Une année charnière pour le Tour de France femmes

Décalée à la mi-août en raison des Jeux olympiques, l’épreuve féminine doit confirmer son engouement populaire naissant. Les attractions attendues : le public néerlandais, L’Alpe d’Huez et la tenante du titre, Demi Vollering.

Du nouveau pour éviter les JO

Relancé en 2022, le Tour de France femmes s’était, ces deux dernières années, déroulé dans la foulée immédiate de son équivalent masculin, offrant aux spectateurs quatre semaines de vélo d’affilée. Mais cet été, les Jeux olympiques de Paris changent complètement la donne. « La priorité était de garder un créneau pendant les vacances scolaires, pour que cela reste un succès populaire », expliquait, au moment de la présentation du parcours, la directrice de l’épreuve, Marion Rousse. C’est donc du 12 au 18 août que les coureuses participeront à cette édition 2024 du Tour de France… qui se déroulera en majeure partie à l’étranger ! Conséquence directe des Jeux olympiques là aussi, la Grande Boucle femmes s’élancera de Rotterdam et restera trois jours aux Pays-Bas avant de rejoindre la Belgique puis, à l’arrivée de la cinquième des huit étapes seulement, la France. Autre changement : la tenue de deux demi-étapes la même journée, le mardi 13 août, avec une étape en ligne le matin puis un contre-la-montre individuel de 6,3 kilomètres l’après-midi. On a choisi les Pays-Bas parce qu’on sait qu’il y aura un engouement, expliquait encore Marion Rousse. C’est le pays du vélo, avec de nombreuses championnes comme Demi Vollering, la tenante du titre.

Des symboles pour marquer les esprits

Les Champs-Élysées et La Planche des belles filles en 2022, le Tourmalet en 2023 : depuis qu’il a repris en main le Tour de France femmes, l’organisateur ASO s’échine à proposer sur l’épreuve des légendes du Tour masculin. Une course aux symboles qui est également au programme cet été puisque le juge de paix de l’épreuve sera la mythique ascension de L’Alpe d’Huez, dont les fameux vingt et un virages (13,8 km à 8,1%) serviront d’arrivée à la dernière étape, qui passera aussi par le col du Glandon (19,7 km à 7,2%). Un final époustouflant pour une semaine qui ira crescendo, esquivant longtemps la haute montagne – il est vrai inexistante aux Pays-Bas… Mais passé le chrono de Rotterdam, qui fera de premiers écarts au général, la quatrième étape, à mi-parcours, sera un rendez-vous important et chargé, lui aussi, de symboles. Elle reliera en effet Valkenburg à Liège, c’est-à-dire les villes hôtes de l’Amstel Gold Race et de Liège-Bastogne-Liège, les deux classiques ardennaises du printemps. Autrement dit, le parcours sera particulièrement vallonné, avec notamment le célèbre Cauberg, juge de paix de la classique néerlandaise, mais aussi Mont-Theux, la côte de la Redoute, la côte des Forges et la côte de la Roche-aux-Faucons, quatre des principales difficultés de l’épreuve belge. Le spectacle sera forcément au rendez-vous, que ce soit sur la route ou tout autour : le public s’annonce nombreux sur ces terres où le cyclisme est roi.

Qui peut battre Demi Vollering ?

Deuxième il y a deux ans, vainqueure l’an dernier, Demi Vollering s’avance sur ce Tour 2024 dans la peau de la tenante du titre et surtout de la grandissime favorite. À 27 ans, la Néerlandaise est intouchable dans les grands cols depuis un an et demi et semble presque seule au monde maintenant que sa rivale et compatriote Annemiek van Vleuten, lauréate de l’édition 2022, a pris sa retraite. Sa position est d’autant plus confortable qu’elle évolue dans l’équipe la plus forte du peloton, la SD Worx, où elle peut compter sur le soutien de la championne du monde Lotte Kopecky, de sa compatriote Lorena Wiebes ou de la Suissesse Marlen Reusser, toutes trois parmi les toutes meilleures coureuses du peloton…

Le parcours du Tour de France femmes, de Rotterdam à L’Alpe d’Huez, du 12 au 18 août 2024.

Elle ne manque néanmoins pas d’adversaires. La première d’entre elles est peut-être celle qui a terminé troisième des deux dernières éditions, Katarzyna Niewiadoma : excellente grimpeuse, la Polonaise a très bien démarré la saison et semble avoir retrouvé ses toutes meilleures jambes, celles d’il y a cinq ou six ans, quand elle collectionnait les succès. Mais le public français aura surtout le regard tourné vers Juliette Labous. Cinquième l’an dernier, quatrième l’année précédente, la coureuse de la DSM est une grimpeuse de top niveau mondial et sa deuxième place sur le Giro, l’an passé, montre qu’elle a les capacités pour viser mieux sur le Tour de France.

Mais, au vu de l’avantage physique et psychologique de Vollering, c’est peut-être pour les deux autres places sur le podium que le reste du peloton va essentiellement se battre. Ce sera en tout cas l’objectif principal de la Danoise Cecilie Uttrup Ludwig, de l’équipe FDJ-Suez, septième l’an dernier, ainsi que des Italiennes Silvia Persico (cinquième il y a deux ans) et Gaia Realini (troisième du Giro et de la Vuelta l’an dernier, à 22 ans seulement). Leur compatriote Elisa Longo Borghini sera aussi à surveiller, portée par un début de saison tonitruant, mais elle a jusqu’ici toujours montré des limites en haute montagne. Et puisque les Pays-Bas sont la nation forte du cyclisme chez les femmes, il faudra garder à l’œil la vainqueure du Tour de l’Avenir 2023, Shirin van Anrooij…

S’installer dans la durée

Passé l’euphorie de la relance de l’épreuve, le Tour de France femmes doit désormais faire le plus dur : confirmer. Le succès populaire a été au rendez-vous ces deux dernières années, mais cette édition 2024 est plus à risques, avec ces dates décalées et un risque d’overdose de sport pour le public, après un enchaînement Euro de foot – Tour de France hommes – Jeux olympiques, entre la mi-juin et la mi-août. Des Tours de France femmes, il y en a eu avant nous et tous ont fini par disparaître, n’oublie pas Marion Rousse. Notre priorité, c’est donc d’abord de pérenniser l’épreuve. La patronne du Tour femmes sait que dans cette optique, elle joue gros cet été. Mais qu’avec la locomotive que représente le Tour masculin derrière elle, ses appuis restent très solides. Si, en plus, une coureuse française venait à se mêler à la lutte pour le maillot jaune…

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