Les représentants FO des Agences régionales de santé (ARS) se sont réunis fin 2024 à Paris pour une journée d’échanges entre militants. Sur fond de budgets de plus en plus contraints dans ces structures et d’inégalités de traitement des personnels entre les régions, ils dénoncent, entre autres, le manque d’effectifs, ce qui accroît la charge de travail et induit de nombreuses heures supplémentaires. Et dans ce contexte déjà dégradé, ils s’inquiètent aussi de prochaines suppressions de postes. Les trois syndicats FO présents dans ces établissements se mobilisent pour travailler ensemble les revendications de personnels aux statuts variés.
Les représentants FO des Agences régionales de santé (ARS) se sont réunis à Paris, le 23 octobre, au siège de la Confédération pour une 9e journée annuelle d’échanges et de réflexion. Ces agences sont chargées de définir et mettre en œuvre la politique de santé en région. Leur personnel (environ 9 000 répartis dans 18 structures) relève de divers statuts et conventions : les ARS comptent en effet des fonctionnaires, des praticiens hospitaliers, des agents contractuels de droit public ou de droit privé et des employés de droit privé soumis à la convention collective des organismes de sécurité sociale (UCANSS). Trois syndicats FO s’attellent à améliorer le traitement de tous : le SNFOCOS pour les cadres relevant du droit privé, le SNPASS-FO pour les agents de droit public et la FEC-FO pour les employés relevant du droit privé.
A l’heure des restrictions budgétaires, tous ces représentants FO s’inquiètent de l’avenir des effectifs. Nous avons connu une pause dans les suppressions d’emplois avec le Covid, observe José Robinot, secrétaire général adjoint du SNFOCOS. Nous allons voir si la saignée des emplois observée entre 2015/2019 repart de plus belle. En amont de la censure du gouvernement Barnier – et donc du rejet du projet de loi de finance de la Sécurité sociale pour 2025 – des coupes importantes avaient été annoncées ici et là. A l’ARS Auvergne-Rhône Alpes (environ 900 agents), on a avancé un budget en baisse de 4 millions d’euros pour 2025 alertait ainsi en octobre Nathalie Cavadini, déléguée syndicale (FEC-FO). En Ile-de-France, au moins 30 agents (ETP) recrutés au titre de contractuel n’ont pas été renouvelés cette année.
Le budget, façon couperet
Le budget des ARS est principalement dépendant de l’État. Par ailleurs, disposant d’une grande autonomie les directeurs d’agences procèdent à des arbitrages qui parfois malmènent les conventions et statuts. Ainsi, à la Réunion, le DG de l’ARS s’est même octroyé la possibilité d’ignorer les promotions potentielles, donc de progression dans la carrière, se présentant pour quatre adjoints sanitaires (de catégorie C) au motif que la masse salariale de la structure ne pourrait pas le supporter a mentionné Juan Navarro, secrétaire général du Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales (SNPASS FO). Tout aussi choquant : certaines ARS n’ont pas payé les astreintes réalisées entre octobre et décembre, indiquait José Robinot, ces agences assurant qu’elles n’avaient pas la trésorerie pour le faire et se rattraperaient en janvier… Le budget de l’agence c’est le couperet et il est très important que nos représentants qui siègent dans les conseils d’administration ne votent pas des budgets en diminution, insistait René Ferchaud (SNPASS-FO).
Autre exemple du manque de moyens… En Occitanie il manquerait déjà 80 agents. Et il est question de supprimer au moins six emplois. Pendant ce temps de nombreuses ARS dépensent des sommes folles sur des audits comparatifs permettant d’évaluer les effectifs manquants, pour ensuite ne pas suivre leurs recommandations, s’indignait de son côté Eric Donnadieu, secrétaire du syndicat départemental SNFOCOS de l’Hérault.
Sous-effectifs et heures supplémentaires
Ce contexte d’effectifs contraints induit une augmentation de la charge de travail des équipes. A titre d’exemple, dans notre agence, un questionnaire a été proposé concernant les astreintes, explique Eric Donnadieu. Seulement 20 % des agents ont pris le temps de répondre quant à leur volonté de participer ou non aux astreintes. Ce n’est pas un signe de désintérêt mais d’épuisement. Ce sont des gens très impliqués, imprégnés de la notion de service public, mais aujourd’hui ils n’en peuvent plus. Et de citer les données communiquées par l’ARS Occitanie : en septembre 2024, les agents ont effectué en moyenne 6 h 43 supplémentaires par mois.
Côté rémunérations, des changements sont à l’œuvre. Une nouvelle classification des emplois va être appliquée aux salariés relevant de la convention UCANSS. Mais tout est relatif. L’octroi de trois points de plus se traduira sur la fiche de paie par 22,50 euros bruts supplémentaires en moyenne, indique Frédéric Neau, secrétaire de la section Organismes Sociaux à la FEC FO. Le problème c’est que cette nouvelle classification a été conçue sur la base d’un repérage national des métiers, les emplois-repères, dont aucun ne correspond aux postes identifiés dans les ARS, alerte José Robinot. La transposition à quelque 1 600 salariés de droit privé des ARS va donc être laissée à l’appréciation de chaque directeur. Avec le risque que d’une ARS à une autre les transpositions ne soient pas équitables. Et que certains des salariés soient perdants.
Entre agences, des inégalités de traitement des personnels
L’attribution, on constate aussi des variations dans le traitement des personnels qu’il s’agisse de l’attribution des primes ou de compléments de rémunération. Ainsi toutes ne versent pas l’IFSE (indemnité de fonction de sujétion et d’expertise, s’adressant aux agents de la fonction publique), alors que les ARS étaient destinataires de l’instruction du 17 mai 2024 qui régit cette indemnité. Autre source d’inégalité : la participation de l’employeur aux frais de restauration, qui concerne les agents de droit public comme ceux relevant du droit privé. Certains personnels n’en bénéficient pas du tout, d’autres reçoivent des tickets restaurant dans lesquels la participation de l’employeur n’est pas revalorisée, d’autres encore bénéficient de ticket restaurants alors qu’ils disposent d’un site de restauration collective.
Malgré toutes ces difficultés, les représentants FO obtiennent toutefois des avancées quant aux droits des personnels. En Bretagne, Chloé Berger a participé à la bataille pour que soit rendues possibles les autorisations spéciales d’absence (ASA). Nous avons obtenu une journée non justifiée par agent et par an, ainsi qu’une journée par enfant et par an pour s’occuper de son enfant malade, explique-t-elle. J’aurais aimé obtenir également des jours supplémentaires pour le décès d’un proche… Une clause de revoyure est prévue en 2025.
Sur le terrain, FO obtient des avancées
José Robinot a évoqué, lui, un accord sur la gestion des âges à l’ARS Grand-Est. Accord qui permet désormais à tous les personnels de partir en retraite avec une prime de 500 euros et une participation de l’employeur au pot de départ. En Occitanie, FO a obtenu que les agents de droit privé soient couverts par une protection juridique de même nature que celle des agents de droit public.
A noter encore, la création par les militants FO d’une commission professionnelle permanente qui réunit les représentants SNFOCOS et FEC d’Ile-de-France, d’Occitanie, de Nouvelle Aquitaine, de Bretagne, d’Auvergne-Rhône-Alpes et du Grand Est. Les représentants y discutent des accords obtenus localement sur le télétravail, la durée de la pause méridienne, la prise en charge des heures supplémentaires, etc. L’objectif c’est d’échanger sur les bonnes pratiques, résume Bruno Gasparini, secrétaire général du SNFOCOS. Nous devons faire circuler l’information pour mieux comprendre les tendances de fond qui sont à l’œuvre et préparer les instances nationales. Cette commission a vocation à s’ouvrir aux autres ARS dans lesquelles FO est représentée. Du côté des agents de droit public, le SNPASS-FO organise quant à lui des webinaires pour lister les sujets prioritaires et élaborer les revendications.
Dans tous les cas, soulignait lors de cette journée Arnaud Tranchant, nous devons éviter d’être isolés. Si on arrive rassemblés, on peut résister. Donc il faut rechercher le soutien de l’UD des UD, de l’échelon interprofessionnel…