Un an et demi après le rachat à Vallourec des usines d’Aulnoye-Aymeries et de Berlaimont, le groupe américain NOV Grant Prideco a annoncé leur fermeture… trois jours après que l’information a fuité dans la presse.
C’est par une fuite… dans la presse, lundi 20 janvier, que les 129 salariés des usines d’Aulnoye-Aymeries et de Berlaimont, dans l’agglomération de Maubeuge (Nord), ont appris la décision du groupe américain NOV Grant Prideco de fermer leurs établissements ! L’équipementier, leader mondial dans la production de matériels et services dédiés au forage, a officialisé…. trois jours plus tard sa décision. Depuis le 24 janvier, les salariés empêchent la sortie de produits finis réalisés dans l’usine Tuboscope de Berlaimont, partagés entre colère et incompréhension face à la brutalité de l’annonce.
NOV Grant Prideco justifie son choix par la nécessité de sauvegarder sa compétitivité
dans un environnement de marché de plus en plus tendu
, incertain
et surcapacitaire. Selon lui, la demande de tiges de forage, qui est le cœur de métier des deux sites, n’a cessé de stagner voire de diminuer ». Il annonce vouloir « réaffecter les volumes de production (…) sur d’autres sites du groupe, principalement aux États-Unis et en Chine
. En clair, il veut délocaliser pour réaliser les économies de coûts de production.
Doutes sur les réelles motivations économiques
La mobilisation, et celle des syndicats, a permis de différer l’ouverture de la procédure légale d’information-consultation du Comité social et économique (CSE), initialement prévue le 7 février. Elle serait reportée à la fin du mois de février.
Il n’est aucunement l’heure de parler de PSE (plan de sauvegarde de l’emploi) ! Avant de l’envisager, il faut se donner le temps et les moyens d’étudier toutes les possibilités de reprise des deux sites
, martèle Alexandre Leleux, secrétaire général de l’union locale FO Sambre-Avesnois. Il dénonce une décision inacceptable qui laisse dans un désarroi total des centaines de familles
. Et interroge les réelles motivations économiques
de NOV Grant Prideco.
Cela fait à peine un an et demi que le groupe américain a racheté au groupe Vallourec l’établissement d’Aulnoye-Aymeries et Tuboscope pour 62 millions de dollars (près de 57 millions d’euros). Jusqu’à fin décembre, la production tournait à plein. Un accord a même été signé pour permettre des heures supplémentaires. Subitement, ce serait un mauvais choix ?
, interroge le secrétaire général de l’UL FO.
Les membres du comité socio-économique avaient eu la surprise de recevoir, pendant les vacances, une convocation de la direction pour le 7 janvier afin qu’elle leur présente les orientations stratégiques sur trois ans. Parmi les éventualités, ont été évoquées une cession, une vente ou une réduction de personnel. Jamais une fermeture pure et simple.
La responsabilité de Vallourec
Cette décision abrupte interroge les réelles motivations du rachat par le groupe américain mais aussi la responsabilité de Vallourec, qui a fait le choix de vendre. A l’époque, ces deux usines ont été bradées. La vente a-t-elle été motivée pour éviter à Vallourec de porter le chapeau de la fermeture ? En tous cas, NOV a eu le temps de s’approprier brevets et compétences
, poursuit Alexandre Leleux.
Toutes ces questions tenaillent le bassin de Sambre-Avesnois. Elles ont été posées à la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Economie Agnès Pannier-Runacher, qui a reçu le 29 janvier, les représentants du personnel des deux usines ainsi qu’une délégation d’élus locaux. Elle a rappelé que la transparence devait être de mise dans la cession des deux établissements par Vallourec. Elle a demandé aux représentants de la direction de NOV de s’engager à proposer un accompagnement social de qualité
aux salariés, sans faire l’économie de la recherche d’un repreneur. Le groupe américain, dans un nouveau communiqué, s’est engagé à rechercher activement un repreneur (…) et à proposer des mesures de revitalisation du bassin d’emploi
.
Mais sa décision reste un coup très dur pour la région de Sambre-Avesnois, qui a connu depuis 2015 la fermeture de Sambre et Meuse (261 salariés), la fonderie centenaire du Nord spécialisée à Feignies dans la fabrication de matériel, ainsi que d’Akers France (90 salariés) à Berlaimont. L’entreprise était spécialisée dans la production de cylindres de laminoir. Dans ce contexte, le rachat en 2018 par NOV Grand Prideco des établissements d’Aulnoye-Aymeries et de Berlaimont avait pris des allures de très bonne nouvelle, même si certains – dont l’UL FO de Sambre-Avesnois – appelaient à la prudence face à ce repreneur providentiel.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly