À Roubaix, une exposition inédite est dédiée au travail en temps de guerre. Implication des femmes, recrutement de main-d’œuvre coloniale, modification des règles du droit du travail ou apparition de nouveaux métiers, cette manifestation réserve aussi quelques surprises.
Saviez-vous que l’entreprise qui confectionnait les bouillons en cube Maggi était accusée d’être un agent de l’étranger à la veille de la Première Guerre mondiale ? Que 30 % à 40 % de la production industrielle française durant la Seconde Guerre mondiale était destinée à l’Allemagne ? Et que des décorateurs et artistes avaient été embauchés par le ministère de la Guerre pour créer des dispositifs de camouflage des soldats positionnés, entre 1914 et 1918, sur les lignes de front ?
Ce ne sont que quelques-uns des aspects du travail en temps de guerre que les Archives nationales du monde du travail, installées à Roubaix depuis 1993, exposent actuellement dans leurs murs. Affiches de propagande, photos et objets d’époque, articles de presse, films, registres, le tout scénarisé avec la collaboration d’étudiants du master Expographie-muséographie de l’université d’Artois, viennent révéler combien le cadre du travail est bouleversé en période de conflit.
Réinsertion des mutilés de guerre par le travail des champs
Les documents rassemblés représentent plus de dix-huit mois de recherche de la part de l’équipe des Archives nationales du monde du travail pour identifier, dans de multiples sites français, les ressources qui leur permettent d’évoquer également l’appel à la main-d’œuvre coloniale (et notamment indochinoise) pour remplacer les ouvriers partis au front, la sollicitation des femmes pour travailler dans les usines d’armement ou encore les centres conçus pour la réinsertion des mutilés de guerre par le travail agricole.
Autre point fort de l’événement, un mur des travailleurs et travailleuses en temps de guerre. Ce dispositif permet de collecter des témoignages (et d’y joindre des photos), sur papier ou en ligne. Chaque visiteur peut ainsi livrer l’histoire d’un proche victime du Service du travail obligatoire lors de la Seconde Guerre mondiale. Le STO est un pan méconnu et encore mal vécu de la guerre en Europe, qui résonne avec l’histoire individuelle de nombreux Français, observe Marine Huguet, l’une des commissaires de l’exposition. D’où l’importance de le documenter.
Le tout se visite seul ou avec un guide. L’expo est aussi accompagnée d’un programme de conférences, d’une bande dessinée offerte à tous les visiteurs et d’un (passionnant) catalogue disponible en ligne. À découvrir, absolument.
https://archives-nationales-travail.culture.gouv.fr/Decouvrir/Expositions/In-situ/Travailler-en-temps-de-guerre-14-18-39-45