Une fois n’est pas coutume, policiers et manifestants sont (presque) d’accord sur les chiffres. Hier matin, entre 250 et 300 personnes ont répondu à l’appel des syndicats. Les citoyens de la côte étaient notamment légion à être venus défendre les centres de santé de Cerbère et Banyuls, menacés de délocalisation. « Je pense qu’il est important d’être solidaire, explique Marie- Claude, 61 ans, de Port-Vendres. On n’a pas grand-chose ici. Le centre de rééducation de Cerbère apporte du travail. Il fait vivre de nombreuses familles. Tout le pays devrait nous soutenir ! ».
Habitants insurgés
La Banyulencque Anne-Marie, 66 ans, est elle aussi révoltée : « A Banyuls, le centre de cardiologie propose un parcours de santé en pleine nature pour la rééducation. Il est au milieu des vignes. Les patients n’auront pas ça ailleurs ». Attrapant la conversation au vol, une autre retraitée insurgée renchérit : « En plus, à Perpignan, ils veulent les installer en face du cimetière. C’est pas terrible ! ». Non loin de là, Jean, 74 ans, de Port-Vendres, manifeste aussi son mécontentement : « Si on délocalise les centres de santé, ce sont près de 300 emplois qui vont partir. C’est cher payé. A Cerbère, on va enlever une superstructure. Et pour mettre quoi à la place ? Pour que des spéculateurs s’en mettent plein les poches en faisant des projets immobiliers ? ».
Gares en péril
La délocalisation des centres de santé n’est pas le seul péril qui menace la côte. Les gares sont également dans l’oeil du cyclone. Au grand désespoir de José, 65 ans, d’Estagel. « Je suis cheminot en retraite, indique-t-il. Je viens par solidarité avec les actifs. Si ça continue, on va transformer la côte en désert. C’est sûr qu’il y aura de la place pour les centres commerciaux. Mais la vie, elle sera où ? ». Laurent, 46 ans, de Perpignan, acquiesce : « Les gens d’ici ont eux aussi le droit d’avoir des emplois et des services publics ». Ce ne sont pas les maires de la côte, tous présents lors du rassemblement, qui soutiendront le contraire.
PAROLES DE SYNDICALISTES
Pierre Place, secrétaire départemental de la CGT : « La délocalisation des centres de santé de Cerbère, Banyuls et Arles n’est pas une fatalité. Si on se sert de ce projet pour tenter de finir l’hôpital de Perpignan, qui est encore sous-calibré, il faut le dire. Nous avons des propositions. Nous trouvons cette vision qui consiste à tout centraliser autour de villes-capitales totalement psychédélique. La ligne ferroviaire de la côte est menacée. Les écoles se vident. Il faut que l’Etat fasse marche arrière. Sinon, c’est la mort lente de ce territoire. Que veulent-ils y faire ? Un parc d’attraction avec quelques indigènes exotiques ? La balle est dans le camp des élus et de l’Etat. Nous réclamons la tenue d’une table ronde sur la situation sociale et l’avenir du département en matière d’emploi. Pour faire en sorte que les habitants de ce territoire puissent vivre et travailler dignement ».
Jérôme Capdevielle, secrétaire départemental de FO : « Nous partageons l’ensemble de ces revendications. Nous sommes particulièrement inquiets concernant la désertification du Vallespir et de la Côte Vermeille. On est à la croisée des chemins. Il faut redonner une dynamique à ces centres de santé. Le tourisme, qui génère essentiellement des emplois précaires, ne doit pas être la seule issue pour ce département. On est en droit d’attendre quelque chose de plus solide ».
Conception Delpont, secrétaire départementale de la CFDT Santé : « On nous parle de délocaliser ces établissements de santé. Mais qu’adviendra-t-il du petit personnel ? L’incertitude plane aussi sur l’avenir des commerces et des artisans qu’il y a autour. Je n’ai pas non plus l’impression que le projet prenne en compte l’intérêt des patients. Nous réclamons également la tenue d’une table ronde ».
L’Indépendant – Edition du 16 février 2014 – Arnaud Andreu