Les salariés d’Exide Technologies en France seraient-ils sur la sellette ? Alarmés par la situation économique de l’entreprise et un projet de filialisation, ils ont fait grève durant deux jours à la fin du mois de juin sur les trois sites français. Ils attendent de leur direction des investissements porteurs pour garantir l’activité de leur usine.
Deux journées de grève les 26 et 27 juin ont incité la direction d’Exide technologies SAS, fabricant de batteries, à réfléchir. Nous avons bloqué les livraisons et les expéditions, sur les trois sites, résume Rachid Ljabli, délégué syndical central FO chez Exide Technologies SAS et secrétaire du CSEC. Comme on fonctionne beaucoup en flux tendu, l’impact se fait vite ressentir et le P-DG s’est déplacé pour nous rencontrer. Le travail a repris le 28 juin après la signature par la direction d’un engagement à redynamiser l’activité du groupe en France. Des réunions de suivi sont programmées en septembre et octobre prochains. Nous avons également rappelé à l’employeur sa responsabilité à l’égard de l’emploi en France, ajoute le délégué central.
Exide est un groupe en difficulté depuis 2009. Au fil de réorganisations successives, la multinationale s’est séparée de sa branche américaine et a fermé plusieurs sites en Europe et notamment en France, où elle est passée de dix sites à trois. Demeurent l’usine de production de Lille (240 salariés), le site logistique d’Herblay et le siège de Gennevilliers. L’ensemble réunit quelque 415 salariés sur les 5000 employés européens du groupe. Le comité social et économique central a enclenché une procédure d’alerte économique en septembre 2023.
La filialisation cacherait-elle une restructuration ?
Mais c’est un projet récent de filialisation qui a mis le feu aux poudres. Exide groupe est en effet organisée en quatre divisions, dédiées à domaines différents (Motion, Automotive, Recycling, Energy Solutions). Aucun site n’est spécialisé sur un seul domaine. L’usine de Lille contribue ainsi essentiellement à la production de batteries de traction (division Motion, 70 à 80 % de son activité) mais aussi à celle de batteries stationnaires (Energy solutions). Or en juin dernier, la direction a dévoilé un projet baptisé Volta, visant à créer une nouvelle entité juridique pour les activités de la division Energy Solutions. Après, que deviendront les activités restantes ? s’alarme Rachid Ljabli.
Ces activités restantes à Lille ne représentent que 15 % des ventes de batteries de traction du groupe. Elles sont déjà concurrencées en interne par la production d’une usine installée en Espagne, où les coûts de production (notamment les salaires et l’énergie) sont très inférieurs. L’activité d’Exide en France s’est effondrée de 40 % en 2023. Et les prévisions 2024 prévoient encore un recul de 24 %. De plus, à Lille nous produisons des batteries au plomb-acide, sur un marché fortement concurrentiel et bientôt en déclin, explique Rachid Ljabli. Il y a très peu de marge à faire. Il faudrait que l’on se positionne sur des technologies plus porteuses tels que le lithium ion ou le recyclage.
Investir sur de nouveaux marchés pour sauver l’activité
Pour cela, des investissements sont nécessaires. Or la direction indique qu’en la matière sa capacité en France est limitée du fait de la mauvaise santé économique d’Exide Technologies SAS. Elle souligne que c’est aussi ce qui motiverait le projet Volta, la création d’une nouvelle entité permettant à celle-ci d’avoir une meilleure capacité d’emprunt. Mais il existe aussi des fonds européens pour soutenir les investissements que nous espérons, souligne Rachid. Dans le groupe, en Espagne, un projet de recyclage du lithium vient d’être couvert à 40 % par des fonds européens. Le CSEC demande également que les commandes françaises soient honorées par la production lilloise. Or, pour l’instant, Nos services après-vente reçoivent régulièrement des batteries qui ont été fabriquées en Espagne, observe Rachid Ljabli.
Depuis la pandémie de Covid, le groupe a recouru à l’activité partielle jusqu’en avril dernier ; quelque 385 000 euros ont été perçus par l’entreprise à ce titre en 2022. Et le recours au dispositif s’est accru entre décembre 2023 et février 2024. La direction souhaitait reconduire l’accord d’APLD pour six nouveaux mois. Mais le syndicat FO s’y est opposé. Nous avions d’ailleurs alerté la direction départementale du travail sur l’utilisation abusive de l’activité partielle et notre employeur avait été convoqué à ce sujet, rappelle Rachid Ljabli. Aujourd’hui tout le monde travaille, mais nous produisons surtout du stock, observe le délégué central. Nous avions une forte crainte que l’entreprise soit soumise à restructuration à la rentrée, ce qui a motivé notre grève.