À quelques jours de l’ouverture de la saison dans les stations de ski, des centaines de travailleurs saisonniers manquent encore à l’appel. La pénurie est désormais structurelle dans le secteur des remontées mécaniques, comme elle l’est dans l’hôtellerie-restauration et la production agricole qui affrontent une intensification des difficultés de recrutement depuis la crise sanitaire.
Tardif et constitué de mesures entrant en pleine application en 2024, sur le logement, l’accompagnement, la formation, le plan gouvernemental de mai dernier n’a eu aucun effet cette année. Et l’exécutif n’est pas revenu sur l’une des principales causes de la désaffection : les réformes de l’Assurance chômage qui, depuis fin 2021, ont provoqué une chute moyenne de 20% de l’allocation des saisonniers. Pis, en refusant d’agréer avant mi-2024 le nouvel accord trouvé par les interlocuteurs sociaux, il diffère d’autant les améliorations obtenues par FO.
Dans ce contexte, toute l’organisation est mobilisée pour améliorer les droits des travailleurs saisonniers, et sécuriser leur parcours.
Alors que la saison commence le 16 décembre dans les stations de ski, des centaines de postes saisonniers restent vacants. Dans les remontées mécaniques, les centres de vacances, les hôtels et restaurants. Fin novembre, 20% des offres d’emploi étaient non pourvues selon l’Association nationale des maires des stations de montagne, qui jugeait la situation moins mauvaise que celle de l’an dernier. Les difficultés de recrutement, ajoutées au manque de neige, avaient alors contraint nombre de stations à fermer plus tôt !
Un plan gouvernemental tardif et insuffisant
Mais l’optimisme n’est pas de mise pour Éric Becker, conseiller fédéral chez FO-Transports et logistique-UNCP, et référent national « saisonniers » dans le secteur des remontées mécaniques. Les employeurs n’ont reçu en moyenne que deux propositions pour un poste, contre une quinzaine avant la crise sanitaire. Cela confirme la disparition d’une partie des travailleurs habitués à faire saison, commente-t-il. À son tour, le secteur des remontées mécaniques est confronté aux pénuries structurelles de saisonniers que l’hôtellerie-restauration et la production agricole connaissent de longue date. Et avec une intensité inédite depuis la période Covid. En 2022, 65 000 postes n’ont pas été pourvus, tous secteurs confondus.
Salaire peu élevé en raison de contrats courts et/ou à temps partiel, emploi précaire, protection sociale limitée, conditions de travail pénibles, difficultés à se loger décemment dans les zones touristiques comme rurales… la crise sanitaire a rendu criante la précarité de l’emploi saisonnier et a amorcé la désaffection des salariés.
Entrées en vigueur à partir d’octobre 2021, quand l’inflation commençait à exploser, les nouvelles règles de l’Assurance chômage ont transformé la désaffection en quasi-désertion. Et pour cause, les saisonniers, enchaînant contrats courts et périodes non travaillées, ont vu leur allocation chuter de 20%, en moyenne.
Ce n’est pas faute d’avoir alerté. Dès février 2022, lors d’une rencontre au ministère du Travail pour y présenter son cahier revendicatif sur les saisonniers, FO exigeait des dispositions spécifiques pour ces salariés, ainsi que la restauration de l’ouverture de droits dès quatre mois de travail, le rechargement des droits dès un mois. Des revendications défendues de nouveau lors de la négociation interprofessionnelle sur l’Assurance chômage achevée mi-novembre, et sur lesquelles FO a partiellement obtenu gain de cause.
Pour sécuriser les parcours, la confédération, qui défend un statut protecteur pour les saisonniers avec les fédérations FGTA-FO et le secteur FO-Remontées mécaniques et domaines skiables, a engagé un travail de réactualisation de sa plateforme revendicative, nourri par plusieurs études auprès des saisonniers. Il y a urgence à agir. Si l’exécutif s’est enfin saisi du sujet le 30 mai, son plan sur trois ans – qui enjambe donc la période des Jeux olympiques ― est déjà sans incidence sur 2023, les quinze mesures entrant en pleine application en 2024. Pour l’essentiel, il se résume au développement de programmes existants pour mettre en œuvre les solutions d’emploi pendant l’intersaison ou la pluriactivité. Mais il ne dit rien des nécessaires hausses de salaire et amélioration des conditions d’emploi et de travail, seules réponses au manque d’attractivité des emplois pour FO.