Les salariés du secteur automobile et ses fournisseurs sont de plus en plus dans la tempête. Depuis un an en Europe, chômage technique, annonces de suppressions de postes et fermetures de sites se succèdent. Quand ce n’est pas le droit à syndicalisation qui est remis en cause.
L’industrie automobile européenne est en crise. Et les mauvaises nouvelles qui se multiplient désormais au fil des semaines, émanant des constructeurs et avec effet boule de neige sur les équipementiers, traduisent la gravité de cette crise. En cause, la concurrence chinoise – notamment sur les véhicules électriques – et la baisse des commandes de voitures neuves. Ce sont 32 000 suppressions de postes qui ont été annoncées au premier semestre 2024 par l’Association européenne des fournisseurs automobiles, pour un secteur qui emploie 1,7 million de travailleurs en Europe.
Volkswagen a quant à lui engagé un plan de restructuration inédit. Actuellement en négociation avec les syndicats, le constructeur vise une réduction des salaires de 10 % ainsi que la suppression des primes spéciales et bonus. La fermeture de trois des dix usines allemandes du groupe (plusieurs dizaines de milliers d’emplois sont concernés), d’abord évoquée, n’est pas encore exclue. Cet été, le constructeur avait déjà décidé de l’arrêt de la production de son usine Audi en Belgique (3 000 emplois).
Hémorragie de l’emploi
Plus au Sud, Stellantis Italie a quant à lui annoncé des baisses de commandes et mis à l’arrêt la production de la Fiat 500 électrique. Les périodes de chômage technique se sont enchaînées pour les salariés, alors qu’en trois ans le groupe a déjà supprimé 10 000 postes (soit 40 % de l’effectif). Environ 20 000 salariés ont manifesté le 18 octobre, dénonçant le désengagement du constructeur automobile et craignant d’autres suppressions de postes à venir.
Dernier en date, cette fois au-delà de l’Europe, le japonais Nissan vient d’annoncer la suppression de 9 000 emplois dans ses effectifs mondiaux pour s’adapter à la dégradation de ses ventes (- 5 % en un an).
Côté équipementiers, le secteur des batteries électriques dégringole. Symbole : la giga-usine suédoise Northvolt. Fondée en 2016 par deux anciens de Tesla, l’entreprise annonçait fin septembre la suppression de 1 600 emplois en Suède (20 % de ses effectifs mondiaux). Quant à l’équipementier automobile allemand Schaeffler, spécialiste des roulements, il a annoncé supprimer 4 700 emplois en Europe et la fermeture de deux sites. ZF Friedrichshafen (transmission et châssis) avait de son côté communiqué dès le début 2024 sur la suppression de 12 000 emplois dans ses effectifs mondiaux.
Chez Tesla, l’axe antisocial
Pendant ce temps, Tesla – groupe appartenant à Elon Musk – opère un rebond remarqué au troisième trimestre 2024, avec un bénéfice net de 2,7 milliards de dollars. Une bonne santé qui ne l’amène toutefois pas à davantage de concessions sur le plan social. L’entreprise refuse en effet la présence des syndicats auprès des quelque 127 000 salariés de ses implantations.
En Suède, elle refuse toujours de négocier la convention collective du secteur. Des mécaniciens suédois du groupe sont engagés dans un mouvement de grève depuis désormais un an. Les professionnels de l’entretien des bornes de recharge de véhicules électriques ont bloqué l’accès aux véhicules de la marque, pendant que l’employeur, lui, s’échine à briser le mouvement à grand renfort de menaces sur les titres de séjour de ses salariés étrangers et en recrutant des briseurs de grève.
En Allemagne, la Gigafactory de Berlin, du même constructeur, ne respecte aucun des accords du secteur (sur le temps de travail ou les salaires) et recrute allégrement en Pologne des travailleurs en contrats précaires. Le syndicat IG Metall a néanmoins réussi à s’y implanter, même s’il doit faire face à une coalition d’organisations maison.