Le fabricant français de câbles, qui a annoncé son projet de céder d’ici 2024 la moitié de ses sites et de ses effectifs français, doit préciser son plan stratégique ce vendredi 12 mars en comité social et économique-central (CSE-C). Plus d’un millier de salariés seraient concernés par les cessions ou joint-ventures projetées.
Les salariés ne se laisseront pas conduire à l’échafaud sans rien faire. Nous exigeons, vendredi, des réponses à nos questions. Sinon, la direction s’expose à des mobilisations !
, martèle Dominique Sciot, le très déterminé délégué syndical central FO du groupe Nexans.
A la veille du conseil social et économique-central (CSE-C) France, prévu ce vendredi 12 mars, la tension est palpable chez les 2 300 salariés français du fabricant de câbles, toujours sous le choc
de l’annonce de son projet de cession de 50 % des activités et des effectifs, en France et dans le monde. Dans l’Hexagone, plus d’un millier de salariés seraient concernés selon les premiers chiffres concédés par la direction.
Le plan stratégique devrait être précisé
Les deux précédents CSE-C, les 16 et 23 février, n’ont pas épuisé les questions des représentants des salariés et des syndicats, également convoqués. Les cessions sont annoncées d’ici 2024. La direction ne nous a rien dit sur le calendrier précis ni sur les potentiels repreneurs ou les projets industriels associés. Sa seule réponse est que Nexans prendra son temps. Hormis ça, nous restons dans l’ignorance la plus complète. Ce n’est plus tolérable
, poursuit le DSC FO. La direction du groupe coté en bourse devrait préciser, ce vendredi, son plan stratégique.
Il serait temps. Le virage annoncé le 17 février, jour de présentation des résultats annuels, est brutal. Sous la direction de Christopher Guérin, directeur général depuis mi-2018, l‘ex-Alcatel Câbles veut se recentrer sur les métiers liés à l’électrification, qui sont portés par une vague d’investissements dans la transition énergétique, mais ne représentent que 55 % des revenus du groupe.
FO Métaux dénonce une politique de la terre brûlée
Pour mener cette transformation radicale, Nexans va donc engager un plan massif de cessions d’activités dans les secteurs historiques comme l’automobile, les télécoms, le pétrole ou l’aéronautique, pour avoir des liquidités et faire des acquisitions dans des domaines jugés prometteurs (la haute tension sous-marine, le bâtiment, la distribution d’électricité).
En clair, cela revient à céder l’équivalent de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires, soit 30 % du groupe et la moitié des 26 000 salariés dans le monde, pour acquérir entre 1,5 et 2 milliards d’actifs, principalement dans des pays à bas coûts (Asie et Amérique Latine).
Le groupe Nexans veut appliquer la politique de la terre brûlée qui ressemble à celle de l’Amazonie, où une grande déforestation est engagée
, dénonce la Fédération FO des Métaux, qui juge l’annonce proprement indécente
. Pour s’adapter au nouveau monde technologique, il y a d’autres méthodes plus constructives, plus stratégiques et plus humaines (…) que de couper dans les effectifs et se séparer de certaines activités
, martèle-t-elle dans son communiqué.
Et de rappeler que le groupe a très bien su investir par le passé, par exemple, dans un nouvel outil de travail pour fabriquer les nouveaux câbles haute tension pour la future génération d’avions hybrides et électriques d’Airbus
. Les salariés du groupe sont compétents et volontaires pour affronter cette nouvelle révolution technologique imposée par la transition énergétique
, souligne FO Métaux.
Six sites et 1 100 salariés concernés en France
Mais l’orientation annoncée est toute autre. D’après le Comex (comité exécutif) de Nexans, six sites seraient concernés par les futures cessions ou « joint-ventures » : ceux de Draveil (250 salariés, Essonne), de Paillart (120 salariés, Oise), de Mehun-sur-Yèvre (150 salariés, Cher) et d’Andrézieux (100 salariés, Loire) pour la branche « industrie » et, pour la branche « télécommunications », les deux sites ardennais de Fumay (150 salariés) et de Vrigne-aux-Bois (70 salariés).
Sur les 2 300 salariés de Nexans en France, seulement 1.200 resteraient dans le groupe
, précise Dominique Sciot. Le délégué syndical central FO a demandé une réunion extraordinaire du comité de groupe France (intégrant les représentants des salariés des filiales) pour que les informations soient partagées, par tous.
FO exige des garanties de maintien des emplois et des acquis sociaux
Sans attendre ce vendredi, FO (deuxième syndicat en termes de représentativité) et les trois autres organisations ont commencé à discuter des modalités de mobilisation. Il est inconcevable de plonger les salariés dans une telle incertitude, et de les y laisser. Ils se sentent lâchés. Le groupe va vite devenir une cocotte-minute. S’il croit que les salariés vont continuer à embellir tranquillement la mariée, il se trompe lourdement
, met en garde Dominique Sciot, 35 ans d’ancienneté.
Cela ne va pas faire les affaires de Nexans. Car le groupe compte conduire sa transformation, en maintenant à flot le chiffre d’affaire et en doublant quasiment son excédent brut d’exploitation (il veut le passer de 6,1 % du chiffre d’affaires fin 2020 à 10-12 % du chiffres d’affaire d’ici 2024).
Soucieux de préserver les emplois et les intérêts des salariés, Dominique Sciot a fixé la ligne rouge : FO exige qu’il y ait, dans le cadre des cessions, des garanties de maintien des emplois et des acquis sociaux. Et si des plans sociaux sont prévus, Nexans devra les prendre en charge
, annonce le militant.
Chose certaine, il n’entend pas se contenter des promesses du Comex, selon lesquelles les représentants des salariés seront intégrés aux négociations avec les repreneurs. Dans la même veine, le groupe a assuré qu’il allait rembourser le prêt garanti par l’État (PGE) de 280 millions d’euros, qu’il a obtenu pendant la crise sanitaire.
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly