À défaut de dispositions législatives contraires, un accord collectif peut permettre la prise en charge par l’employeur d’une partie du montant des cotisations syndicales des salariés sous certaines conditions.
D ans un arrêt du 27 janvier 2021 (n°18-10672), et pour la première fois à notre connaissance, la Cour de cassation se prononce sur la possibilité pour un employeur de participer, de manière indirecte, à la prise en charge des cotisations syndicales des salariés.
Le chèque syndical s’est développé dans les années 1990 par accord collectif : l’employeur fournissait à chaque salarié un chèque, libre à lui de le rétrocéder à une organisation syndicale ou de le jeter. Les organisations syndicales bénéficient d’un peu de liberté
, mais ce dispositif peut s’avérer dangereux car il permet à l’employeur d’avoir une vision sur la représentativité réelle des syndicats dans son entreprise, alors que d’autres y voient une aliénation
du syndicat.
Dans cette affaire, un accord collectif permettait à un employeur de prendre en charge une partie des cotisations syndicales versées par les salariés par l’intermédiaire d’un organisme extérieur.
Saisie par un syndicat, la cour d’appel de Paris avait considéré cet accord illégal au motif qu’il permettait à l’employeur d’avoir des informations précises, notamment sur le nombre d’adhérents et sur l’influence des organisations syndicales.
La Cour de cassation, quant à elle, admet cette possibilité mais cette prise en charge doit respecter certaines conditions :
– ne pas porter atteinte à la liberté syndicale : le salarié doit avoir le choix d’utiliser ou non ce dispositif ;
– respecter l’anonymat des salariés, en l’espèce le recours à un organisme extérieur permettait de satisfaire cette condition ;
– de bénéficier à tous les syndicats présents dans l’entreprise et non pas seulement aux syndicats représentatifs. Or, seuls les syndicats représentatifs étaient visés ;
– et ne pas représenter la totalité du montant restant à charge pour les salariés après déduction fiscale (ce qui n’était pas le cas en l’espèce).
En ne respectant pas deux critères, l’accord collectif ne permettait pas de garantir l’indépendance des syndicats, un « reste à charge » des syndiqués devant obligatoirement exister !
L’article L 2121-1 du Code du travail dispose :
La représentativité des organisations syndicales est déterminée d’après les critères cumulatifs suivants :
1° le respect des valeurs républicaines ;
2° l’indépendance ;
(…).
L’article L 2141-6 du Code du travail précise :
Il est interdit à l’employeur de prélever les cotisations syndicales sur les salaires de son personnel et de les payer au lieu et place de celui-ci.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly