[Musique] L’inventeur du Rock’n roll est mort


Little Richard n’est pas l’un des pionniers du rock, il en est l’inventeur. Sans lui, quid d’Elvis Presley, d’Eddie Cochran, de James Brown, d’Otis Redding, voire de Prince qui lui a piqué son look.

Ce zébulon noir, ce génie flamboyant s’est éteint le 9 mai dernier à Los Angeles à 87 ans. Il fallait être sérieusement fêlé ou diabolique génial, en l’occurrence les deux, pour qu’un jour de pluie dans un petit studio d’enregistrement de New York à l’automne 1955, la lumière jaillisse, des éclairs qui allaient révolutionner la musique moderne.

Ce jour-là, le petit Richard enregistre à nouveau des blues, assez lents, qui n’arrivent ni à convaincre son producteur, ni lui-même. On commence à replier les gaules. Mais, à seulement 22 ans, il s’assoit à son piano et sans avoir rien préparé, il improvise une rythmique rapide et se met à hurler n’importe quoi. Un véritable possédé. Il commence deux onomatopées à rallonge qui feront bientôt le tour du monde : « A wopbop aloola, alopbamboom… ». Une déferlante, un tsunami, un souffle nucléaire. « Tutti frutti » est né et plus rien ne sera comme avant. Jazz, blues, soul, peuvent se rhabiller, le bébé rock vient de pousser son premier cri. Il fallait aussi être bien givré, comme les crèmes glacées italiennes aux morceaux de fruits pour appeler ces deux minutes vingt-cinq secondes de furie « Tutti frutti ».

Entre Dieu et Diable, avec une préférence pour ce dernier

Richard Wayne Penniman, noir américain, est né en 1923 à Macon, non pas dans cet écrin des vins de Bourgogne, mais en Géorgie, état sudiste des États-Unis où les adeptes du port de la cagoule blanche s’adonnent régulièrement à la pendaison des « bloody niggers ». Son grand-père et ses deux oncles sont des pasteurs baptistes. Lui est le troisième d’une fratrie de douze. Il chante du gospel à l’église, mais à treize ans, il est chassé de chez lui pour tendances homosexuelles, expliquera-t-il plus tard, sans jamais renier sa bisexualité. Il accompagne alors un bonimenteur qui fourgue aux gogos des potions à base d’huile de serpent. Il chante à ses côtés sous le nom de « Little Richard ». Ayant croisé la route du bluesman Billy Wright, il fait ses premiers enregistrements à la Nouvelle Orléans à 18 ans et monte son propre groupe, The Upsetters.

« Tutti frutti » sort en février 1956 et enflamme les ventes. Les tubes s’enchaînent : « Lucille », « Good golly miss Molly » … À 24 ans, Little Richard est une bête de scène hyper-sexuée qui chante debout en martelant son piano. Il crève l’écran au cinéma dans « La blonde et moi » avec Jane Mansfield. Mais en 1957, lors d’une tournée avec Gene Vincent et Eddie Cochran, dans son sommeil, il se voit brûler en enfer. L’histoire ne dit pas ce dont les trois hommes ont abusé. Bref, pendant cinq ans, il abandonne « la musique du diable » et se fait prêcheur baptiste.

Mais le diable le tient par la baffeta (1). Et en 1962-63, grâce aux Beatles et aux Stones, il revient au Rock. En 1964, ayant besoin d’un guitariste, il embauche un jeune homme prometteur, un certain Jimmy Hendrix ! Sa deuxième heure de gloire dure jusqu’à la fin des années 70. Un tantinet usé par l’alcool et la coke, il revient vers les anges du gospel qu’il quittera à nouveau, mais cette fois pour revenir au cinéma : « Le clochard de Beverly Hills » en 1986, « King Ralph » en 1996…

Ses chansons ont été reprises par Elvis, Jerry Lee Lewis, Buddy Holly, Eddie Cochran, Gene Vincent, Queen et même Johnny Halliday !

(1) Fine moustache à l’italienne des séducteurs des années 1930.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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