Le premier film du réalisateur galicien Alvaro Gago met en lumière la condition difficile d’une mère de famille sans diplômes mais à l’énergie débordante lorsqu’il s’agit de travailler pour garder la tête hors de l’eau. Sélectionné dans de nombreux festivals de cinéma, Matria offre un très beau portrait de femme d’aujourd’hui. En salle à partir du 17 avril.
Ramona court toute la journée. De la conserverie de Galice où elle brique les ateliers avant l’arrivée des ouvriers, au port où elle conditionne les moules en filets, puis chez elle où elle entretient un mari plus souvent ivrogne que soutien de famille. Quand les nouveaux patrons de la conserverie annoncent leur intention de revenir aux salaires d’il y a huit ans pour conserver les emplois, c’en est trop pour la jeune quadra qui claque la porte. Mais rien pour elle à l’agence pour l’emploi. Il faut pourtant qu’elle continue à mettre de l’argent de côté pour financer les études de sa fille. Ramona déniche alors un emploi de femme de ménage chez un particulier, et par cette relation, elle va se permettre de s’imaginer un avenir différent.
Tantôt forte, tantôt fragile, la protagoniste de Matria est un personnage inspiré de la réalité. Alvaro Gago l’a rencontrée chez son grand-père, lorsque celui-ci a recruté une femme de ménage après le décès de son épouse. Francisca a d’ailleurs tourné son propre rôle dans le premier court métrage aux allures de documentaire du réalisateur, couronné à Sundance en 2018. Elle est devenue une amie de la famille, une amie d’Alvaro et a participé au casting du long métrage, qui a permis de sélectionner Maria Vasquez pour l’incarner.
Pour quelques billets dans une boîte en fer blanc
Pour la construction de son personnage, le réalisateur s’est avoué influencé par les personnages féminins de Visconti, mais aussi par le cinéma des frères Dardenne ou celui de Robert Guediguian dans leur manière de filmer une réalité simple, des vies rudes, des choix radicaux…
Matria se développe à un rythme haletant. Ramona est presque de tous les plans. Puis peu à peu le rythme ralentit alors que la protagoniste se penche sur ses propres besoins, s’inquiète de sa santé mise à mal par son métier comme par son addiction au tabac ou le stress de cette vie de peu, des tâches éreintantes recommencées chaque jour pour déposer quelques billets dans la boîte en fer blanc de ses économies.
Un beau portrait de femme, primé au Festival du film international de Seattle, pour la réalisation et dans la catégorie meilleure actrice, ainsi qu’au festival de Malaga.