Près de six mois après l’annonce, par Gabriel Attal, alors ministre de l’Education nationale, d’une réforme intitulée choc des savoirs, la colère ne retombe pas. Au contraire, depuis janvier les mobilisations se succèdent, au niveau national comme local. Au sein d’une large intersyndicale, FO appelle à une journée de mobilisation le 25 mai, contre cette réforme et plus largement pour l’école publique.
C’est une conférence de presse inédite pour une situation inédite, souligne François Pozzo di Borgo, secrétaire général du syndicat FO des lycées et collèges (le SNLC-FO). Mercredi 22 mai, devant les journalistes, huit représentants de la très large intersyndicale expliquaient les raisons de la mobilisation nationale qui se tiendra ce samedi 25 mai. Parmi les revendications, nombreuses, pour sauver l’école publique, l’une ressort et dans le registre de l’urgence : l’opposition au choc des savoirs.
Nos organisations dénoncent l’ensemble des mesures, du premier au second degré, qui signent une certaine vision de la société, celle du tri et de l’assignation sociale, dangereuse pour notre démocratie. Un pays où la jeunesse est assignée à ses positions scolaires et sociales court un grave danger, écrivent les organisations de l’intersyndicale dans une motion lue le matin du 22 mai, lors d’une réunion du Conseil supérieur de l’éducation.
Toutes les réformes de ces dernières années ont abîmé notre école publique. Mais ce choc des savoirs, c’est le choc de trop, poursuit le militant. Depuis son annonce en décembre, par le ministre d’alors de l’Education nationale, Gabriel Attal, la mobilisation perdure. C’est une mobilisation multiforme, on a eu des journées de grèves et des manifestations, mais aussi des actions au niveau plus local avec des journée collèges morts, des réunions d’informations syndicales ou avec les parents. Tous les départements et territoires ont été différemment impactés et touchés par cette mobilisation. L’hétérogénéité montre à quel point le rejet de ces mesures est profond.
Refuser un tri scolaire et social
Pour les personnels de la communauté éducative, le message est simple : Ils ne trieront pas les élèves, ce qu’implique la principale mesure du choc des savoir, à travers la mise en place de groupes de niveau. Ces groupes doivent être mis en place dès la rentrée prochaine pour les classes de 6e et 5e, avant d’être généralisés à l’ensemble des niveaux du collège. Ce retour à des voies d’enseignement parallèle, séparant les élèves et donc les contenus avant même la fin de l’enseignement obligatoire, va conduire à un creusement des inégalités, à de l’assignation et de la relégation sociales, dénonçait Clément Poullet, secrétaire général de la FNEC-FP FO, lors de la manifestation du 2 avril.
Mais le gouvernement n’hésite pas à passer en force : alors que les textes ont été rejetés avec 67 voix contre au CSE (conseil supérieur de l’Education), il persiste à imposer sa réforme. Et ce, même si la recherche scientifique a d’ores et déjà montrer que les groupes de niveau ne fonctionnaient pas. Isolés, les élèves en difficultés ont plus de mal à progresser et se sentent stigmatisés.
Les parents d’élèves mobilisés aussi
Au niveau local, l’opposition s’organise également. Les rectorats organisent des réunions ou webinaires pour expliquer et répondre aux questions sur la mise en place de la réforme. Bon nombre de nos collègues refusent ces réunions, raconte François Pozzo di Borgo. C’est le cas d’un collège d’Annecy où les collègues ont répondu qu’ils refusaient de s’asseoir autour de la table pour discuter de comment limiter les dégâts et organiser le tri de leurs élèves.
Dans certains établissements, les journées collèges morts ont été très suivies, preuve que les parents sont aussi partie prenante de la mobilisation. Dans le Haut de Sèvre, le 20 mai, ce sont 46 collèges, deux lycées et cinq écoles qui ont été touchés par une journée « établissement désert ». En tout, 24 000 élèves ne sont pas allés en cours, précise le secrétaire général. Idem à Rouen où, le 14 mai, 10 000 élèves ont déserté l’école à l’appel de la FCPE. Mais c’est dans le département de la Seine-Saint-Denis que la mobilisation est la plus forte. Ce qui se passe dans le 93 montre à quel point la colère est profonde. Et que la mobilisation ne s’arrêtera pas après le 25 mai, prévient François Pozzo di Borgo.