[Exposition] « Humans », onze artistes chinois à Bordeaux


Onze des plus grands artistes chinois contemporains s’exposent actuellement à l’Institut culturel Bernard Magrez de Bordeaux, autour du thème de l’individu et de son corps. Subversif pour la Chine de Xi Jinping.

Bernard Magrez a fait fortune dans le négoce du vin, à la tête aujourd’hui de 40 propriétés viticoles de par le monde. C’est désormais le plus grand mécène culturel d’Aquitaine. À l’heure où la Chine investit massivement dans le vignoble bordelais, paradoxalement, Magrez expose onze artistes chinois, avec 80 de leurs œuvres, qui ne sont pas en odeur de sainteté à Pékin. D’autant que la thématique retenue est : la représentation du corps et de l’individu au cœur de l’évolution chinoise. Quand on sait que depuis 1949 le régime communiste chinois a tout fait pour briser l’individu, pour le fondre dans la masse, masse contrôlable, contrôlée et asservie. D’autant que cette exposition de photos, peintures, montages, sculptures a lieu au moment où Hong Kong se révolte contre le totalitarisme. Au moment même où les visages des citoyens servent au flicage de dernières technologies.

Le photographe Zhen Gao, appartenant aux « Gao Brothers », a d’ailleurs déclaré : pour moi, l’art c’est subversif, surtout dans un pays comme la Chine en raison du parti communiste. En 2008, lors des Jeux Olympiques, le gouvernement a voulu montrer une bonne image du pays. Mais nous, les artistes, on sait que c’est faux. Il est interdit d’exposition dans son pays !

Finesse, force et diversité

Pour mettre en valeur l’individu, dans un régime qui le rejette, l’oppresse, l’épie, le contrôle dans sa vie quotidienne, une évidence : mettre en avant les corps. Cette exposition met donc en valeur le corps comme un objet esthétique porteur de sens et de symboles. On peut découvrir la finesse des visages en porcelaine de Lue Fahui, tout comme la fresque gigantesque et furieuse de quinze mètres de long de Liu Yaming, ainsi que les œuvres de Li Wei, Cang Xin, Ru Xiaofan et Zhu Fadong. Sans oublier le plus connu, Liu Bolin. Dans ses photos-performances, il grime un homme au milieu d’un fond. On devine sa tête, mais le corps a été peint comme une sorte de caméléon. Un homme sur fond de mur de briques. Un autre dans un abattoir au milieu de carcasses de bœufs. Liu Bolin n’a de cesse de dénoncer la société de consommation qui commence aussi à faire des ravages en Chine.

Actuellement, il est plus facile de voir la production de l’art contemporain chinois en Europe et aux États-Unis, qu’en Chine. Nous sommes loin, très loin, des fameuses toiles de l’époque maoïste et de sa dérive délirante des « Gardes rouges », avec leur fameux « L’Orient est rouge » décliné sous toutes ses formes et autres représentations de l’art stalino-oriental.

« Humans », jusqu’au 16 février 2020. Institut culturel Bernard Magrez, 16 rue Tivoli, Bordeaux. Vendredi, samedi, dimanche : 13 h – 18 h Tarif 6 à 8 €. Rens : 05 56 81 72 77.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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