La démonstration de force est réussie. Ce samedi, à Perpignan, les manifestants ont prouvé qu’ils ne faiblissent pas dans leur bras de fer contre le gouvernement. Si la préfecture annonce 9 000 protestataires, les syndicats misent plutôt sur 15 000 pour certains et jusqu’à 20 000 pour la CGT.
Le cortège était très fourni. Il fallait patienter plus de vingt minutes pour voir passer l’intégralité du défilé. Les représentants syndicalistes gonflent le torse. « Rassembler entre 15 000 et 20 000 personnes alors que la précédente manifestation est très récente (mardi 7 février, NDLR), c’est une réussite, assure Jérôme Capdevielle pour FO. Nous devons continuer d’occuper le terrain et amener cette mobilisation à s’ancrer dans le temps ».
Pour Jean-François Virama, de l’Unsa, cette nouvelle mobilisation, un samedi, a permis à de nombreux nouveaux manifestants de rejoindre les rangs. « Nous avons réuni les salariés qui ne peuvent pas faire grève, les lycéens qui préparent le bac et les étudiants », appuie-t-il. Damien, 19 ans, est justement l’un d’entre eux. Drapeau tricolore en mains, il se mobilisait pour la première fois contre la réforme des retraites. Étudiant à Montpellier, il a profité de rentrer à Perpignan, chez sa famille, pour aller battre le pavé : « J’essaie d’amener un peu de jeunesse dans les rangs. Mais, surtout, je viens manifester pour ma mère. Elle est auxiliaire de vie, elle ne peut pas se permettre de perdre un jour de travail. Pourtant, elle a la cinquantaine et elle sera totalement impactée par la réforme ». À 19 ans, difficile de se sentir directement concerné par une réforme des retraites : « Ma retraite ce sera dans des années et des années. Non moi, ce qui me gonfle, c’est que c’est toujours au peuple de travailler. C’est toujours à nous de ramener les sous. On a supprimé l’impôt sur la fortune (ISF) aux riches par contre, nous, on nous demande de bosser deux ans de plus. L’argent on sait où le trouver, mais on ne veut pas y toucher ».
Dans les rangs, tous les profils ou presque se laissaient apercevoir. Avec pour mot d’ordre : l’union générale. « Nous ne voulons pas d’une réforme qui pénalise les plus faibles et les plus fragiles, martèle Romain Martignoles, vice-président de la CFTC. Elle pénalise ceux qui ont commencé à travailler tôt, ceux qui exercent un métier pénible, les pères et mères de famille et l’ensemble des travailleurs, c’est sur eux seuls que reposent les efforts pour équilibrer notre système de répartition dans le projet de réforme de Monsieur Macron ». Ce n’est pas Elisabeth, 51 ans, qui contredira ce syndicaliste. Travailleuse dans la petite enfance, en centre-ville, elle s’est rendue au pied du Castillet en famille. Avec sa mère Christiane et son père Louis, 74 ans, en fauteuil roulant. « Il est mal foutu mais il a tenu à venir quand même », lâche Christiane. « C’est le soutien des générations », lui répond Louis, qui approfondit : « Je suis très inquiet pour mes petits-enfants et futurs arrière-petits-enfants. C’est pour ça que nous venons, pour faire nombre ».
L’indépendant – édition du 12 février 2023 – Diane Sabouraud