutchouc, latex et plastiques, anciennement détenu par un fonds d’investissement et désormais détenteur de son propre capital. Mais un groupe affichant un endettement de 21%
précise le délégué FO. Une inquiétude parmi d’autres.
Arkema assure que rien ne changera pour les salariés de St-Avold dans les 24 mois à venir et s’engage pour les trois années suivantes à un reclassement s’il devait y avoir des licenciements dus à un PSE. Mais cela n’ôte pas la crainte de départs hors PSE
explique le militant. Quant à Trinceo, qui ne connait pas les produits fabriqués à St-Avold
remarque Marc Draia reçu comme ses homologues syndicaux par les représentants du groupe, il programme déjà de réaliser des économies à hauteur de 50 millions de dollars sur les trois ans à venir.
Le code du travail mais a minima
…
L’acheteur a annoncé qu’il était nécessaire d’améliorer la production, de booster l’automatisation, de moderniser le service informatique, de revoir les frais fixes, de même que l’organisation des fonctions support. Nous sommes inquiets pour les emplois, notamment dans les services support, et au siège qui compte 37 salariés
indique le délégué FO. L’américain ne veut pas de doublons et annonce qu’il appliquera a minima le code du travail
. A St-Avold, cela résonne légitimement comme une menace. Nous apportons notre savoir-faire mais on ne sait pas en retour quel sera l’avenir de nos emplois et rémunérations
s’inquiète le militant.
Les salariés mettent ainsi en avant la perte de pouvoir d’achat qui les menace au-delà des 24 mois après la vente, cela par la perte des éléments actuels : participation, intéressement et plan d’épargne groupe. Ils revendiquent donc une prime spécifique de 10 000 euros.
Lors d’une réunion de négociation ce 16 mars, la direction d’Altuglas a proposé aux salariés de St-Avold et à ceux du siège à Colombes, une prime de 1300 euros pour les bons résultats enregistrés depuis seize mois
indique Marc Draia. Les syndicats ont transmis l’information aux salariés. Pour l’instant, la grève continue et toutes les livraisons de produits pour la plateforme chimique sont bloquées…
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly