À 57 ans, Valentine Costa est déléguée FO de Biogroup Lorraine. Militante chevronnée, elle y mène actuellement le premier mouvement de grève pour les salaires. Massivement suivi.
Ils s’étaient mobilisés contre la réforme des retraites et d’autres projets nationaux, mais jamais, de mémoire de syndicaliste de la région, les salariés des laboratoires médicaux Biogroup Lorraine n’avaient fait grève pour eux-mêmes – pas même avant le rachat de la marque Evolab par le groupe en 2018. Mais après cinq ans sans augmentation générale des salaires et sur le point de voir une énième décision unilatérale de l’employeur entérinée, Valentine Costa a dit : Ras-le-bol !
À bientôt 58 ans, la déléguée syndicale de la filiale lorraine de Biogroup, où FO est majoritaire à 70 %, mène donc, et avec une grande discipline, la première grève de sa vie. Elle a dû jouer des coudes pour parvenir à l’organiser. C’est compliqué : nous sommes soixante-dix labos sur un territoire de 250 kilomètres de long, et aucun moyen de communication entre les salariés n’a été accordé par notre direction, explique-t-elle. Après un mois de préparation minutieuse, les résultats sont là : 80 % de salariés grévistes les trois premiers jours. Quand les négociations salariales ont échoué une première fois – la direction se bornant à proposer 2 % à 4,5 % de hausse –, les personnels des laboratoires se sont même mis spontanément en grève.
Je suis fière, franchement, qu’il y ait eu une telle adhésion au mouvement, confie Valentine Costa. Le piquet de grève nous a permis d’être tous ensemble, de sentir la solidarité entre tous les salariés. Que la grève aboutisse ou non, ces liens resteront., se réjouit la déléguée, entrée en militantisme en 2005 dans une autre organisation syndicale qui ne lui a pas convenu. Dès qu’il y avait un problème, on ne nous fournissait pas d’aide, on nous disait seulement d’aller aux prud’hommes. Cette fille d’enseignants, qui a baigné dès l’enfance dans un milieu syndical, a donc rejoint FO en plein milieu de son mandat – sensible à la fois à la liberté et au soutien accordés par l’union départementale de Moselle.
Des petits labos aux grands plateaux
Au cours de sa vie de technicienne à Thionville (Moselle), Valentine Costa a vu le milieu des laboratoires d’analyses évoluer, des petites structures aux grands plateaux techniques. Plus de machines, moins d’humains ! Mais ça me va, ça me laisse plus d’espace pour faire du syndicalisme, par exemple.
Ce ne sont pas les besoins qui manquent, car le rachat d’Evolab par Biogroup il y a cinq ans s’est soldé par la perte d’acquis, y compris le treizième mois, dont les salariés demandent aujourd’hui le retour. Entre surcharge de travail et turnover lié aux faibles salaires, les conditions de travail sur les sites en tension sont également dans le viseur des salariés en grève.
Au départ, la direction n’a pas compris, analyse Valentine Costa. Jamais elle n’aurait pensé que le mouvement serait si fédérateur. Nous non plus ! Si les négociations patinent malgré les bénéfices records engrangés pendant la crise du Covid, c’est aussi que la direction régionale de Biogroup Lorraine ne dispose que d’une marge de manœuvre limitée face à la direction France. Mais le mouvement est sur le point d’essaimer : une grève nationale est désormais envisagée.