Conciliation devant le BCO : salariés, garde à ce sur quoi vous transigez !

La transaction est un mode de règlement de conflits qui s’est fait une place en droit du travail depuis longtemps maintenant.

Toutefois, les salariés qui transigent ne connaissent pas toujours l’étendue des droits auxquels ils renoncent. La Haute juridiction de l’ordre judiciaire ne pardonne pas. L’arrêt du 24 avril 2024 (Cass. soc., 24-4-24, n°22-20472) en est une (énième) illustration.

Les faits sont les suivants : un salarié signe en cours d’exécution de son contrat de travail, un avenant qui insère une clause de non-concurrence. Le salarié sera licencié 2 ans plus tard.

Employeur et salarié comparaissent volontairement devant le bureau de conciliation et d’orientation (BCO) du conseil de prud’hommes. Ils parviendront à un accord signé devant la formation juridictionnelle, qui stipule que l’employeur versera une indemnité forfaitaire, qui sera globale, transactionnelle et définitive. Cet accord vaudra renonciation à toute réclamation et indemnité. Il entraînera désistement d’instance et d’action pour tout litige né ou à naître découlant du contrat de travail.

Le salarié outrepasse l’accord signé et saisit le conseil de prud’hommes afin d’obtenir le paiement de la contrepartie financière de la clause non-concurrence qu’il avait signée par avenant.

En appel, il est débouté de sa demande, il forme un pourvoi en cassation.

Au soutien de son pourvoi, le salarié fait valoir dans la première branche du moyen que l’accord trouvé, ne vaut que pour la procédure de licenciement et son caractère réel et sérieux, mais n’emporte pas renonciation aux autres droits, en l’occurrence en l’espèce, à la contrepartie financière de la clause de non-concurrence.

Il s’appuie sur l’alinéa 2 de l’article L 1235-1 du code du travail qui dispose que « le procès-verbal constatant l’accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail ».

La deuxième branche du moyen, soutenait que le BCO n’avait pas correctement informé le salarié de ses droits et l’étendue de ceux-ci. L’insuffisance de l’information donnée rend la conciliation invalide.

Enfin la troisième et dernière branche du moyen arguait que la renonciation à un droit ne peut se présumer ; qu’une personne ne peut renoncer par avance à un droit non encore acquis.

Ainsi à la date de l’accord, le droit au versement de la contrepartie financière constituait un droit futur éventuel, qui ne pouvait pas être inclus dans le procès-verbal de conciliation.

La Cour de cassation rejette l’argumentaire du salarié, et par conséquent son pourvoi.

Elle énonce tout d’abord, que les parties sont libres, devant le BCO, d’étendre l’objet de la conciliation au-delà des seules indemnités de rupture.

La Cour applique ensuite les règles de la transaction, et affirme que l’accord tel que signé par les parties fait état d’une renonciation à toute réclamation et indemnité, ainsi qu’à toute action pour tout litige né ou à naître découlant du contrat de travail.

Elle considère donc que la renonciation au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence était comprise dans l’objet de l’accord.

La solution n’est pas nouvelle (Cass. soc., 17-2-21, n°19-20635 ; Cass. soc., 20-2-19, n°17-19676), mais n’avait pas encore été appliquée au cas d’un accord de conciliation devant le BCO.

Si la solution de la Cour de cassation sécurise les relations post rupture du contrat du travail, elle reste néanmoins assez fatale au salarié. Celui-ci doit donc être extrêmement vigilant tant au moment de la discussion/négociation d’une transaction, y compris devant le BCO, qu’au moment de la signature de l’accord. Le salarié n’est pas obligé de renoncer à tout par une transaction, mais encore faut-il qu’il exprime clairement ses intentions.

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