Le travail forcé existe toujours de par le monde, tout particulièrement en Chine. Un documentaire d’investigation tente de faire la lumière sur cette violation des droits humains, à but très lucratif.
Jusqu’à douze heures de travail par jour, et quatre à cinq heures de sommeil par nuit. Tel est le quotidien de détenus chinois, forcés à travailler dans de gigantesques prisons-usines à travers le pays, sans rémunération aucune, et pour cause : le fruit de leur travail sert à financer les primes de leurs geôliers, voire le parti au pouvoir. Les laogais, ces camps de rééducation des dissidents politiques par le travail, officiellement disparus depuis 1994, existent toujours en Chine.
Cette réalité est mise au jour par le film de Laetitia Moreau, documentariste d’investigation, après qu’une de ses connaissances lui a fait part d’un curieux message tombé entre ses mains : une sorte de bouteille à la mer lancée sous la forme d’une lettre anonyme, glissée dans le mode d’emploi d’un banal test de grossesse, comme on en trouve dans toutes les pharmacies de France.
Sous la menace des matraques
À partir de cette lettre, qui exige la totale discrétion quant à l’identité de son auteur, mais demande la médiatisation du sujet, la réalisatrice passe deux ans à collecter des témoignages d’anciens prisonniers, occidentaux pour la plupart, ou dissidents passés en Occident.
Le plus récent de ces anciens détenus est un professeur d’anglais roumain qui n’a quitté le système carcéral chinois qu’en 2022. Coller des étiquettes, préparer des emballages, plier des notices d’utilisation ou confectionner des fleurs en plastique… La liste est longue des tâches répétitives à assurer sous la menace des coups de matraque.
Après avoir soumis la lettre à ces témoins, Laetitia Moreau remonte lentement la piste jusqu’à l’une des dix à douze prisons de la ville de Tianjin. Son film prend également le temps d’un détour par le Parlement européen pour le vote clé d’un avis sur la future directive concernant le devoir de vigilance des entreprises multinationales à l’égard des droits humains dans les filiales et chez les sous-traitants. Preuve que la missive clandestine aura résonné jusqu’en Europe, aujourd’hui le premier partenaire commercial de la Chine.