Pour FO, concernant le rapport « Pour rendre des heures aux Français », qui n’est qu’une reprise des quatre-vingts mesures proposées par la CPME, derrière un discours de bon sens apparent sur la simplification des règles et des normes, tous les projets de simplification, depuis ces dix dernières années, ont tous un point commun : simplifier la vie des entreprises. Or simplifier la vie des entreprises va de pair avec la réduction des droits des salariés, la réduction du nombre et des moyens de leurs représentants. La simplification conduit à limiter, voire à empêcher le dialogue social. Dès leur publication, FO a dénoncé une forme d’antisyndicalisme primaire derrière ces propositions.
Un certain nombre d’exemples illustrent mes propos.
Les mesures de simplification ambitionnent, entre autres, de relever les seuils (d’effectifs de salariés) qui déclenchent un certain nombre d’obligations en matière de dialogue social et de représentation des salariés. La CPME propose de passer ce seuil de déclenchement des obligations légales de 50 salariés à 100 salariés.
Ce rapport propose également de réduire le délai de saisine des prudhommes. Le délai pour saisir le conseil de prud’hommes passerait de douze à six mois. Pour FO, cette mesure a pour principal objectif de sécuriser les employeurs en s’en prenant aux droits des salariés. Depuis les ordonnances travail de 2017, le recours aux prud’hommes est plus compliqué et le nombre de saisines est en baisse constante. Entre 2017 et 2022, le nombre de nouvelles affaires déposées devant la juridiction prud’homale a diminué de plus de 26 %. Eu égard au choc émotionnel que peut provoquer un licenciement, il est nécessaire de laisser au salarié un temps raisonnable de réflexion. D’autant plus que le délai de prescription, en matière de licenciement, a déjà été considérablement réduit ces dernières années. Il est passé de trente ans jusqu’en 2008 à deux ans en 2013, puis à un an en 2017.
Le rapport propose également de faciliter le recours au temps partiel. Pour FO, le CDI à temps plein doit être le contrat de travail de référence dans le privé, de même que le statut dans la fonction publique. Le temps partiel doit être réellement choisi et facilement réversible, dans le privé comme dans le public. Trop souvent imposé, il est facteur de précarité, de sous-emploi et de flexibilité. Les multiples dérogations possibles à la du-rée minimale de vingt-quatre heures par semaine pour les contrats à temps partiel rendent cette mesure inefficace, imposant au gouvernement de revoir au plus vite ces dérogations.
Il faut toujours se méfier du titrage des rapports et autres commissions. Ceux-ci font ronfler à nos oreilles des pro-messes trompeuses. Ce rapport propose des changements qui, loin de simplifier la vie des entreprises, pour-raient aggraver les problèmes de santé et de sécurité au travail en restreignant encore le dialogue social en France après les funestes ordonnances Macron de septembre 2017, qui ont débouché sur un profond recul de la prévention et sans aucun doute contribué à la remontée des accidents du travail, y compris mortels.
Est-il nécessaire de rappeler les chiffres de l’Insee ? En 1980, la France comptait 1 423 accidents mortels. En septembre 2017, les ordonnances sur le travail, qui évoquaient déjà la nécessité d’une simplification du dialogue social, suppriment les CHSCT, les DP et les CE au profit des CSE. Cette fusion des instances, en vérité, se réalisera essentiellement au détriment des représentants du personnel ancrés sur le terrain. Les CSE se mettront en place dans la continuité des CE et les membres actifs en prévention, particulièrement les CHSCT, seront éradiqués. Depuis lors, on ne peut que constater la hausse des accidents mortels. Ont ainsi été recensés 733 accidents mortels en 2019 et 693 en 2021. Ces accidents se produisent surtout dans les TPE et les PME, là où l’action préventive est donc la plus urgente, ce qui impose de raviver le dialogue social qui sert la prévention et la productivité, alors qu’avec la suppression de l’exigence de créer une BDESE et surtout le re-haussement des seuils d’effectif pour constituer un CSE renforcé – ce seuil passerait de 50 à 250 –, ce rapport s’attaque directement à la transparence et à l’accès à l’information essentielle pour la prévention de la santé et la sécurité des salariés.