Des milliers de personnes ont manifesté dans plusieurs grandes villes de France le samedi 25 mai pour protester contre la réforme du choc des savoirs, et notamment la mise en place des groupes de niveau. Parmi les personnels participant aux manifestations, tous les corps professionnels existant à de l’Éducation nationale étaient représentés, et ces agents ont défilé aux côtés des parents et des élèves. Une mobilisation déterminée visant l’objectif du retrait de la réforme, avec un slogan.
Face au choc des savoirs, la mobilisation s’inscrit dans la durée. Ce samedi 25 mai, enseignants, parents d’élèves et personnels de l’Education nationale ont manifesté dans les rues de Paris, Marseille mais aussi Rennes, Lyon et Toulouse. Au total, 11 500 manifestants dans toute la France, selon le décompte, toujours faible, du ministère de l’Intérieur. Dont 2 000 à Paris. Les syndicats ont comptabilisé, eux, 15 000 personnes dans les rues de la capitale, 2 000 à Lyon, 1 000 à Rennes, 1 200 à Toulouse, ou encore 500 à Marseille.
Les élèves étaient également présents. Dans le cortège, dans la capitale, Maxence, jeune collégien parisien de 11 ans, lève sa pancarte garnie d’un slogan pour le moins clair : Je ne suis pas un déchet, je ne veux pas être trié. Dans les cortèges organisés dans les différentes villes, c’est notamment la mise en place de groupes de niveau, en français et en maths, qui était pointée. Cette mesure doit être appliquée aux élèves de 6e et 5e dès la rentrée prochaine, avant d’être généralisée à tous les niveaux pour 2025. C’est un tri social et scolaire que ne peuvent accepter les enseignants et tous ceux qui sont attachés à l’école et ses principes d’égalité, d’équité et de réussite de tous, souligne Clément Poullet, secrétaire de la FNEC-FP FO.
C’est rare que l’union soit aussi forte
Et la mobilisation vient de loin. Depuis l’annonce de la réforme du choc des savoirs, par le ministre de l’Éducation qui était alors Gabriel Attal, il ne se passe pas une journée sans qu’une action ne se déroule dans les collèges de France. La mobilisation est multiforme, notamment sous l’impulsion des parents qui ont amené à des journées établissements déserts par exemple, indique Clément Poullet. Cette union est particulièrement précieuse dans la bataille que nous menons face aux mesures du choc des savoirs.
A Paris, dans la manif’, une militante constate également la force de ce lien entre enseignants et parents d’élèves. C’est rare que l’union soit aussi forte, sourit la professeure des écoles. Plus loin dans le cortège, Marie et ses collègues qui enseignent le français dans les collèges de la Seine-Saint-Denis ne comptent plus les actions de soutien des parents. On a pu compter sur eux pour organiser des réunions, pour nous soutenir lors des rassemblements, et même pour organiser des petits déjeuners d’information devant les grilles. C’étaient les meilleurs croissants de ma vie !
Et cette unité va plus loin que les familles et les enseignants : ce sont tous les acteurs de la communauté éducative qui descendent dans les rues. Il y a aussi des personnels administratifs comme des chefs d’établissement, constate Agnès Anderson, secrétaire générale de ID-FO (personnels de direction). C’est important de garder cette cohésion entre les organisations syndicales de tous les corps de l’éducation nationale.
Des chefs d’établissements en première ligne
Les chefs d’établissements, en première ligne pour faire appliquer cette réforme, étaient ainsi nombreux dans le cortège de FO. Cette mesure des groupes de niveau est complètement en opposition avec notre réalité sur le terrain, souligne Anne Koch d’ID-FO. D’autant que la recherche en sciences de l’éducation nous l’a montré : séparer les bons et les mauvais élèves, cela ne marche pas. Les jeunes en difficulté ne s’améliorent pas, au contraire !
Et sans compter que, pour les chefs d’établissements, la mise en place des groupes de niveau relève d’un casse-tête sans nom. Il va falloir aligner les heures de français pour toutes les classes de 6e et de 5e. Avec la généralisation, cela s’annonce impossible, pointe David Limole, secrétaire académique pour d’ID-FO Versailles. De fait, on va proposer aux enseignants des autres matières les plages horaires restantes. Or, l’emploi du temps, c’est un réel outil de ressources humaines pour nous. Ajoutez à cela le manque d’enseignants et vous voyez le bazar que ça va être…
En tant que proviseurs, David Limole et ses collègues doivent proposer une répartition des moyens horaires pour la rentrée et qui prennent en compte ces groupes de niveau. Nous sommes chefs d’établissement, nous devons appliquer les réformes. Mais face à la loyauté que je dois à l’institution, mon engagement syndical est important. Agnès Anderson, elle, s’indigne que les chefs d’établissement soient, encore une fois, en première ligne. Le ministère se décharge sur nous et nous devenons ceux qui organisent le chaos et la pénurie qu’impliquent ces groupes, insiste la secrétaire de ID-FO.
Mobilisés jusqu’au retrait
La journée de ce samedi 25 mai a prouvé une chose : la bataille de l’opinion est gagnée. C’est toute la communauté éducative qui s’oppose à ces groupes de niveau. Avec en premier lieu les familles, observe Clément Poullet. L’opposition est profonde, au moins autant que la colère face aux réformes de tri social qui s’accélèrent depuis le covid. Les gens sont déterminés à protéger l’école et son modèle républicain.
Ce samedi, alors que le cortège parisien arrivait sur la place de la Bastille, se posait la question de la suite à donner au mouvement. Nous allons appeler à tenir des assemblées générales et réunions dans tous les collèges, écoles ou lycées, dès lundi !, précisait le secrétaire général de la FNEC FP-FO. Il faut discuter de tous les moyens utiles et efficaces pour bloquer cette réforme. Et pourquoi pas la grève lors des périodes d’examens à venir. Pour les militants FO, le message est clair. Nous resterons mobilisés jusqu’au retrait du choc des savoirs.