Le budget de la Sécurité sociale pour 2024 a été définitivement adopté, lundi 4 décembre, après un nouveau recours à l’article 49.3 de la Constitution par le gouvernement, pour la 20e fois en moins de deux ans, et le 5e sur le budget de la Sécurité sociale pour 2024 ! C’est donc au mépris de la démocratie que le gouvernement décide du budget de notre bien commun : notre Sécurité sociale.
Ce texte s’inscrit dans la droite ligne des précédents en ne portant que sur des mesures visant à limiter les dépenses, sans aucune avancée sur les recettes socialisées de notre Sécu.
Rappelons que les exonérations de cotisations patronales se sont élevées à 74 milliards d’euros pour l’année 2022 soit plus de vingt fois l’objectif d’économie du gouvernement.
Ce texte aurait dû être l’occasion de supprimer notamment les exonérations de cotisations familiales sur les salaires (appelé le bandeau famille) afin de financer des projets pourtant ambitieux (service public de la petite enfance, réforme du congé parental). Mais le gouvernement a préféré conserver ces exonérations jusqu’à 2,5 Smic.
Or, le gouvernement envisage donc 3,5 milliards d’euros d’économies : 600 millions d’euros sur le dos des hôpitaux, 1,3 milliard en réduisant le remboursement des médicaments, 300 millions sur les dépenses d’analyse en laboratoire et 1,25 milliard lié à la « responsabilisation » des professionnels et des patients.
Les conséquences pour les assurés seront lourdes, à commencer par la chasse aux arrêts maladie désormais orchestrée par un médecin contrôleur mandaté par l’employeur qui pourra suspendre automatiquement le versement des indemnités journalières en remettant en cause l’arrêt maladie prescrit par le médecin du patient. Cette mesure renverse toutes les valeurs de notre modèle social en donnant tout pouvoir de contrôle à l’employeur plutôt qu’à l’Institution Sécurité sociale dont c’est la mission avec toute l’impartialité qu’elle nécessite.
Mais aussi, alors que nombre d’assurés vivent dans des déserts médicaux ou n’ont pas de médecin traitant, le gouvernement souhaitant développer la téléconsultation vient en restreindre les effets par deux mesures. D’une part, en limitant à trois le nombre de jours d’indemnités journalières pouvant être prescrits en téléconsultation quand elle n’a pas lieu avec le médecin traitant, c’est justement le délai de carence. D’autre part, en cas de pénurie de médicaments, le gouvernement prévoit la possibilité par arrêté ministériel, de limiter voire d’interdire la prescription de certains médicaments par téléconsultation.
En occultant les problèmes de fond (causes profondes des arrêts maladie, déserts médicaux…) et en adoptant une vision court-termiste uniquement sous l’angle des économies, cette nouvelle loi de financement de la Sécurité sociale risque fort de conduire à une renonciation des soins.