Meeting FO du 26 octobre : notre indépendance, ce sont nos revendications !

C’est un meeting de la classe ouvrière, un meeting de militants, lance à la tribune Frédéric Souillot, accueillant ce 26 octobre, à la Maison de la Mutualité à Paris, près de 2 000 militants FO venus de la région parisienne et de province (en bus, train ou voiture). C’est un premier meeting de préparation à la mobilisation, et une volonté de rappeler l’indépendance de FO, avait-il déclaré quelques minutes plus tôt lors d’une conférence de presse.

Aux places d’orchestre ou à celles du balcon, l’installation dans le théâtre se fera en chansons et avec des slogans bien connus, particulièrement depuis les quatorze journées de manifestations qui, en 2023 et pendant quatre mois, ont ponctué le combat syndical contre la réforme des retraites. Le secrétaire général de la confédération le rappellera, comme il l’a fait depuis l’adoption ― par un 49.3 ― de cette réforme il y a plus d’un an, FO ne tourne pas la page des retraites. Et pour cause : le recul de l’âge de départ, de 62 à 64 ans, et l’accélération du calendrier d’allongement de la durée de cotisation ne passent pas chez les travailleurs. FO garde toujours en haut de la liste de ses revendications l’abrogation de la réforme. Relayant les slogans scandés dans la salle, Frédéric Souillot lancera lui-même la retraite, elle est à nous, cela en ajoutant l’abrogation, elle est à portée de main, référence au retour sur la scène parlementaire de la réforme à travers la demande de son abrogation par des groupes politiques. La demande a connu un premier pas ― symbolique ― lors d’un vote en commission des affaires sociales le 24 octobre. Par ailleurs, le 31 octobre et a priori le 28 novembre, cette demande sera encore d’actualité lors des journées respectives, dites niches parlementaires, de deux groupes qui présenteront chacun leur proposition de loi.

Toute mobilisation doit se préparer

Ce 26 octobre, via des interventions de militants de sept entreprises, dont l’une, La Poste, qui assure une mission publique postale, et Air France où l’État est également actionnaire, le meeting FO a choisi de braquer aussi les projecteurs sur l’action syndicale de terrain. Ce qui comprend les batailles pour les hausses de salaires, les combats contre les suppressions d’emplois, les luttes pour le maintien des sites sur le territoire… Le travail militant va de pair aussi avec le développement syndical, en vue de peser toujours plus, notamment dans les négociations, mais aussi plus largement pour étendre l’audience nationale de FO. Frédéric Souillot rappelait ainsi l’importance d’élections à venir (TPE et Chambres d’agriculture) dans le décompte général de représentativité, qui tient compte aussi bien sûr de l’audience de FO dans la fonction publique (FO est la deuxième organisation sur les trois versants) et de celle obtenue dans le privé, via les élections aux CSE. L’audience de FO est primordiale pour peser, et ce, entre autres dans le cadre de la demande d’abrogation de la réforme des retraites. Et sur ce dossier, indiquait le secrétaire général, on va continuer, on va faire des AG, préparer les équipes, les forces. Toute mobilisation doit se préparer, comme FO l’avait fait en 2019, car le bouton de la grève générale n’existe pas !, martelait-il.

Présenter la facture du quoi qu’il en coûte aux travailleurs, on n’acceptera pas !

Ce 26 octobre, le meeting FO se tenait donc dans un contexte singulier et chargé. En effet, l’activité parlementaire bat son plein, l’examen des projets de lois de finances pour 2025 a débuté et se profile une austérité renforcée sur les dépenses publiques. Or, si la crise du Covid, en particulier, a souligné l’importance entre autres de la protection sociale et des services publics, dès la crise passée, l’exécutif estime que tout cela est un coût et on nous présente des budgets d’austérité !. Or présenter la facture du quoi qu’il en coûte aux travailleurs, on n’acceptera pas, appuyait le secrétaire général.

Négocier, c’est l’ADN de FO

En parallèle, la période est toutefois aussi à un retour du dialogue social, de la négociation collective, laquelle est l’ADN de FO, soulignait Frédéric Souillot. Viennent ainsi de se rouvrir la négociation sur l’Assurance chômage (le précédent gouvernement avait refusé en novembre 2023 d’agréer l’accord trouvé entre les interlocuteurs sociaux) et celle sur l’emploi des seniors (négociation qui n’avait pas pu aboutir à un accord l’an dernier). FO vise par ailleurs l’obtention d’une retraite progressive dès 60 ans, avec 150 trimestres de cotisation, soit 37,5 années. Ces modalités sont celles qui déterminaient l’âge légal de départ avant la réforme Balladur de 1993, décidée en plein été.

Tous ces dossiers sont en lien direct avec celui des retraites, et plus largement renvoient au financement de la protection sociale, ainsi que n’a cessé de le répéter FO depuis 2022 alors que l’exécutif, au nom de la réduction des dépenses, s’entêtait à imposer sa réforme. Or, davantage de seniors (55-64 ans) en emploi (dix points de plus) se traduirait par 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires dans les comptes publics (en 2030), a rappelé Frédéric Souillot, évoquant le rapport de l’économiste Jean-Hervé Lorenzi.

Et à cela il faut encore ajouter la nécessité de développer l’emploi, pérenne et de qualité. La nécessité aussi de mettre en œuvre une conditionnalité des aides publiques aux entreprises (elles représentent actuellement 160 milliards d’euros par an de manque à gagner pour les comptes publics). Le cas de Sanofi illustre cette nécessité, relevait le secrétaire général de FO. Toutefois, les choses avancent sur le dossier des aides, notait-il avec satisfaction, il y a une petite modification du raisonnement puisque désormais on parle de recettes et on évoque le déficit public en termes d’un manque de recettes, fiscales et sociales.

Valérie Forgeront
Photos : Sophie Liédot

L’abrogation de la réforme des retraites au cœur du meeting

À grand renfort de slogans et d’affiches, l’abrogation de la réforme des retraites de 2023 était au cœur du meeting FO du 26 octobre, à la Maison de la Mutualité à Paris. Après une mobilisation historique l’an passé, FO n’a jamais tourné la page. Ce meeting est une première étape de mobilisation pour obtenir le retrait [l’abrogation, NDLR] de cette réforme, a ainsi souligné le secrétaire général de la confédération devant une salle comble. Cette réforme, rappelait Frédéric Souillot, les travailleurs n’en veulent toujours pas. Rien d’étonnant indiquait-il en revenant sur le caractère violent et injuste de celle-ci, qui plus est mise en application alors que la moitié de ceux qui liquident leur retraite (170 000 personnes par an) sont au chômage, en maladie professionnelle, et 6 % au RSA. Alors, pour gagner la bataille contre cette réforme qui crée de la précarité, il faut réfléchir à la façon de se mobiliser le plus largement possible. Au travers de l’organisation de comités départementaux et d’assemblées générales, préparons-nous pour la mobilisation !, a-t-il lancé aux militants.

La retraite progressive à 60 ans sur la table

La confédération remonte régulièrement au front contre cette réforme injustifiée. Lors d’un colloque sur le financement des retraites à l’Assemblée le 21 octobre, FO a pointé un faux problème : Il n’y avait pas besoin d’un colloque à ce sujet. Nous l’avons dit au patronat. Si les gens entre 55 et 62 ans étaient en emploi, en retraite progressive ou en préretraite, cela ferait rentrer 20 milliards d’euros dans les caisses en 2030. En réalité, il n’y pas de problème de financement des retraites !, a asséné Frédéric Souillot à la tribune. C’est une des raisons pour lesquelles FO s’est engagée dans les négociations sur l’emploi des seniors, a-t-il expliqué, précisant que FO veut aussi la retraite progressive à partir de 60 ans, avec 150 trimestres. Et ça, c’est bien sur la table, même si évidemment ça va être de la négociation !.

Ariane Dupré

Dans les entreprises aussi, quelle que soit la situation, à FO, on ne baisse pas la tête

Si l’abrogation de la réforme des retraites, la défense de la protection sociale collective et des services publics, le refus de l’austérité budgétaire ont été au cœur du meeting du 26 octobre, la combativité de FO à défendre l’emploi et les intérêts des travailleurs en entreprise l’a été aussi. Sur la scène de la Maison de la Mutualité, les délégués syndicaux FO d’Eurotunnel, Casino, Duralex, Air France, Sanofi, Tefal et de La Poste ont témoigné des actions pour construire le rapport de force. Quelle que soit la situation, à FO, on ne baisse pas la tête, a appuyé le secrétaire général Frédéric Souillot.

Un message d’espoir et de combat

Comme chez Eurotunnel. Stéphane Sauvage et Franck Herent, respectivement secrétaire général et secrétaire général adjoint du syndicat, ont détaillé comment celui-ci est passé de la pratique contractuelle à la grève surprise, pour faire valoir la revendication salariée d’un juste partage des richesses. Suivie par 87 % des 1 700 salariés, la grève du 21 décembre 2023 n’a duré que 6 heures 45, et a été levée sitôt les revendications entendues. On veut passer un message d’espoir et de combat, ont-ils souligné.

Secrétaire FO du comité social et économique (CSE) de Duralex, Gualter Teixeira n’a pas dit autre chose. Intervenu en vidéo, le militant a expliqué comment FO, représentative à 34 %, a porté au ministère [de l’Économie, NDLR] et au tribunal le projet des salariés d’une reprise en Société coopérative de production (Scop), après que le fonds d’investissement détenant la PME a conduit celle-ci au redressement judiciaire en ponctionnant tous les bénéfices. Effectif depuis le 1er août, le passage en Scop préserve les 228 emplois.

Le combat de FO pour une transition écologique sans casse sociale a aussi été mis en lumière. Délégué syndical central FO de Tefal, Riad Boulassel est revenu sur la mobilisation victorieuse du 3 avril à Paris, qui a permis d’exclure les ustensiles de cuisine du périmètre d’une proposition de loi visant à restreindre la fabrication et la vente de produits pourvus de polluants éternels. Celle-ci menaçait les milliers d’emplois des usines françaises. D’autres batailles se livrent dans le cadre du projet de loi des finances 2025 et de son verdissement. Administrateur salarié FO du groupe Air France-KLM, Didier Dague a pointé les conséquences pour l’emploi d’une éventuelle hausse de la fiscalité sur le transport aérien.

Conditionner les aides publiques aux entreprises

Également dans l’actualité, les actions pour la souveraineté sanitaire. Coordinateur FO chez Sanofi, Adel Qalai a rappelé les actions contre la cession, à un fonds d’investissement américain, de la filiale de santé grand public (1 800 salariés en France) qui est spécialisée dans les médicaments sans ordonnance, dont le Doliprane. Il a dénoncé le démantèlement du groupe, devenu un fleuron grâce à l’argent public. Plus de 1,5 milliard d’euros ont été reçus en dix ans.

D’aides publiques, il en a encore été question dans le dossier Casino. Secrétaire générale du SNTA-FO, première organisation, Nathalie Devienne a rappelé la vague spéculative qui s’est emparée de la direction et qui a conduit au démantèlement du groupe, au transfert de 18 000 salariés à la concurrence, et à 3 079 licenciements. Chaque intervention a été l’occasion de rappeler la revendication FO d’une conditionnalité des aides publiques aux entreprises. Et la nécessité du développement syndical. À ce titre, le succès FO aux premières élections CSE de La Poste (21,71 % de représentativité, soit + 3,23 points), détaillé par la secrétaire fédérale Christine Simon, a été un autre message d’espoir et de combat.

Élie Hiesse
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