Les salariés de l’Établissement français du sang obtiennent satisfaction sur l’essentiel de leurs revendications, après un conflit de plusieurs mois mené par FO. Ce conflit prend racine dans la situation financière fragile du service public du sang.
La mobilisation a fini par payer. En grève illimitée depuis juillet 2023 à l’appel de FO notamment, les salariés de l’Établissement français du sang (EFS) ont finalement obtenu satisfaction, confirmée par écrit le 23 janvier, sur quasiment toutes leurs revendications. J’émets un avis positif sur le protocole de fin de conflit proposé par la direction de l’EFS le 19 janvier, déclare Steeve Perno, délégué syndical central FO.
Les 10 000 salariés de droit privé de ce « service public du sang », chargé notamment de fournir du sang aux établissements de santé à des tarifs réglementés, obtiennent une revalorisation de 10 points de leur salaire de base à compter du 1er mars 2024. Cela correspond à une augmentation de 36 euros bruts par mois pour tous les salariés, soit une progression de 1,5% pour les petits salaires, explique Steeve Perno. C’est ce que demandait FO.
Majoration pour les contraintes de continuité de service
Les salariés qui travailleront le samedi bénéficieront d’une majoration de 15%. Cette mesure, nécessitant une révision de la convention collective, la direction et les syndicats négocieront les 15 et 16 février 2024.
FO demandait également une compensation pour les remplacements inopinés résultant des contraintes de continuité du service transfusionnel. La direction s’engage à ouvrir une négociation afin de déterminer ses modalités.
Elle s’engage également à ouvrir une négociation sur les classifications et les rémunérations associées. Enfin, le montant des tickets restaurant sera unifié à 8€, avec une prise en charge de 60% par l’employeur.
En revanche, la baisse des effectifs n’est pas abandonnée. C’est une décision des tutelles, notamment du ministère de la Santé, explique Steeve Perno. En juillet 2023, le conseil d’administration de l’EFS a annoncé la suppression de 150 emplois en équivalent temps plein. C’est à la suite de cette annonce que FO a appelé à la grève illimitée.
Ni public, ni privé
La situation financière de l’EFS n’est pas bonne (lire encadré) et ce sont les salariés qui en font les frais. Ils n’ont obtenu aucune revalorisation salariale en 2023, malgré une inflation qui frôlait les 6%. Ils n’avaient pas non plus bénéficié de la revalorisation salariale de 1,5% (en juillet 2023) appliquée à la fonction publique. L’EFS est en effet sous un statut hybride qui met les salariés et leurs syndicats dans une situation défavorable. De droit privé, les salariés de cet établissement public industriel et commercial (EPIC) ne sont pas concernés par la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires intervenue en juillet dernier. Mais l’EFS est sous la tutelle du ministère de la Santé. Résultat, quand le point d’indice des fonctionnaires est gelé, c’est aussi le cas des salaires à l’EFS, mais quand il augmente, on nous rappelle que nous ne sommes pas fonctionnaires, explique Steeve Perno. Même problème en 2022. Lorsque les salaires des soignants sont revalorisés au titre du Ségur de la santé, seule une partie du personnel de l’EFS en bénéficie. Et encore il a fallu faire grève.
Une situation financière fragile
Les difficultés financières de l’Établissement français du sang (EFS) tiennent à plusieurs causes :
une baisse des transfusions sanguines et donc de l’activité de l’EFS, l’inflation forte, qui pèse sur les coûts de production de l’établissement tandis que celui-ci ne bénéficie pas de boucliers tarifaires. Enfin : l’impossibilité de déduire la TVA des produits qu’achète l’EFS suite à réforme fiscale européenne de 2019 sur les ventes de sang.
Face à cette situation, la loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2024 a acté d’une dotation de 100 millions d’euros pour financier la fourniture de produits sanguins. C’est une mission de service public : les produits sanguins sont vendus à des tarifs réglementés aux établissements de santé. Le problème est qu’il n’y a pas de financement pour la fourniture de plasma. Or l’EFS perd aussi de l’argent sur cette activité. L’établissement est donc obligé d’utiliser une partie de la dotation des 100 millions d’euros pour couvrir son déficit sur la vente de plasma. Actuellement, il n’y a toujours pas de financement, c’est en discussion avec la tutelle, déclare Steeve Perno, délégué syndical central FO à l’EFS.