Bart, un militant déterminé à défendre son hôtel


Bart Verhulst, 61 ans, est réceptionniste à l’hôtel Radisson Blu de Cannes. Mi-octobre, il a lancé un appel à la grève contre un projet de réorganisation assorti d’un PSE supprimant 56 emplois sur 82. Il soupçonne la direction d’exploiter la crise sanitaire à des fins de profitabilité.

Durant les premières semaines de confinement, Bart Verhulst, délégué FO au Radisson Blu de Cannes, a continué à venir tous les jours dans cet hôtel cinq étoiles déserté par les touristes. Je ne voulais pas abandonner les lieux, explique le réceptionniste. Pour les collègues, cette situation a été dramatique et traumatisante.

Jeune militant politique, il a quitté sa Belgique natale pour le sud de la France en 1984. Il a d’abord travaillé dans la restauration puis l’hôtellerie. Il est depuis trente ans derrière le comptoir de cet établissement de 134 chambres, appartenant à un groupe familial et passé successivement sous franchise Sofitel, sans enseigne, et désormais sous contrat avec Radisson Blu, bien que la propriétaire ait repris le management il y a deux ans.

C’est à l’occasion de la négociation des 35 heures que Bart a découvert le syndicalisme. Il n’y avait pas de syndicat dans l’entreprise, explique-t-il. J’ai choisi FO car c’est une organisation neutre, sans étiquette.

Aujourd’hui, un dossier bien plus grave est sur la table. En raison de la crise sanitaire, l’établissement a fermé de mi-mars à mi-juillet et actuellement le taux d’occupation est de 10 % à 15 %. Début octobre, la direction a présenté un projet de réorganisation pour motif économique assorti d’un plan social supprimant 56 emplois sur 82, soit 70 % des effectifs. Les salariés restants se verraient imposer la polycompétence et un temps de travail annualisé. Nous venons aussi d’apprendre la fermeture définitive du restaurant et de la thalasso, s’alarme le délégué FO. Un cinq étoiles sans restaurant ni thalasso, ce n’est pas possible.

Le 15 octobre, FO, seul syndicat de l’entreprise, a organisé une première grève historique pour exiger, entre autres, le retrait du plan social et la réouverture du restaurant. Près de cinquante salariés se sont rassemblés sur le parvis de l’hôtel. Malgré les mesures de confinement, une nouvelle mobilisation a eu lieu le 2 novembre. Pour Bart, il est d’autant plus urgent d’agir que ce même jour l’hôtel a refermé temporairement ses portes. Les salariés ont donc été de nouveau placés en activité partielle.

Le délégué FO a réclamé en vain la négociation d’un accord d’activité partielle de longue durée pour éviter les licenciements.  On aurait pu avoir 60 % du salaire brut pris en charge par l’État durant deux ans, ajoute-t-il. Mais la direction prétend qu’on ne peut pas éviter les licenciements, elle exploite à fond la crise sanitaire. On dirait qu’elle fait tout pour qu’on parte. Des rumeurs font état d’une vente possible de l’établissement. Nous ne lâchons rien. Ma fin de carrière approchant, ma motivation ne fait que s’accroître.

Coaching syndical 

Lui qui n’avait jamais fait d’études s’est accroché pour passer un DUT de gestion des entreprises et administrations option RH en 2007, pour être mieux armé dans les négociations avec le patronat. Il est aussi trésorier du syndicat départemental des hôtels-cafés-restaurants (HCR), conseiller du salarié et défenseur du salarié aux prud’hommes.

Il ne se voit pas encore prendre sa retraite militante. J’aimerais soutenir les représentants du personnel en coulisse, une sorte de coaching syndical, poursuit-il. Ils ont la tâche de plus en plus difficile et sont isolés dans leurs boîtes, surtout dans les HCR où les salariés ne sont pas trop syndiqués.


Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly

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