L’évolution des règles du chômage partiel était au menu de la concertation qui vient de s’achever entre les interlocuteurs sociaux et la ministre du Travail. L’indemnisation des salariés ne devrait pas être impactée. Le chef de l’État doit par ailleurs présenter dans les prochains jours les contours d’un nouveau dispositif concernant l’activité partielle de longue durée.
On fait le job, on a expliqué à la ministre du Travail qu’il était hors de question de baisser l’indemnisation des salariés en activité partielle et on a été entendus, c’est assuré jusqu’en septembre
, se félicite Michel Beaugas, secrétaire confédéral FO chargé de l’emploi.
Une concertation express sur l’emploi – et notamment sur l’évolution des règles du chômage partiel – s’est déroulée du 9 au 15 juin entre les interlocuteurs sociaux et la ministre du Travail. Le chef de l’État doit annoncer dans les prochains jours les contours d’un nouveau dispositif. Mais dès le 15 juin, le ministère du Travail a tenu à affirmer qu’en matière de chômage partiel classique, les règles actuelles ne changeraient pas au 1er juillet, ni pour les employeurs, ni pour les salariés. Ces derniers continueront à percevoir 70% de leur salaire brut, soit 84% de leur salaire net. L’information selon laquelle l’indemnisation des salariés en activité partielle passerait à 60% du brut au 1er juillet est inexacte. Il n’y aura aucun changement d’indemnisation pour les salariés en activité partielle au 1er juillet
, précise le ministère dans un message adressé à la presse.
Ces derniers jours, des membres du gouvernement avaient pourtant annoncé le contraire : le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin le 15 juin sur BFM TV, et avant lui la secrétaire d’État à l’Economie Agnès Pannier-Runacher, en évoquant sur BFM-TV le 12 juin le modèle allemand Kurzarbeit avant de se démentir.
Désengagement progressif de l’État
Dès le début de la crise sanitaire liée au Covid-19, l’exécutif a mis en place un mécanisme exceptionnel et massif
de chômage partiel pour toutes les entreprises ayant subi une baisse de leur activité, quelle que soit leur taille. Le salarié en activité partielle est indemnisé par son employeur à hauteur 70% de son salaire brut, soit 84% du salaire net, et au minimum au Smic. Jusqu’au 31 mai, cette allocation était prise en charge à 100% par l’État, dans la limite de 4.5 Smic. Selon les estimations, 7.2 millions de salariés en auraient bénéficié en mars et 8.6 millions en avril, pour un coût s’élevant à 31 milliards d’euros.
Le gouvernement a argué du déconfinement et de la reprise progressive de l’activité économique pour concevoir un désengagement progressif. Depuis le 1er juin, le taux de compensation est modulable selon les secteurs d’activité et les entreprises. Un projet de décret, sur lequel les interlocuteurs sociaux ont été consultés le 12 juin, acte sa mise en place de manière rétroactive.
Désormais, pour la majorité des entreprises, l’État a réduit sa prise en charge, la faisant passer de 70% à 60% du salaire brut, soit 85% de la somme versée au salarié. Les 15% restants sont à la charge de l’employeur.
Ce régime d’activité partielle est applicable jusqu’au 31 septembre 2020. Au-delà, la participation de l’État pourrait encore baisser. FO a mis en garde contre le risque que cette évolution puisse conduire à des suppressions d’emplois.
Une prise en charge à 70% est maintenue pour les secteurs les plus impactés par l’épidémie de Convid-19 : tourisme, hôtellerie, restauration, sport, culture, transport aérien et événementiel, ainsi que les activités connexes. Ce taux majoré concerne également les entreprises dont l’activité principale implique l’accueil du public, et qui a été interrompue du fait du Covid-19, ainsi que celles ayant subi une baisse de 80% du chiffre d’affaires entre le 15 mars et le 15 mai. Ces dispositions seront applicables jusqu’à une date fixée par décret, et au moins jusqu’au 30 septembre 2020.
Un nouveau dispositif d’activité partielle de longue durée
Les discussions avec le patronat et les syndicats ont également porté sur la création d’un nouveau dispositif de chômage partiel de longue durée, spécifique au Covid-19, et baptisé activité réduite pour le maintien en emploi
ou ARME
. Il est destiné aux entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité
. Il pourrait voir le jour dès le 1er juillet. Ce dispositif est prévu par le projet de loi relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire
, adopté le 10 juin par le Parlement.
Il s’agit d’un nouveau type d’accord collectif (établissement, entreprise, groupe, branche) qui permet à l’entreprise de bénéficier d’une indemnisation de l’État et de l’Unedic au titre de la réduction de l’horaire de travail en échange d’un engagement de maintien dans l’emploi. Le pourcentage de l’indemnité et le montant de l’allocation peuvent être majorés dans des conditions et dans les cas déterminés par décret, notamment selon l’activité de l’entreprise.
Cet accord collectif doit prévoir la durée de l’accord, les activités et les salariés concernés par l’activité partielle spécifique, les horaires susceptibles d’être modifiés et les engagements de l’employeur pour le maintien de l’emploi. En l’absence d’accord, l’employeur peut prendre une décision unilatérale sur le sujet s’il existe un accord de branche étendu, après consultation du CSE. La durée de vie d’un Arme serait d’un ou deux ans. La baisse d’activité devrait être au maximum de 40%. Un décret à venir en Conseil d’État devrait détailler un peu plus les mesures. Le chef de l’État devrait annoncer ses arbitrages dans les prochains jours.
FO revendique une évaluation des aides publiques
Pour la confédération FO, il est nécessaire de maintenir un dispositif d’activité partielle pour préserver les emplois, mais elle refuse tout dispositif incitant à une baisse ou perte de salaire.
Nous voulons que les décrets imposent un haut niveau de prise en charge de l’allocation par l’État pour assurer un haut niveau de salaire aux salariés, si l’employeur est remboursé à 100%, il indemnisera mieux les salariés
, explique Michel Beaugas.
La confédération revendique par ailleurs que les aides publiques soient systématiquement évaluées, soumises à conditions, et contrôlées et sanctionnées en cas de non-respect des conditions par l’entreprise, afin d’empêcher toute fermeture ou licenciement. Le CSE doit avoir tous les moyens d’information et d’expertise.
FO revendique également l’interdiction de versement de dividendes aux actionnaires en cas de conclusion d’un accord de cette nature dans une entreprise.
Les discussions entre les organisations syndicales, patronales et le ministère du Travail vont se poursuivre tout le mois de juillet avec au menu l’emploi des jeunes, les travailleurs détachés et l’Assurance chômage.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly