Conforama : FO fait reculer la direction et préserve les vendeurs


Une victoire de taille ! Le tribunal judiciaire de Meaux a ordonné le 3 février 2021 la suspension d’une série de projets décidés par la direction de Conforama et qui visaient à réduire la présence des vendeurs dans les magasins et à supprimer du personnel. Un grignotage progressif de l’emploi que FO déplore depuis des années.

C’est extraordinaire ce qu’on vient de remporter, c’est une victoire pour l’ensemble des salariés de Conforama France. Si aujourd’hui Mouloud Hammour peut enfin laisser aller sa joie, c’est bien parce qu’il vient de serrer les dents depuis des mois. 

Après un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) annoncé en juillet 2019, supprimant 1905 emplois et fermant 42 magasins, un rachat d’entreprise obtenu de justesse, et une année 2020 perturbée par la Covid-19, le secrétaire FO du CSE-C (comité social et économique central) de Conforama France apprécie légitimement cette éclatante victoire syndicale. 

Ça fait des années que cela couvait !, raconte l’élu faisant référence à la volonté de Conforama, à travers la mise en place de toute une série de projets, de réduire le nombre de ses vendeurs dans les magasins. Une stratégie visant à faire des économies et contre laquelle FO, deuxième organisation syndicale représentative chez Conforama, n’a cessé de s’élever. 

En 2011 déjà, la direction s’est mise à massifier, cela veut dire tout produire en masse comme chez IKEA, indique Mouloud Hammour. Elle a mis en place ce qu’on appelle le Libre Emport, en gros, on expose tous les produits, les clients se servent tout seuls et vont en caisse. Un premier coup porté au rôle de vendeur. 

Le concept des vendeurs « en option »

S’en est suivi un deuxième projet, en 2013, « L’achat rapide », c’est-à-dire la mise en place d’un étiquetage permettant de se servir et de payer plus vite. Là aussi, le but est de laisser le client trouver son bonheur sans l’aide d’un vendeur. Conséquence directe de cette nouveauté, la disparition des vendeurs petits meubles, dénonce Mouloud Hammour. A l’époque, plusieurs procédures sont lancées auprès de la justice afin d’enrayer cette pratique dangereuse pour l’emploi. On a été jusqu’en Cassation, se souvient le secrétaire du CSE-C

La stratégie de la direction de Conforama cherchant à se passer des vendeurs se poursuit, avec en 2016, le doublement du nombre de produits sur lesquels « l’achat libre » est possible. L’année 2020 apporte, elle, son lot de mauvaises surprises. La crise sanitaire d’abord. Suite au premier confinement et aux mauvais chiffres, la direction décide de généraliser l’achat rapide

C’est dans ce contexte qu’intervient le rachat de l’enseigne, au bord de la faillite, en juillet 2020 et la renégociation des conditions du PSE. Les salariés constatent vite que les vendeurs « en option » sont toujours dans la ligne de mire de la direction. 

 L’année 2020 a été particulièrement difficile pour différentes raisons. Mais en novembre 2020, quand les magasins sont passés de 160 produits à 20 000 référencés pour “l’achat rapide” — c’est-à-dire tous ! — on a déclenché une expertise par le CSE-C retrace l’élu FO. 

Double effet kiss-cool

Les salariés ne sont pas encore au bout de leurs peines. Tour à tour, Conforama sort de sa besace d’autres concepts. Le « Scan&Go », qui permet de scanner son produit depuis un téléphone portable et d’aller à la caisse voire de le payer directement en ligne sans passer par la caisse. Ça c’est le double effet kiss-cool, s’insurge Mouloud Hammour. Non seulement on n’a plus besoin d’un vendeur pour être conseillé, mais on n’a plus non plus besoin de caissier ! Une expérimentation d’abord développée dans un magasin à Reims, sans même que le CSE-C n’en soit informé. 

Autre petite nouveauté dans la novlangue de Conforama : le « Bouton SAV ». Le concept est simple explique, l’élu FO. Le client sonne au dépôt et c’est un personnel du dépôt qui s’occupe du SAV. L’objectif est de supprimer environ quatre magasiniers et de les remplacer par un bouton ! Également mis en place en 2020, la « Gamme nationale expédiable » externalise l’activité de livraison, en détournant le service local au profit de deux plateformes nationales. Là encore, ce sont l’équivalent de deux temps pleins en magasin dont la direction veut se passer, tempête le militant.

Enfin, le « Drive », mis en place avec l’arrivée du virus en France, inquiète également les salariés. Même si sa nécessité n’est pas remise en question cela dans le cadre du respect de mesures sanitaires, son installation n’a pas fait l’objet d’une consultation du CSE-C alors que des modifications d’organisation du travail sont décidées par la direction. 

Le logiciel de paye modifié sans consultation

Goutte d’eau, si l’on peut dire, qui fait déborder le vase, à la réception de leur fiche de paye, les salariés se rendent compte d’erreurs. Explication : un nouveau logiciel de calcul des salaires a été mis en place et cet outil de gestion a modifié le système de paye. C’en est de trop pour le CSE-C qui n’avait pas été informé de ce changement et a donc ajouté cet élément de grief dans sa demande d’expertise. La direction saisit alors la justice afin de faire casser la mission d’expertise votée par le CSE-C, sous l’impulsion de FO. 

Le 3 février, les efforts de toute l’équipe menée par FO sont enfin récompensés. Le Tribunal de Meaux ordonne la suspension de quasiment tous les projets de Conforama visant à s’attaquer aux vendeurs, tant que le CSE-C n’aura pas été consulté et informé des conséquences sociales desdits projets. C’est un travail de fond, se réjouit Mouloud Hammour, un travail d’équipe, et une victoire bien méritée après une période difficile. L’équipe de FO restera malgré tout mobilisée et attentive jusqu’au prochain CSE-C, prévu en mars 2021.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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