Time to think
La troisième révolution industrielle, née de la robotique, du digital, de l’Internet, nous a donné de nouveaux outils pour travailler mais a surtout modifié en profondeur nos façons de nous organiser, de consommer, de produire, de considérer le travail, de parler, de nous comporter.
Reprenant les réflexions d’auteurs comme Karl Marx, Hannah Arendt, Simone Weil sur le concept travail, cette étude dévoile les mécanismes à l’œuvre dans la mise en place du néotravail et les changements qu’ils induisent dans nos vies. Car le travail façonne notre condition humaine : cet acte intentionnel qui transforme la nature pour répondre à nos besoins fonde notre rapport à l’environnement, aux autres et cristallise nos aspirations.
Or, les nouvelles formes de travail bouleversent ces rapports de plusieurs façons. D’abord par l’atomisation du travail dans l’espace et dans le temps (un travail dématérialisé, donc possible n’importe où, n’importe quand) et dans sa production (travail à la tâche).
Ensuite par sa dépréciation : ce qui prime, c’est l’adaptation à tout prix ; plus besoin de réfléchir, on doit suivre les règles ; plus de responsabilisation, plus de mise en pratique de savoir-faire personnels, tout devient interchangeable.
Enfin par l’utilisation de méthodes « totalitaires » : isolement des travailleurs, instrumentalisation du langage, confiscation du sens des choses.
C’est un livre dense et riche d’enseignements, qui dévoile un monde où le travailleur se retrouve sans lieu de socialisation, sans organisation collective, sans stabilité, réduit à l’état de matériau, utilisable et jetable ; un monde où le travail ne dit plus son nom, ni son lieu, ni son sens ; un monde désert basé sur l’économie de la décharge, privé d’âme. Pas très réjouissant ! La solution : penser ce que nous faisons, faire ressurgir l’acte, savoir dire non, revenir à des formes de bricolage. Sinon, les lendemains qui chantent pourraient bien être ceux d’hier…
Les dépossédés de l’open space – Une critique écologique du travail de Fanny Lederlin. Éditions PUF – 255 pages, 19,90 euros |
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly