Souffrance du petit commerce, ouvertures jugées illégales, incohérence sur les villes considérées en zone touristique, volontariat des salariés. Autant de points évoqués dans le rapport Bailly, rendu lundi au gouvernement, sur le travail dominical et qui trouvent un écho particulièrement fort dans le département. Voici ce qui pourrait changer localement en 2014.
De 5 à 12 dimanches C’est la mesure phare du rapport Bailly. Il s’agit de passer de cinq à douze ouvertures dominicales grâce « à une modification rapide du code du travail ». Une réponse à la multiplication des événements qui rythment la vie économique : soldes, fêtes de fin d’année, vacances, Visa pour l’Image, semaine sainte. Ainsi, les maires auraient toujours la possibilité d’assurer ces dérogations, mais ils en bénéficieraient de sept au lieu de cinq actuellement. Les commerçants auraient ensuite le choix d’ouvrir cinq dimanches par an, « ce qui leur permettrait de répondre aux spécificités saisonnières ou événementielles de leurs activités ». Une approche que condamne le syndicat Force Ouvrière. Pour son responsable local, Jérôme Capdevielle, « cette mesure ne vise qu’à assouvir l’appétit de la grande distribution. Avec douze dimanches par an, on perd le caractère exceptionnel de ces ouvertures. On voit mal comment c’est compatible avec “la spécificité du dimanche” que souhaite “préserver” le rapport Bailly. On est dans un consensus mou qui ne conviendra à personne ».
Volontariat ou pas ! Payer double ou pas ! Selon les recommandations du rapport Bailly, « le volontariat doit être la clé de voûte et des accords collectifs devront prévoir les conditions de rémunération et l’octroi de repos compensateur ».Des mesures qui ne s’appliqueront pas aux PME « afin de protéger les petits commerçants ». Sur ces deux points, là aussi, les syndicats affichent leur mécontentement : « Le volontariat est une fausse solution. Qui peut se résoudre à faire une croix sur 300 à 400 € à la fin du mois dans le contexte actuel. Maintenant, si les salariés étaient correctement payés, seraient-ils aussi nombreux à devoir travailler le dimanche ? Concernant l’exclusion du commerce de proximité de ces dispositions légales, c’est inadmissible. Oui pour soutenir le commerce de centre-ville qui périclite, notamment à Perpignan, mais pas au détriment des salariés qui ne pourront pas bénéficier du paiement double ou du jour de compensation. Pour nous, c’est inconcevable que l’on forme sur ce dossier plusieurs catégories de salariés ».
Remise à plat des zones Les Pyrénées-Orientales se singularisent dans ce domaine avec vingt-neuf communes classées comme touristiques et donc pouvant ouvrir le dimanche du 15 juin au 15 septembre. Mais présentent-elles toutes une approche touristique ? Ainsi, la ville de Perpignan n’entre pas dans ce dispositif alors que des communes à l’attrait touristique plus incertain comme Rivesaltes ou Pollestres le sont. Pour intégrer ce dispositif, il suffit que le maire en fasse la demande en préfecture, ce que refuse pour le moment le maire de Perpignan. Une situation qui devrait évoluer puisqu’une « remise à plat des dispositifs » est souhaitable selon le rapport qui souhaite notamment introduire dans les décisions des préfets « des études d’impact ». Une prise de décision que le syndicat patronal, UPE 66, souhaite mettre entre les mains des chefs d’entreprise pour la période du 15 juin au 15 septembre dans tout le département. « On reste attaché au principe du repos dominical, mais il faut prendre en compte l’aspect touristique et frontalier. La meilleure solution serait que sur le département, les chefs d’entreprise aient la liberté d’ouvrir ou non le dimanche du 15 juin au 15 septembre. Cela ne signifierait pas forcément une généralisation car, par exemple à Perpignan, vous avez une enseigne Auchan qui souhaite ouvrir le dimanche matin alors qu’une autre, Leclerc, y est clairement opposée ».
Ouvertures illégales ? Dans le département, il y aurait selon Jérôme Capdevielle, « une vingtaine de grandes et moyennes surfaces » qui ne respecterait pas les obligations légales de jour de fermeture hebdomadaire. « On voit ça à Perpignan et dans des communes dites touristiques qui ouvrent le dimanche en dehors de la période estivale. Malgré un arrêté préfectoral de 1965 que certaines enseignes ont attaqué en justice, la loi n’est pas respectée. Je doute qu’une future réforme permette une régularisation des différentes situations ». Si les syndicats ont attaqué en justice l’enseigne Auchan et ont obtenu gain de cause en 2012, ils se refusent d’opérer de la sorte pour les magasins ouvrant en toute inégalité. « Le coût juridique serait trop important. Ce n’est pas aux syndicats de se substituer à l’Etat et à la Direccte pour faire respecter la loi ».
L’Indépendant – Edition du 4 décembre 2013 – Julien Marion