Danone : un plan de 2 000 suppressions de postes au goût amer


Le groupe Danone a annoncé le 21 novembre son intention de supprimer jusqu’à 2 000 postes dans ses sièges dans le monde, dont 400 à 500 postes en France. L’objectif est d’économiser un milliard d’euros jusqu’en 2023 pour rassurer les actionnaires. En avril dernier, FO s’était déjà opposée au versement d’1,5 milliard d’euros de dividendes.

Choquant, inacceptable. C’est ainsi qu’a réagi le secrétaire général de FO Yves Veyrier, le 24 novembre sur Public Sénat, à l’annonce par le groupe Danone de 2 000 suppressions de postes dans ses sièges mondiaux, dont 400 à 500 postes en France. Le groupe, qui a bénéficié d’aides publiques (…) avance comme argument de favoriser sa rentabilité et de rassurer les actionnaires, a-t-il dénoncé. A chaque fois que vous mettez de l’aide publique, il faut interdire tous les versements de dividendes et interdire toutes suppressions d’emplois contraintes.

Ce plan avait été annoncé le 21 novembre en comité de groupe extraordinaire. Un quart des effectifs des sièges mondiaux sont menacés. En France, le siège de Danone Monde, situé à Paris, va être transféré à Rueil-Malmaison, nouveau siège de Danone France. D’autres transferts et rapprochements de services sont prévus dans cette vaste restructuration.

La direction entend économiser un milliard d’euros jusqu’en 2023. Elle programme que 700 millions d’euros seront récupérés sur les coûts de structure. Le groupe compte aussi accélérer la digitalisation et la robotisation des usines pour une meilleure productivité des outils industriels. Une économie de 300 millions d’euros est ainsi visée.

Si les actionnaires avaient renoncé à une partie de leurs dividendes, ce plan n’existerait pas

Le processus d’information consultation des instances représentatives du personnel à l’échelle européenne est prévu en février 2021. La mise en œuvre du plan pourrait être effective au deuxième semestre 2021. La fédération FGTA-FO et le syndicat FO Danone défendront pied à pied chaque poste. Nous voulons limiter la casse sociale avec des solutions en interne ou qui correspondent aux attentes des salariés, explique Laurent Pouillen, coordinateur FO du groupe Danone.

Les suppressions de postes concernent essentiellement des cols blancs, managers et directeurs, dans un premier temps Derrière ces annonces pour les hauts cadres, il peut y avoir des plans cachés pour les sites industriels, nous allons être plus que vigilants sur l’emploi, poursuit-il.

Il rappelle qu’en avril dernier, 1,5 milliard d’euros de dividendes — un montant en hausse de 8% — ont été versés aux actionnaires. FO avait voté contre cette décision compte tenu du contexte économique difficile. En période de crise, tout le monde doit faire des efforts, actionnaires compris, réagit Laurent Rescanières, secrétaire général adjoint de la FGTA-FO, en charge de Danone. Pour nous, cette somme aurait dû servir à investir dans les marques. Si les actionnaires avaient renoncé à une partie de leurs dividendes, ce plan n’existerait pas et aucun poste ne serait supprimé, ajoute-t-il. Une fois de plus, la FGTA-FO et le syndicat FO du groupe Danone déplorent que les salariés et l’emploi soient les seules variables d’ajustement en cas de difficultés. Ils condamnent ces décisions, surtout dans un groupe qui se prétend socialement engagé.

Entreprise à mission

Lors du premier confinement, Danone a communiqué sur le maintien de salaire à 100% en cas d’activité partielle et de son refus des aides de l’État, raconte le coordinateur FO. Nous avions été favorables à cette démarche, tout en restant prudents. C’était en fait une stratégie pour pouvoir reverser des dividendes sans se faire retoquer par l’État. Car le gouvernement avait prévenu que les entreprises qui percevraient une aide d’État ne pourraient pas verser de dividendes. En revanche pour ce deuxième confinement, le groupe a placé les salariés en activité partielle, il a demandé les aides de l’État, et il ne compense même plus à 100% les salaires. Et derrière, il supprime des postes.

Pour les militants FO, le message passe d’autant plus mal que le groupe Danone est devenu en juin dernier une entreprise à mission, un dispositif créé par la loi Pacte de 2019. Une entreprise à mission est une entreprise dotée d’une Raison d’êtr et d’objectifs sociaux, sociétaux et environnementaux associés, inscrits dans ses statuts et constituant sa Mission, communiquait alors le groupe Danone.

Une course à la rentabilité qui n’a aucun sens

L’entreprise est-elle vraiment en difficultés financières, le P-DG du groupe annonçant même le 24 novembre sur France Inter que la survie de l’entreprise est en jeu ? Tout dépend des objectifs qu’on se fixe, poursuit Laurent Rescanières. Si sur les neuf premiers mois de l’année, le chiffre d’affaires du groupe a reculé de 5,4%, à 18 milliards d’euros, en raison de la crise sanitaire, la marge opérationnelle courante du groupe est attendue à 14% pour 2020, selon l’AFP.

Danone est sous la pression des marchés boursiers qui lui demandent de faire mieux que ses concurrents, Nestlé ou Unilever, dénonce Laurent Pouillen. L’objectif est fixé à 16% de rentabilité. Or, c’est une course qui n’a aucun sens, et qui se fait au détriment de la qualité de vie au travail et de l’emploi. Il s’agit de faire des économies pour augmenter les marges. Le pire, c’est que la direction ne dit même pas qu’elle ne versera pas de dividendes l’an prochain.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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