Plus que jamais ce 1er mai, les travailleurs ont réaffirmé leurs revendications. Nombreuses. Non à l’austérité, hausse des salaires, préservation des emplois, abrogation de la réforme des retraites, amélioration des conditions de travail, arrêt des suppressions de poste dans les services publics, … Alors que les tensions dans le monde ne faiblissent pas, en cette journée internationale des travailleurs 2025, les militants FO ont particulièrement mis en avant le slogan : Pain, paix, liberté.
Abrogation de la loi retraite – Non à l’effort de guerre. Des slogans que l’on a pu entendre souvent dans les cortèges qui ont rassemblé au total quelque 300 000 manifestants sur tout le territoire ce 1er mai pour la Journée internationale des travailleurs. A Paris, le secrétaire général de la confédération, Frédéric Souillot, rappelait lui le slogan : Pain, paix, liberté ! Le pain, pour qu’on arrive à nourrir nos familles, la paix, c’est parce que les travailleurs sont toujours les premiers qui tombent en temps de guerre. Et la liberté c’est celle de se rassembler, et non pas ces dépôts de loi contre le droit de grève à la SNCF ou ailleurs. Il faut utiliser cette journée pour faire valoir nos droits.
Dans la capitale, la journée a commencé, pour FO notamment, par l’hommage rendu aux combattants de la Commune de Paris devant le mur des Fédérés au cimetière du Père Lachaise. La traditionnelle cérémonie, à laquelle ont participé cette année plusieurs organisations syndicales, était organisée par l’UD FO de Paris et plus largement l’URIF FO. Frédéric Souillot et Gabriel Gaudy ont comme chaque année déposé une gerbe sur la tombe de Léon Jouhaux, dirigeant historique de FO et prix Nobel de la paix en 1951.L’occasion de souligner le fort attachement de FO dès son origine au slogan Pain, paix, liberté né sous le Front populaire.
Les retraités dans la ligne de mire
Chaque 1er mai nous avons coutume de dire que les circonstances sont particulières, a observé Gabriel Gaudy, secrétaire général de l’URIF FO et de l’UD 75. C’est encore plus vrai cette année. Car nous sommes attaqués au plus profond des revendications que nous portons, particulièrement celles liées aux apports du Conseil national de la Résistance sur l’école, les services publics, la protection sociale et que le patronat continue à vouloir rogner et même supprimer dans l’avenir. Et il faut ajouter les menaces pesant sur les retraités. Les 40 milliards d’euros d’économie, ce gouvernement voudrait les faire notamment sur le dos des retraités en supprimant l’abattement de 10 %.
Ce 1er Mai 2025, le cortège parisien, intersyndical, formé de près de 100 000 manifestants issus de quatre organisations, dont FO, s’est déployé de la place d’Italie à celle de la Nation. Nous sommes tous pour l’abrogation de la réforme des retraites de 2023 et contre la guerre économique. Pour l’emploi et pour la hausse des salaires résumait Frédéric Souillot avant que ne s’élance la manifestation.
La CES dans la manif parisienne
Par la présence dans le cortège parisien de sa secrétaire générale, Esther Lynch, la Confédération européenne des syndicats a ainsi montré tout son soutien aux salariés français. Nous sommes ici pour revendiquer des emplois de qualité en France et partout en Europe, car nous estimons que les entreprises, même celles qui font des milliards de profit n’ont pas suffisamment investi dans les salariés pour gérer la transition, qu’il s’agisse de la transition écologique ou digitale. Et le résultat c’est que beaucoup d’emplois sont aujourd’hui menacés. Les syndicats doivent être associés aux décisions bien avant que des crises comme celle des taxes douanières ne surgissent.
Rassemblés pour beaucoup sous le ballon rouge de l’URIF-FO, les militants FO de la région parisienne listaient, eux, leurs revendications au fil du cortège. Nous manifestons contre la marche à la guerre et contre un massacre budgétaire, soulignait Franck Guilbert, secrétaire général du Syndicat national libre des artistes (SNLA-FO). La Culture est en effet particulièrement impacté par les mesures d’économies de plus en plus drastiques décidées par le gouvernement. Après un recul des moyens déjà acté par la loi de Finances pour 2025, un récent décret annule quelque 110 millions d’euros de crédits pour le secteur dont 47 pour le spectacle vivant et les arts visuels, 41 pour le patrimoine, 10 pour le livre et autant pour les aides à la presse… 47 millions de moins pour le spectacle vivant, nous avons calculé que cela représente le budget des deux tiers des centres dramatiques nationaux, indiquait, indigné, Franck Guibert.
Opposition à la politique d’austérité
Aux premières loges pour le constat des effets désastreux des mesures d’austérité infligées au secteur public, mesures qui les impactent de plein fouet, les fonctionnaires et agents publics participaient au défilé parisien. Entre autres. Christian Grolier, secrétaire général de la Fédération générale des fonctionnaires (FGF-FO) et de l’union interfédérale FO-fonction publique a ainsi rappelé le mécontentement des agents. Ce 1er mai est la journée des travailleurs, donc aussi des fonctionnaires. C’est un moyen pour nous d’exprimer notre totale opposition à cette politique menée par l’exécutif, lequel estime que les fonctionnaires ne sont qu’un coût. Ce qui conduit à geler les salaires, geler les carrières, dégrader les conditions de travail et ne pas remplacer les agents partant en retraite. Or, tout cela constitue un grand paradoxe car lorsque l’on vit des crises -ainsi les attentats ou la Covid, on est bien content de trouver des fonctionnaires disponibles et investis pour les solutionner.
L’Education nationale et l’Enseignement supérieur et Recherche, soumis au même régime que la Culture avec des budgets amputés de 95 millions d’euros et de 500 millions pour l’enseignement supérieur sur le budget 2025 étaient présents en nombre dans le cortège parisien de FO. Les enseignants étaient eux particulièrement remontés contre la programmation de nouvelles fermetures de classes. 5 000 fermetures sont annoncées à la rentrée prochaine, a ainsi rappelé Clément Poullet, secrétaire général de la FNEC FP FO. Cela fait des semaines qu’on se mobilise avec les parents d’élèves, avec les enseignants, avec les personnels. L’école est à l’agonie, comme l’hôpital public. Et pour ce 1er Mai, les enseignants disent : de l’argent pour l’école publique, pas pour la guerre. L’inquiétude porte aussi sur l’accompagnement des élèves sur le plan du bien-être et de la santé mentale. On voit ce qui s’est passé à Nantes, cette jeune-fille poignardée par un camarade. Eh bien la réponse du gouvernement c’est de vouloir mettre plus de portiques et plus de fouilles dans les lycées, alors que nous n’avons plus que 600 médecins dans l’Education nationale pour 12 millions d’élèves. La médecine scolaire a été liquidée, comme la pédopsychiatrie. Il manquerait également en France quelque 15 000 postes d’infirmières scolaires, estime la fédération.
Les personnels de la Défense, en souffrance, aussi
Des militants FO du secteur de la Défense participaient eux aussi à la manif dans la capitale. Les personnels civils du ministère des armées sont très attachés aux valeurs Pain, Paix, Liberté soulignait Mohamed-Ali Anfif, secrétaire général adjoint de la Fédération FO de la Défense, des industries de l’armement et des secteurs assimilés. Et le militant de rappeler que les hausses de budget annoncées pour le réarmement (est visé à l’horizon 2030 un budget de 100 milliards d’euros par an pour la Défense contre 67 milliards initialement, Ndlr), ne sont pas destinées à améliorer les rémunérations des personnels du ministère. Pas plus que ne l’étaient les dépenses initiales prévues par la loi de programmation militaire 2024-2030. En effet, les 413 milliards d’euros annoncés par l’exécutif vont essentiellement à l’industrie et non pas dans la revalorisation salariale ou l’amélioration des conditions de travail. Nous avons encore des réductions d’effectifs, des suppressions de postes, des réorganisations et des externalisations massives. Il y a une surcharge de travail. Là où il y avait une dizaine de personnels, ils ne sont plus que deux ou trois, et avec une hausse exponentielle des missions. Conséquences… Beaucoup d’agents du ministère de la Défense se disent en situation de mal-être au travail.
Nombre de salariés du privé participaient aussi bien sûr aux actions de ce 1er Mai. Ainsi dans le cortège parisien Miguel Ribeiro, délégué syndical chez Eiffage, portant chasuble FO, et accompagné d’un camarade non syndiqué, mais qui songe à créer un syndicat sur son lieu de travail. Dans le secteur de la construction, on ne tient plus compte de la pénibilité, indiquait Miguel au cœur de la manif. On nous impose de plus en plus de cadences, ce qui nous expose au risque d’accident du travail et en retour on a l’impression que le salaire, malgré les augmentations, ne suffit plus. Notre patron a décidé que si l’on a trop d’accidents du travail dans un service, l’intéressement n’est pas versé ! Donc à la fois la direction nous oblige à aller vite, mais si on se casse la figure c’est pour notre pomme.
Plus loin dans la manif parisienne, agitant leurs drapeaux, des militants FO du secteur des assurances (FEC-FO) soulignaient l’importance d’être là, présents, vigilants et solidaires.. D’être là pour réaffirmer la revendication salariale… Mais pas que. Chez nous les conditions de travail se détériorent, indiquait ainsi Béatrice, salariée d’une société d’assurances et militante FO. On nous demande plus de productivité, plus de rentabilité, avec des méthodes de management qui mettent la pression, même si l’encadrement est plutôt sympa. Les chiffres et les objectifs passent avant tout, pointait-elle.
Sur tout le territoire, actions et revendications, y compris locales
Ce 1er Mai n’était bien sûr pas seulement parisien. Des actions, dans le cadre d’intersyndicales, ou pas, ont eu lieu sur tout le territoire, notamment de très nombreux rassemblements. A Bordeaux par exemple le cortège, en présence de FO, comptait 10 000 manifestants. Toute guerre est un attentat contre la classe ouvrière, elle est un moyen sanglant et terrible de faire diversion à ses revendications, soulignait la banderole bordelaise FO reprenant un manifeste confédéral contre la guerre du 29 juillet 2014. A Grenoble, le cortège a atteint quelque 5000 participants, 4000 à Rennes, 3000 personnes se sont déplacées à Narbonne, 2900 à Strasbourg, 2200 à Nancy et 1800 à Brest.
Des meetings revendicatifs ont aussi été organisés par FO, ainsi à Marseille et Toulouse. A Périgueux, les militants avaient choisi de se réunir symboliquement devant le bâtiment de la Sécurité sociale. Un hommage à la vénérable Sécu qui célèbre cette année ses 80 ans, qui est un élément central de notre modèle social, mais qui hélas est sous le feu des attaques, certains rêvant de lui infliger -et donc aux travailleurs et assurés sociaux- des mesures sévères au nom de la réduction des dépenses publiques.
Ce 1er Mai a été aussi l’occasion d’exprimer des revendications plus locales. Ainsi, l’UL-FO de Sablé-sur-Sarthe organisait un rassemblement devant l’Hôtel de ville. Une action visant à faire connaître le différend qui l’oppose, comme d’autres organisations, actuellement à la municipalité. Cette dernière exige en effet désormais le paiement d’un loyer pour l’occupation par les syndicats des locaux de la Maison du peuple. La Ville nous demande un loyer de 330 € par mois pour 30 m². C’est hors de question, explique Arnaud Martin, secrétaire de l’UL-FO.
Quant à certains militants FO de Sologne, ils ont dû faire appel à la justice pour obtenir le droit d’alerter, par un rassemblement le 1er Mai devant le site, sur les trop nombreux accidents du travail survenant dans la biscuiterie Saint-Michel de Controis-en-Sologne. L’édile de cette ville avait tenté d’interdire cette action syndicale estimant qu’elle induirait un trouble à l’ordre public. Le tribunal administratif d’Orléans en a décidé autrement. Le rassemblement a bien eu lieu. Une jolie victoire de la détermination des militants FO à faire valoir leurs droits en ce 1er Mai, mais aussi toute l’année.