Chez Vallourec, FO appelle l’État actionnaire à agir pour maintenir l’emploi


Les négociations ont débuté lundi 7 décembre chez le fabricant de tubes sans soudure, lourdement endetté, qui veut réduire, à travers un PSE, ses effectifs permanents français. Pour les deux tiers, ces 350 suppressions d’emplois s’expliquent par des délocalisations de production, en Allemagne et au Brésil. Inacceptable pour FO.

Le répit aura été de courte durée pour les 2 900 salariés français du groupe Vallourec (sur 19 000 dans le monde) en difficultés financières depuis plusieurs années. Pour la quatrième fois en cinq ans, des négociations portant sur la mise en œuvre d’un plan social se sont ouvertes ce lundi 7 décembre chez le fabricant de tubes sans soudure, qui a déjà réduit de plus d’un tiers les effectifs français (près de 2 000 emplois détruits) depuis la crise de 2014 sur les marché pétrolier et gazier.

Cette fois, la multinationale fondée dans le département du Nord justifie les 350 suppressions de postes permanents prévues, par les conséquences de la pandémie sur les compagnies pétrolières, lesquelles réduisent leurs commandes à Vallourec face à la chute du cours du baril. Reste qu’annoncé le 18 novembre, soit dans les semaines suivant le lancement de sa restructuration financière (Vallourec veut convertir en actions plus de la moitié de sa dette de 3,7 milliards d’euros, NDLR), ce énième plan a tout du gage donné aux futurs créanciers-actionnaires. La présentation de résultats financiers a fourni l’occasion : le chiffre d’affaires du troisième trimestre 2020 est en recul de 32 % (à 716 millions d’euros), comparé au troisième trimestre 2019.

FO veut arrêter l’hémorragie d’emplois

Le nouveau plan prévoit de fermer l’usine de Déville-les-Rouen (190 emplois) en Seine-Maritime, de supprimer 130 emplois répartis sur trois sites nordistes (Saint-Saulve, Valenciennes, Aulnoye-Aymeries) et 30 emplois au siège de Boulogne-Billancourt (Haut-de-Seine). Mais à la suppression de ces 350 postes permanents, s’ajoute celle de plusieurs centaines d’emplois intérimaires ou indirects. D’ici le 31 décembre, le nombre d’intérimaires travaillant à Aulnoye-Aymeries pour l’activité Oil&Gas diminuera de 72%, l’effectif passant de 109 à 30.

Avant même l’ouverture des négociations, les futures organisations du travail, post-PSE ont été détaillées par la direction lors d’un CSE (comité social et économique) extraordinaire le 23 novembre. Elle a aussi largement communiqué, en interne, sur sa volonté de recourir aux pré-retraites. Une stratégie délibérée, selon Jonathan Caucheteux, délégué syndical central FO, et coordinateur FO pour le groupe. La direction essaie de minimiser l’impact des suppressions de postes. Et cherche à diviser les salariés pour éviter les mobilisations explique le militant. Le syndicat FO, se bat dans l’intersyndicale pour arrêter l’hémorragie d’emplois et maintenir les installations industrielles.

Appel à la manifestation le 12 décembre à Déville-les-Rouen

L’intersyndicale appelle à manifester le 12 décembre à Déville-les-Rouen contre la fermeture, annoncée au 30 juin 2021, de l’usine Vallourec dont les productions seront délocalisées en Allemagne. Vallourec continue à se désengager de la France, pour se recentrer sur l’Allemagne, l’Amérique du Sud et l’Asie, comme il le fait depuis plusieurs années, dénonce le militant FO. Au total, les deux tiers des suppressions d’emplois prévues en France s’expliquent par des délocalisations de production.

Avec l’intersyndicale, le DSC FO demande à l’État d’interférer sur les décisions du groupe. La fédération FO Métaux, en soutien de ses élus et des salariés, appelle aussi, dans un communiqué, le gouvernement à agir véritablement pour que Vallourec maintienne les emplois en France.

Depuis 2005, quelque 800 millions d’euros de fonds publics investis

Actionnaire à 15 % du groupe, l’État est légitime à le faire. En 2016, la montée de sa participation dans le capital de Vallourec, par l’injection de 220 millions d’euros via BpiFrance (Banque publique d’investissement), a été décidée par le ministre de l’Économie, un certain Emmanuel Macron. La même année, Vallourec a acheté une usine en Chine, à Tianda, pour 180 millions d’euros, rappelle Jonathan Caucheteux. Plus largement, souligne l’intersyndicale dans un communiqué Au total depuis 2005, ce sont près de 800 millions d’euros de fonds publics français (double prise de capital et aides diverses) qui ont été injectés dans le groupe.

Une délocalisation en germe dans le dernier PSE

Pour le DSC FO, la délocalisation en Allemagne des productions de l’usine normande était en germe dans le dernier PSE que celle-ci a connue. En 2016, Vallourec a fermé le laminoir de l’usine de Déville-les-Rouen, au profit d’un laminoir allemand jugé plus compétitif. Il n’a laissé à cette usine que le traitement thermique de tubes, acheminés depuis l’Allemagne au prix de 40 euros la tonne. Il lui est facile de dire ensuite, lors d’une nouvelle mise en concurrence entre sites, qu’elle n’est pas compétitive, commente le militant.

Lui considère que l’usine normande a les atouts pour se diversifier et devenir, demain, un acteur de la transition énergétique sur le marché de l’hydrogène. En contact avec le cabinet de la ministre déléguée chargée de l’Industrie, l’intersyndicale n’a obtenu aucune assurance. On nous dit que tout sera fait pour la réindustrialisation. Non, il faut tout faire d’abord pour sauver l’usine !, martèle le DSC FO.

Craintes pour l’usine de Saint-Saulve

Dans le Nord, un tiers des 130 suppressions de postes s’expliquent aussi par une délocalisation : le centre de services partagés (CSP) de Valenciennes devrait voir ses activités « transactionnelles, informatiques et de développement industriel » transférées au Brésil (45 emplois supprimés).

Une autre source d’inquiétudes est le nouveau schéma de mutualisation inter-sites. Selon le plan présenté par Vallourec, l’usine de Saint-Saulve verrait supprimer ses 20 emplois dans les services « support » (Direction, RH, Qualité, hygiène, sécurité, sûreté). A l’avenir, elle serait gérée dans ces domaines par l’activité Forge d’Aulnoye-Aymeries et, pour l’ordonnancement, par l’activité Oil&Gas, également à Aulnoye-Aymeries. Une usine gérée par deux activités distinctes, situées à 60 kilomètres ? Cela n’annonce rien de bon, en termes de management et de suivi, commente Jonathan Caucheteux. Il dénonce une nouvelle fragilisation de l’usine de Saint-Saulve, dont le laminoir a aussi été fermé en 2016. Si ce plan est mis en œuvre, Saint-Saulve risquerait, à plus ou moins courte échéance, de subir le même sort que l’usine de Déville-les-Rouen.

Ouverture des discussions sur l’APLD

Reste quatre mois pour agir, le temps des négociations. FO a d’emblée posé sa ligne rouge : aucun départ contraint. Nous allons travailler sur les catégories professionnelles pour qu’il y ait le moins de casse sociale possible, et travailler aussi sur les conditions de départs en retraite, commente le DSC FO. Sur l’activité Forge à Aulnoye-Aymeries, où 40 suppressions de postes sont prévues, un potentiel de 23 départs en retraite a été recensé. Il y a aussi au sein du groupe 90 postes à pourvoir dans le Nord.

Pour passer la crise, Vallourec table encore sur le régime d’activité partielle longue durée (APLD), et a ouvert les discussions sur le sujet ce mercredi 9 décembre. Là encore, FO a fixé son ambition : bâtir un accord de groupe, qui serait plus favorable que l’accord de branche.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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