Saisi par FO, le tribunal de Nanterre a annulé l’accord sur le travail de nuit applicable depuis fin 2019 dans les 113 magasins Monoprix situés hors des Zones touristiques internationales (ZTI). L’enseigne ne peut plus y employer de salariés après 21h, sous peine sinon d’une astreinte de 30 000 euros par infraction constatée.
Voilà de nouveau contrecarré, par l’action syndicale, l’acharnement de Monoprix à imposer le travail de nuit à ses salariés ! Le 10 février, FO a obtenu gain de cause auprès du tribunal de Nanterre, en faisant annuler le dernier accord de l’enseigne sur le travail de nuit, de 21h à 22h30 (avec une fermeture des magasins à 22h). Et quel accord ! Il avait été signé le 11 décembre 2019, quelques jours après qu’un jugement similaire a invalidé le précédent accord sur le sujet (signé en octobre 2018), lui-même proposé après une décision de justice défavorable à l’enseigne !
Au terme d’un combat de deux ans, la justice tranche en faveur du droit des salariés. Elle rappelle que la satisfaction du client et son confort de consommation ne constituent pas un service d’utilité sociale, comme Monoprix voudrait le faire croire
, se félicite Gérald Gautier, secrétaire de la section fédérale FO du commerce. A travers ce jugement, le militant voit conforter le combat historique de FO pour que le travail de nuit entre 21 heures et 7h (qui fait partie des facteurs de pénibilité) reste exceptionnel en raison de l’impact pour la santé des travailleurs et sur la vie familiale, et pour qu’il soit justifié pour être autorisé.
Le chiffre d’affaires réalisé sur le créneau horaire de nuit est ridicule
Pour motiver son recours au travail de nuit, Monoprix avait invoqué la nécessité d’assurer la continuité des services d’utilité sociale et de l’activité économique de ses magasins. Le tribunal de Nanterre s’est chargé de remettre les points sur les i. Le travail de nuit ne peut pas être le mode d’organisation normal au sein d’une entreprise et ne doit être mis en œuvre que lorsqu’il est indispensable
, rappelle le tribunal de Nanterre, dans ce jugement du 10 février.
Comme l’a démontré l’analyse des chiffres, l’offre n’a pas rencontré de demande : il n’y a pas eu d’afflux de consommateurs. Ce qui confirme l’absence d’un quelconque besoin « sociétal » d’une ouverture de nuit des commerces. Le chiffre d’affaires réalisé entre 21 heures et 22 heures est ridicule, de l’ordre de 1,5 % supplémentaire. Et c’est un report de chiffres d’affaires. Il ne peut justifier un tel accroissement des contraintes des salariés, au point qu’ils sacrifient leur repos nocturne
, martèle le secrétaire fédéral Gérald Gautier.
La tentation des caisses automatiques… de nuit
Conséquence du jugement, Monoprix se voit interdit d’employer des salariés après 21 heures dans les 113 magasins situés en dehors des Zones touristiques internationales (ZTI). Sous peine, sinon, d’une astreinte de 30 000 euros par infraction constatée.
Reste que la crise sanitaire a déjà limité ses ambitions. Monoprix a cessé de recourir au travail de nuit pendant le premier confinement
, commente Mario Ova, délégué syndical FO de l’enseigne. Pour autant, celle-ci n’a pas renoncé aux ouvertures nocturnes de ses magasins en dehors des ZTI.
Dès la sortie du premier confinement, elle a expérimenté, de mai à septembre, dans une cinquantaine d’entre eux l’ouverture de nuit sans caissière, en s’appuyant sur ses caisses automatiques laissées accessibles de 21 heures jusqu’à 23h30.
Sans surprise, les résultats ne sont pas plus concluants. Ces ouvertures nocturnes ont coûté plus cher qu’elles n’ont rapporté, vu la faiblesse du chiffre d’affaires réalisé de nuit. Dans le magasin où je travaille, il s’élevait à 100-150 euros. Cela ne compense pas les frais de structure et de personnel, car la présence d’un cadre est nécessaire lors de la fermeture du magasin au public
, poursuit Mario Ova.
Le militant FO craint néanmoins qu’à l’avenir, une fois que la crise sanitaire sera dépassée et qu’on sera revenu à une vie normale
, l’enseigne ne réitère l’expérience des caisses automatiques de nuit, aujourd’hui suspendue.
ZTI : FO poursuit son combat juridique contre les exceptions au repos dominical
La section fédérale FO Commerce poursuit son combat juridique pour que l’ouverture des commerces de nuit ne s’impose jamais comme une référence du monde du travail. Après que le Conseil d’État a refusé, début février, d’étudier le recours déposé par FO pour obtenir l’annulation du décret qui établit les exceptions au repos dominical dans les commerces situés dans les zones touristiques internationales (ZTI), ainsi que l’annulation des arrêtés délimitant ces ZTI, elle vient de décider de porter le dossier devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly