Le travail de nuit


Le travail de nuit est le travail effectué entre 21h et 6h. Une autre période de neuf heures consécutives, comprise entre 21h et 7h, intégrant en tout état de cause l’intervalle entre 24h et 5h, peut être substituée à la période 21h/6h par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche. A défaut d’accord et lorsque les caractéristiques particulières de l’activité de l’entreprise le justifient, l’inspecteur du travail peut autoriser cette substitution après avis du CSE s’il existe (art. L 3122-1 et s. du code du travail).

Le recours au travail de nuit doit être exceptionnel. Il doit prendre en compte les impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs et doit nécessairement être justifié par la nécessité d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale.

La mise en place du travail de nuit ou son extension à une nouvelle catégorie de salariés est subordonnée à la conclusion d’un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche.

Si un tel accord est conclu, il est présumé être justifié par les nécessités d’assurer la continuité de l’activité économique ou des services d’utilité sociale. Cette présomption peut être renversée. Cette justification s’analyse au regard de l’établissement concerné et non de l’entreprise.

Dernièrement, la société Monoprix a été condamnée à fermer ses établissements la nuit, les juges considérant que le travail de nuit ne peut pas être le mode d’organisation normal du travail au sein d’une entreprise et ne doit être mis en œuvre que lorsqu’il est indispensable à son fonctionnement : la satisfaction du client et son confort de consommation ne constituent pas un service d’utilité sociale.

Pour mettre en place valablement un travail de nuit, il faut justifier que l’entreprise ne peut pas mettre en place un autre aménagement du temps de travail moins nuisible à la santé des salariés. L’attractivité commerciale ne figure pas au rang des motifs justifiant l’ouverture de nuit. Autrement dit, l’emplacement particulier d’une boutique ne saurait justifier le recours au travail de nuit au regard des impératifs commerciaux et touristiques.

A défaut d’accord sur le travail de nuit, dès lors que l’employeur a engagé sérieusement et loyalement des négociations tendant à la conclusion d’un tel accord, l’inspecteur du travail peut affecter certains travailleurs à des postes de nuit. L’inspecteur du travail doit vérifier que l’employeur accorde à ces salariés des contreparties et des temps de pause.

Indépendamment de la négociation d’un accord d’entreprise ou d’établissement, la consultation du CSE est exigée sur la mise en œuvre du travail de nuit ou lors des modifications importantes. Le CSE est également destinataire des informations régulières sur le travail de nuit. Si le CSE n’est pas consulté, celui-ci peut demander la suspension de la procédure de mise en place du travail de nuit si celle-ci n’est pas terminée ou, à défaut, la réparation du préjudice subi à ce titre.

Le médecin du travail doit également être consulté avant toute décision importante relative à la mise en place du travail de nuit ou à la modification de son organisation.

Pour bénéficier des droits attachés au travail de nuit, le travailleur de nuit doit accomplir :

soit au moins 2 fois par semaine, selon son horaire habituel de travail, au moins 3 heures de travail de nuit ;

soit au cours de la période de référence, un nombre minimal d’heures de travail de nuit fixé par un accord collectif étendu. A défaut d’accord, le salarié doit avoir accompli au minimum 270 heures de nuit sur une période de 12 mois consécutifs. Pour le calcul de ces 270 heures, il ne faut pas prendre uniquement en compte les heures effectivement travaillées mais toutes les heures comprises dans l’horaire habituel de travail, y compris celles correspondant à des congés payés, des jours fériés, des jours de formation ou de délégation.

Sauf exception, le travail de nuit ne peut excéder 8 heures. La durée hebdomadaire des travailleurs de nuit, calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives, ne peut dépasser 40 heures. Un accord de branche étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement peut porter cette limite à 44 heures. Pour rappel, le passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit (et inversement), même partiellement, constitue une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser.

L’accord collectif mettant en place le travail de nuit doit prévoir des temps de pause supplémentaires et des contreparties sous forme de repos compensateur.

Facultativement, l’accord collectif peut également prévoir des contreparties financières. Le repos compensateur doit être pris dans les plus brefs délais à l’issue de la période travaillée. En outre, l’accord doit prévoir des mesures destinées à améliorer les conditions de travail, à faciliter l’articulation de l’activité nocturne avec l’exercice des responsabilités familiales et sociales (moyens de transport, formation…).

Les travailleurs de nuit bénéficient d’une priorité pour l’attribution d’un emploi de jour de la même catégorie professionnelle ou équivalent. L’employeur doit porter à leur connaissance de tels emplois disponibles dans le même établissement ou dans la même entreprise. Lorsque le travail de nuit devient incompatible avec des obligations familiales impérieuses, le salarié peut demander son affectation à un poste de jour.

Le travailleur de nuit doit également faire l’objet d’un suivi médical renforcé et personnalisé. Avant l’affectation à un poste de nuit, le salarié doit bénéficier d’une visite d’information et de prévention. Celle-ci doit être renouvelée au minimum tous les 3 ans. Le médecin du travail doit être informé par l’employeur de toute absence pour cause de maladie du travailleur de nuit. Par ailleurs, un transfert sur un poste de jour, peut être effectué, lorsque l’état de santé du salarié, constaté par le médecin du travail, l’exige.

Les femmes enceintes ou ayant accouché doivent être affectées à un poste de jour à leur demande pendant la durée de la grossesse et pendant la période du congé légal postnatal.

Attention, pour les jeunes de moins de 18 ans, le travail entre 22h et 6h est interdit. Pour les jeunes de moins de 16 ans, ils ne peuvent travailler entre 20h et 6h. A titre exceptionnel, des dérogations peuvent être accordées, par l’inspecteur du travail et pour une durée maximale d’un an, dans certains secteurs très limités (spectacle, boulangerie, restauration, hôtellerie, course hippique).

Toute infraction aux règles en matière de travail de nuit est punie d’une amende de 1 500 euros, pouvant être portée à 3 000 euros en cas de récidive dans le délai d’un an (art. R 3124-15 du code du travail).

Remarque : le travail de nuit doit être distingué du travail en soirée. Le travail de soirée fera l’objet d’un prochain Focus.

 

 


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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