Syndicats et patronat réaffirment la nécessité de sauver le paritarisme

Invité à une conférence de presse aux côtés de sept autres leaders, syndicaux et patronaux, Frédéric Souillot, secrétaire général de FO, a appelé à défendre le paritarisme contre les attaques du gouvernement.

L’image et les propos sont rares. Les numéros un de huit organisations, syndicales et patronales, réunis et d’accord. Invités le 20 mars par l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis) à débattre du paritarisme, les interlocuteurs sociaux ont souligné leur détermination à défendre la gestion paritaire des organismes sociaux face à un État qui a décidé de prendre la main.

Nous devons sauver le paritarisme, a ainsi déclaré solennellement Frédéric Souillot, secrétaire général de FO. Agirc-Arrco, Unedic, Action logement : le gouvernement est à l’offensive pour prendre le contrôle de ces organismes par lesquels transitent des milliards d’euros, gérés par les syndicats et le patronat parce qu’issus des salaires. 235 milliards d’euros par an, précisait le président d’une organisation patronale. A chaque fois que l’État a besoin d’argent, il se tourne du côté de ces organismes, qui en ont parce qu’ils sont bien gérés, pointait Frédéric Souillot.

Ponctions à répétition

Depuis la loi de 2018 sur la formation professionnelle, les attaques sur le paritarisme semblent s’accélérer, a relevé l’Ajis dans son propos introductif. De fait, l’exécutif multiplie les ponctions ou les tentatives de ponction pour financer ses politiques publiques. Il a ainsi décidé de prendre 12 milliards d’euros à l’Assurance chômage pour financer France travail. A la fin de l’année dernière, il a tenté de ponctionner un à trois milliards d’euros par an au régime de retraites complémentaires Agirc-Arrco pour financer la revalorisation des petites pensions liée à sa réforme des retraites. Et, par ailleurs, il a prélevé 300 millions d’euros en 2023 et 500 millions en 2020 dans les caisses d’Action logement. Le 6 mars, le gouvernement a mis bas les masques. Son ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a déclaré que l’État devrait reprendre la main sur l’Assurance chômage de manière définitive.

Il faut tenir

Mais nous ne nous laisserons par faire, assure le secrétaire général de FO. L’arme des interlocuteurs sociaux, c’est leur unité affichée sur le sujet du paritarisme. Les syndicats -dont FO- et le patronat ont ainsi signé, en octobre dernier, un accord qui a bloqué, du moins momentanément, la tentative de ponction du gouvernement dans les caisses de l’Agirc-Arrco, tout en revalorisant les retraites complémentaires. Il faut tenir, exhorte Frédéric Souillot. Un avis partagés par les autres participants à la conférence.

Car les organismes paritaires sont un gage de modernité et d’équilibre des pouvoirs, déclarait l’un des représentants des organisations patronales. Les interlocuteurs sociaux ont leur légitimité, poursuivait la secrétaire générale d’un syndicat. La Sécurité sociale est ce qui fonde la France, a indiqué une autre représentante syndicale, faisant référence à l’ambition initiale de la « Sécu », créée après la guerre pour que le pays ne se divise pas de nouveau. L’agression des pouvoirs publics n’est pas nouvelle, mais aujourd’hui il y a la dette [publique] et des entreprises qui ferment, a néanmoins tempéré le président d’une organisation patronale. Il faut montrer que nous sommes de bons gestionnaires et créer un rapport de force, déclarait de son côté le secrétaire général d’une organisation syndicale.

Reprise en main des groupes de protection sociale

La défense du paritarisme, cette fois contre les fonds de pension, se joue également dans les groupes de protection sociale (GPS). Gérés paritairement, les Klesia, AG2R La Mondiale, Malakoff Humanis et autres Apicil sont à la fois chargés de la gestion – non-lucrative – des régimes Agirc-Arrco et de distribuer des produits d’assurance en santé, prévoyance, et retraite supplémentaire. Nos GPS fonctionnent, même s’il peut y avoir quelques frictions, indiquait Frédéric Souillot, référence à la crise de gouvernance chez AG2R La Mondiale, que le directeur général veut orienter vers l’assurance contre l’avis des interlocuteurs sociaux. Les dirigeants de quatre organisations syndicales – dont Frédéric Souillot – l’ont rappelé à l’ordre dans un courrier envoyé au mois d’août. Mais le DG refuse de changer son projet, expliquait une signataire du courrier. Le dossier est tout aussi important pour le patronat, dont un des poids lourds vient d’être nommé à la vice-présidence d’AG2R La Mondiale : Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution et vice-président du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Difficile, dès lors, de ne pas relier cet épisode à la négociation nationale que les interlocuteurs sociaux viennent d’ouvrir, précisément pour reprendre en quelque sorte en main les groupes de protection sociale. Le sujet était inscrit à l’agenda social autonome défini en 2021 par les interlocuteurs sociaux. Une négociation discrète, a souligné une responsable syndicale. Qui ne se passe pas mal car nous avons des intérêts communs, a indiqué un autre.

 

Négociation Seniors : Frédéric Souillot déplore qu’elle n’ait pas été ouverte avant la réforme des retraites

Invités le 20 mars par l’Association des journalistes de l’information sociale, les leaders des organisations syndicales et patronales ont aussi été interrogés par les adhérents de l’AJIS sur la négociation en cours sur l’emploi des seniors, également appelée « pacte de la vie au travail ». Le dossier emploi des séniors était inscrit à l’agenda social autonome des interlocuteurs sociaux, rappelle Frédéric Souillot, secrétaire général de FO. Or, si nous avions commencé par négocier sur ce sujet, la question de décaler l’âge de départ à la retraite n’aurait pas eu lieu d’être posée, soulignait-il. La veille de cette conférence de presse, les organisations syndicales, dont FO, avaient affiché leur unité en rendant publiques « 10 propositions communes » sur les seniors.

T. B.
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