Une nouvelle ordonnance a été adoptée hier en Conseil des ministres [1]. Elle est relative à la tenue dématérialisée des réunions des instances représentatives du personnel durant l’état d’urgence sanitaire.
En principe, en l’absence d’accord entre l’employeur et les membres élus du CSE, le recours à la visioconférence est limité à trois réunions par année civile (art. 2315-4 et art. L 2316-16 du Code du travail).
L’ordonnance élargit, à titre dérogatoire et temporaire, la possibilité de recourir à la visioconférence pour tenir les réunions de l’ensemble des instances représentatives du personnel régies par les dispositions du code du travail, sur simple information préalable de leurs membres par l’employeur.
De plus, l’ordonnance permet, à titre dérogatoire et temporaire, l’organisation de réunions de ces instances par conférence téléphonique et messagerie instantanée, là encore, sur simple information préalable de l’employeur. Un décret doit fixer les conditions de leur déroulement.
Ainsi, en cas de consultation par conférence téléphonique ou par messagerie instantanée, le dispositif technique mis en œuvre devra garantir l’identification des membres et leur participation effective en assurant la retransmission continue et simultanée du son des délibérations. Il ne devra pas faire obstacle à des suspensions de séance.
En outre, en cas de vote à bulletin secret, le dispositif de vote mis en œuvre devra garantir que l’identité de l’électeur ne peut à aucun moment être mise en relation avec l’expression de son vote.
Lorsque ce vote est organisé par voie électronique, le système retenu devra assurer la confidentialité des données transmises ainsi que la sécurité de l’adressage des moyens d’authentification, de l’émargement, de l’enregistrement et du dépouillement des votes.
Le recours à la messagerie instantanée n’est toutefois autorisé qu’en cas d’impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique, ou lorsqu’un accord d’entreprise le prévoit.
Un « droit de veto » est prévu pour maintenir la tenue en présentiel de la réunion.
Ce « droit de veto » est toutefois d’une application restreinte, puisqu’il n’est possible que pour les informations et consultations menées dans le cadre :
- Des procédures de licenciements économiques collectifs (chapitre III du titre III du livre II de la première partie du code du travail) ;
- De la mise en œuvre des accords de performance collective (art. L 2254-2) ;
- De la mise en œuvre des accords portant rupture conventionnelle collective (art. L 1237-19) ;
- De la mise en œuvre du dispositif spécifique d’activité partielle de longue durée (art. 53 de la loi du 17 juin 2020).
Ce droit de veto permet aux membres élus des instances représentatives du personnel de s’opposer, à la majorité de ceux appelés à y siéger, au plus tard 24h avant le début de la réunion, au recours à la visioconférence, à la conférence téléphonique ou à la messagerie instantanée. Il n’est cependant ouvert, pour le recours à la visioconférence, que lorsque l’employeur n’a pas encore épuisé sa faculté de tenir trois réunions annuelles par visioconférence, qu’il tient du droit commun.
Ces dispositions dérogatoires et temporaires sont applicables pour les réunions convoquées à partir du lendemain de la publication de l’ordonnance et jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire.
Le rapport au Président de la République relatif à cette ordonnance [2] justifie ce recours par le fait que dans le contexte d’état d’urgence sanitaire, ces mesures présentent le double avantage d’assurer la continuité du fonctionnement des instances et notamment de permettre leur consultation sur les décisions de l’employeur induites par la crise sanitaire
.
Pour FO, il est impératif que le champ de la consultation puisse être limité à ces cas d’urgence, afin d’éviter que l’employeur tente de faire passer en force
certaines mesures sans rapport avec la situation actuelle. Il aurait été nécessaire, selon nous, de limiter l’élargissement du recours à ces modes de réunions dématérialisés aux seules décisions de l’employeur liées à l’état d’urgence, ou au moins de ne pas limiter le droit de veto des élus aux seuls cas prévus par l’ordonnance.
De plus, le recours à la visioconférence, à la conférence téléphonique ou à la messagerie instantanée est autorisé pour l’ensemble des réunions, après que l’employeur en a(it) informé leurs membres
. Il semble donc qu’il appartienne à l’employeur d’en prendre l’initiative. Par conséquent, qu’en est-il de la possibilité, pour les élus de solliciter l’organisation des réunions dans ces conditions, ce qui nous parait impératif, compte tenu des circonstances ?
Source: Éditoriaux de jean-claude Mailly